Les grandes espérances. Чарльз Диккенс
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Les grandes espérances - Чарльз Диккенс страница 35

Название: Les grandes espérances

Автор: Чарльз Диккенс

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

Серия:

isbn:

isbn:

СКАЧАТЬ c'est encore toi? dit miss Pocket. Que veux-tu?»

      Quand je lui eus dit que j'étais seulement venu pour savoir comment se portait miss Havisham, Sarah délibéra si elle me renverrait ou non à mon ouvrage. Mais ne voulant pas prendre sur elle une pareille responsabilité, elle me laissa entrer, et revint bientôt me dire sèchement que je pouvais monter.

      Rien n'était changé, et miss Havisham était seule.

      «Eh bien! dit-elle en fixant ses yeux sur moi, j'espère que tu n'as besoin de rien, car tu n'auras rien.

      – Non, miss Havisham; je voulais seulement vous apprendre que j'étais très content de mon état, et que je vous suis on ne peut plus reconnaissant.

      – Là!.. là!.. fit-elle en agitant avec rapidité ses vieux doigts. Viens de temps en temps, le jour de ta naissance. Ah! s'écria-t-elle tout à coup en se tournant vers moi avec sa chaise, tu cherches Estelle, n'est-ce pas?»

      J'avais en effet cherché si j'apercevais Estelle, et je balbutiai que j'espérais qu'elle allait bien.

      «Elle est loin, dit miss Havisham, bien loin. Elle apprend à devenir une dame. Elle est plus jolie que jamais, et elle est fort admirée de tous ceux qui la voient. Sens-tu que tu l'as perdue?»

      Il y avait dans la manière dont elle prononça ces derniers mots tant de malin plaisir, et elle partit d'un éclat de rire si désagréable que j'en perdis le fil de mon discours. Miss Havisham m'évita la peine de le reprendre en me renvoyant. Quand Sarah, la femme à la tête en coquille de noix, eut refermé la porte sur moi, je me sentis plus mécontent que jamais de notre intérieur, de mon état et de toutes choses. Ce fut tout ce qui résulta de ce voyage.

      Comme je flânais le long de la Grande-Rue, regardant d'un air désolé les étalages des boutiques en me demandant ce que j'achèterais si j'étais un monsieur, qui pouvait sortir de chez le libraire, sinon M. Wopsle? M. Wopsle avait entre les mains la tragédie de George Barnwell3, pour laquelle il venait de débourser six pence, afin de pouvoir la lire d'un bout à l'autre sans en passer un mot en présence de Pumblechook, chez qui il allait prendre le thé. Aussitôt qu'il me vit, il parut persuadé qu'un hasard providentiel avait placé tout exprès sur son chemin un apprenti pour l'écouter, sinon pour le comprendre. Il mit la main sur moi et insista pour que je l'accompagnasse chez M. Pumblechook. Sachant que l'on ne serait pas très gai chez nous, que les soirées étaient très noires et les chemins mauvais; de plus, qu'un compagnon de route, quel qu'il fût, valait mieux que de n'avoir pas de compagnon du tout, je ne fis pas grande résistance. En conséquence, nous entrions chez M. Pumblechook au moment où les boutiques et les rues s'allumaient.

      N'ayant jamais assisté à aucune autre représentation de George Barnwell, je ne sais pas combien de temps cela dure ordinairement, mais je sais bien que ce soir là nous n'en fûmes pas quittes avant neuf heures et demie, et que, quand M. Wopsle entra à Newgate, je pensais qu'il n'en sortirait jamais pour aller à la potence, et qu'il était devenu beaucoup plus lent que dans un autre moment de sa déplorable carrière. Je pensai aussi qu'il se plaignait un peu trop, après tout, d'être coupé dans sa fleur, comme s'il n'avait pas perdu toutes ses feuilles les unes après les autres en s'agitant depuis le commencement de sa vie. Ce qui me frappait surtout c'étaient les rapports qui existaient dans toute cette affaire avec mon innocente personne. Quand Barnwell commença à mal tourner, je déclare que je me sentis positivement identifié avec lui. Pumblechook s'en aperçut, et il me foudroya de son regard indigné, et Wopsle aussi prit la peine de me présenter son héros sous le plus mauvais jour. Tour à tour féroce et insensé, on me fait assassiner mon oncle sans aucune circonstance atténuante; Millwood avait toujours été rempli de bontés pour moi, et c'était pure monomanie chez la fille de mon maître d'avoir l'œil à ce qu'il ne me manquât pas un bouton. Tout ce que je puis dire pour expliquer ma conduite dans cette fatale journée, c'est qu'elle était le résultat inévitable de ma faiblesse de caractère. Même après qu'on m'eut pendu et que Wopsle eut fermé le livre, Pumblechook continua à me fixer en secouant la tête et disant:

      «Profite de l'exemple, mon garçon, profite de l'exemple.»

      Comme si c'eût été un fait bien avéré que je n'attendais, au fond de mon cœur, que l'occasion de trouver un de mes parents qui voulût bien avoir la faiblesse d'être mon bienfaiteur pour préméditer de l'assassiner.

      Il faisait nuit noire quand je me mis en route avec M. Wopsle. Une fois hors de la ville, nous nous trouvâmes enveloppés dans un brouillard épais, et, je le sentis en même temps, d'une humidité pénétrante. La lampe de la barrière de péage nous parut une grosse tache, elle ne semblait pas être à sa place habituelle, et ses rayons avaient l'air d'une substance solide dans la brume. Nous en faisions la remarque, en nous étonnant que ce brouillard se fût élevé avec le changement de vent qui s'était opéré, quand nous nous trouvâmes en face d'un homme qui se dandinait du côté opposé à la maison du gardien de la barrière.

      «Tiens! nous écriâmes-nous en nous arrêtant, Orlick ici!

      – Ah! répondit-il en se balançant toujours, je m'étais arrêté un instant dans l'espoir qu'il passerait de la compagnie.

      – Vous êtes en retard?» dis-je.

      Orlick répondit naturellement:

      «Et vous, vous n'êtes pas en avance.

      – Nous avons, dit M. Wopsle, exalté par sa récente représentation, nous avons passé une soirée littéraire très agréable, M. Orlick.»

      Orlick grogna comme un homme qui n'a rien à dire à cela, et nous continuâmes la route tous ensemble. Je lui demandai s'il avait passé tout son congé en ville.

      «Oui, répondit-il, tout entier. Je suis arrivé un peu après vous, je ne vous ai pas vu, mais vous ne deviez pas être loin. Tiens! voilà qu'on tire encore le canon.

      – Aux pontons? dis-je.

      – Il y a des oiseaux qui ont quitté leur cage, les canons tirent depuis la brune; vous allez les entendre tout à l'heure.»

      En effet, nous n'avions fait que quelques pas quand le boum! bien connu se fit entendre, affaibli par le brouillard, et il roula pesamment le long des bas côtés de la rivière, comme s'il eût poursuivi et atteint les fugitifs.

      «Une fameuse nuit pour se donner de l'air! dit Orlick. Il faudrait être bien malin pour attraper ces oiseaux-là cette nuit.»

      Cette réflexion me donnait à penser, je le fis en silence. M. Wopsle, comme l'oncle infortuné de la tragédie, se mit à penser tout haut dans son jardin de Camberwell. Orlick, les deux mains dans ses poches, se dandinait lourdement à mes côtés. Il faisait très sombre, très mouillé et très crotté, de sorte que nous nous éclaboussions en marchant. De temps en temps le bruit du canon nous arrivait et retentissait sourdement le long de la rivière. Je restais plongé dans mes pensées. Orlick murmurait de temps en temps:

      «Battez!.. battez!.. vieux Clem!»

      Je pensais qu'il avait bu; mais il n'était pas ivre.

      Nous atteignîmes ainsi le village. Le chemin que nous suivions nous faisait passer devant les Trois jolis bateliers; l'auberge, à notre grande surprise (il était onze heures), était en grande agitation et la porte toute grande ouverte. M. Wopsle entra pour demander ce qu'il y avait, soupçonnant qu'un forçat avait été arrêté; mais il en revint tout effaré en courant:

      «Il y a quelque chose qui va mal, dit-il sans s'arrêter. СКАЧАТЬ



<p>3</p>

George Barnwell, tragédie bourgeoise de George Lillo, joaillier et auteur dramatique anglais, né à Londres en 1693 et mort en 1739. Fielding était un de ses amis intimes. Lillo est le créateur de la tragédie bourgeoise, genre dans lequel il a précédé Diderot. George Barnwell ou L'apprenti de Londres, qui fut représenté pour la première fois en 1731, est un drame remarquable; il a été traduit en français par Clément de Genève, en 1748, et imité par Saurin, membre de l'Académie française.