Han d'Islande. Victor Hugo
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Название: Han d'Islande

Автор: Victor Hugo

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ d'une main de justice liés en croix complétaient l'ensemble de ces bizarres ornements.– Le vieillard était Schumacker.

      – Non, seigneur, répondit l'huissier; puis il dit à l'étranger: Voici le prisonnier; et, les laissant ensemble, il referma la porte, avant d'avoir pu entendre la voix aigre du vieillard, qui disait: Si ce n'est pas le capitaine, je ne veux voir personne.

      L'étranger, à ces mots, resta debout près de la porte; et le prisonnier, se croyant seul,– car il ne s'était pas un moment détourné,– retomba dans sa silencieuse rêverie.

      Tout à coup il s'écria:– Le capitaine m'a certainement abandonné et trahi! Les hommes.... les hommes sont comme ce glaçon qu'un Arabe prit pour un diamant; il le serra précieusement dans son havre-sac, et quand il le chercha, il ne trouva même plus un peu d'eau.

      – Je ne suis pas de ces hommes, dit l'étranger.

      Schumacker se leva brusquement.– Qui est ici? qui m'écoute? Est-ce quelque misérable suppôt de ce Guldenlew?

      – Ne parlez point mal du vice-roi, seigneur comte.

      – Seigneur comte! est-ce pour me flatter que vous m'appelez ainsi? Vous perdez vos peines; je ne suis plus puissant.

      – Celui qui vous parle ne vous a jamais connu puissant, et n'en est pas moins votre ami.

      – C'est qu'il espère encore quelque chose de moi; les souvenirs que l'on conserve aux malheureux se mesurent toujours aux espérances qui en restent.

      – C'est moi qui devrais me plaindre, noble comte; car je me suis souvenu de vous, et vous m'avez oublié. Je suis Ordener.

      Un éclair de joie passa dans les tristes yeux du vieillard, et un sourire qu'il ne put réprimer entr'ouvrit sa barbe blanche, comme le rayon qui perce un nuage.

      – Ordener! soyez le bienvenu, voyageur Ordener. Mille voeux de bonheur au voyageur qui se souvient du prisonnier!

      – Mais, demanda Ordener, vous, m'aviez donc oublié?

      – Je vous avais oublié, dit Schumacker reprenant son air sombre, comme on oublie la brise qui nous rafraîchit et qui passe; heureux lorsqu'elle ne devient pas l'ouragan qui nous renverse.

      – Comte de Griffenfeld, reprit le jeune homme, vous ne comptiez donc pas sur mon retour?

      – Le vieux Schumacker n'y comptait pas; mais il y a ici une jeune fille qui me faisait remarquer aujourd'hui même qu'il y avait eu, le 8 mai dernier, un an que vous étiez absent.

      Ordener tressaillit.

      – Quoi, grand Dieu! serait-ce votre Éthel, noble comte?

      – Et qui donc?

      – Votre fille, seigneur, a daigné compter les mois depuis mon départ! Oh! combien j'ai passé de tristes journées! j'ai visité toute la Norvège, depuis Christiania jusqu'à Wardhus; mais c'est vers Drontheim que mes courses me ramenaient toujours.

      – Usez de votre liberté, jeune homme, tant que vous en jouissez.– Mais dites-moi donc enfin qui vous êtes. Je voudrais, Ordener, vous connaître sous un autre nom. Le fils d'un de mes mortels ennemis s'appelle Ordener.

      – Peut-être, seigneur comte, ce mortel ennemi a-t-il plus de bienveillance pour vous que vous n'en avez pour lui.

      – Vous éludez ma question; mais gardez votre secret, j'apprendrais peut-être que le fruit qui désaltère est un poison qui me tuera.

      – Comte! dit Ordener d'une voix irritée. Comte! reprit-il d'un ton de reproche et de pitié.

      – Suis-je contraint de me fier à vous, répondit Schumacker, à vous qui prenez toujours en ma présence le parti de l'implacable Guldenlew?

      – Le vice-roi, interrompit gravement le jeune homme, vient d'ordonner que vous seriez à l'avenir libre et sans gardes dans l'intérieur de tout le donjon du Lion de Slesvig. C'est une nouvelle que j'ai recueillie à Berghen, et que vous recevrez sans doute prochainement.

      – C'est une faveur que je n'osais espérer, et je croyais n'avoir parlé de mon désir qu'à vous seul. Au surplus, on diminue le poids de mes fers à mesure que celui de mes années s'accroît, et, quand les infirmités m'auront rendu impotent, on me dira sans doute: Vous êtes libre. À ces mots le vieillard sourit amèrement; il continua:

      – Et vous, jeune homme, avez-vous toujours vos folles idées d'indépendance?

      – Si je n'avais point ces folles idées, je ne serais pas ici.

      – Comment êtes-vous venu à Drontheim?

      – Eh bien! à cheval.

      – Comment êtes-vous venu à Munckholm?

      – Sur une barque.

      – Pauvre insensé! qui crois être libre, et qui passes d'un cheval dans une barque. Ce ne sont point tes membres qui exécutent tes volontés; c'est un animal, c'est la matière; et tu appelles cela des volontés!

      – Je force des êtres à m'obéir.

      – Prendre sur certains êtres le droit d'en être obéi, c'est donner à d'autres celui de vous commander. L'indépendance n'est que dans l'isolement.

      – Vous n'aimez pas les hommes, noble comte?

      Le vieillard se mit à rire tristement.– Je pleure d'être homme, et je ris de celui qui me console.– Vous le saurez, si vous l'ignorez encore, le malheur rend défiant comme la prospérité rend ingrat. Écoutez, puisque vous venez de Berghen, apprenez-moi quel vent favorable a soufflé sur le capitaine Dispolsen. Il faut qu'il lui soit arrivé quelque chose d'heureux, puisqu'il m'oublie.

      Ordener devint sombre et embarrassé.

      – Dispolsen, seigneur comte? C'est pour vous en parler que je suis venu dès aujourd'hui.– Je sais qu'il avait toute votre confiance.

      – Vous le savez? interrompit le prisonnier avec inquiétude. Vous vous trompez. Nul être au monde n'a ma confiance.– Dispolsen tient, il est vrai, entre ses mains mes papiers, des papiers même très importants. C'est pour moi qu'il est allé à Copenhague, près du roi. J'avouerai même que je comptais plus sur lui que sur tout autre, car dans ma puissance je ne lui avais jamais rendu service.

      – Eh bien! noble comte, je l'ai vu aujourd'hui....

      – Votre trouble me dit le reste; il est traître.

      – Il est mort.

      – Mort!

      Le prisonnier croisa ses bras et baissa la tête, puis relevant son oeil vers le jeune homme:

      – Quand je vous disais qu'il lui était arrivé quelque chose d'heureux!

      Puis son regard se tourna vers la muraille où étaient suspendus les signes de ses grandeurs détruites, et il fit un geste de la main comme pour éloigner le témoin d'une douleur qu'il s'efforçait de vaincre.

      – Ce n'est pas lui que je plains; ce n'est qu'un homme de moins.– Ce n'est pas moi; qu'ai-je à perdre? Mais ma fille, ma fille infortunée! СКАЧАТЬ