Double-Blanc. Fortuné du Boisgobey
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Название: Double-Blanc

Автор: Fortuné du Boisgobey

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ nouvelles de ta malade… et quand tu voudras rentrer au pays… avec ou sans elle… je te reprendrai à Lanriec.

      – La ferme n’est donc pas vendue?

      – Comment sais-tu qu’elle était à vendre?

      – Dame! quand j’en suis parti, on disait qu’un richard de Paris allait tout acheter… les terres, la forêt, le château…

      – Il en a été question, interrompit Hervé, mais j’espère les conserver. C’est pourquoi, mon gars, si tu n’as pas menti et si tu te conduis bien, tu pourras finir tes jours à mon service.

      Alain allait remercier son maître, lorsqu’une grosse rumeur monta d’en bas jusqu’à la buvette. Des gens se bousculaient dans l’escalier en criant: «Au voleur! arrêtez-le!»

      Hervé se leva, s’avança et se heurta contre un homme qui faillit le renverser en s’accrochant à lui.

      Le contact fut court, mais il fut complet, car cet homme prit Hervé à bras le corps, par-dessous son habit noir, et le tint un instant serré contre sa poitrine; après quoi, il se remit à courir pour grimper aux quatrièmes loges. Ceux qui le poursuivaient passèrent comme une meute aux trousses d’un cerf. Ils le chassaient à vue et ils ne pouvaient pas manquer de le prendre au dernier étage, à moins qu’il ne trouvât le moyen de fuir par les toits.

      Le seigneur de Scaër ne fut point tenté de courir après un filou qui ne lui avait rien volé, et il se retourna pour chercher Alain Kernoul.

      Le gars aux biques n’était plus là.

      Hervé ne s’inquiéta pas de la disparition de son compatriote. Hervé avait dit à ce Breton fourvoyé tout ce qu’il avait à lui dire. Il s’était intéressé aux singulières aventures et à la triste situation d’Alain Kernoul; il ne demandait pas mieux que de lui venir en aide, mais il en avait assez fait pour cette fois et il ne lui restait plus qu’à attendre la visite que le gars aux biques ne manquerait pas de lui faire à l’hôtel du Rhin.

      Il regrettait même d’avoir perdu à l’interroger une demi-heure qu’il aurait pu mieux employer, car il était sorti de la loge pour tâcher de rejoindre la blonde inconnue et elle avait eu tout le temps de quitter le bal de l’Opéra pendant qu’il bavardait à la buvette.

      Il ne faut pas courir deux lièvres à la fois, dit un proverbe fort sage, qui s’appliquait parfaitement à la situation.

      Hervé n’espérait plus rattraper la femme qu’il cherchait. Il se consola en se rappelant qu’elle lui avait remis une lettre où il trouverait probablement son adresse et l’explication de ses allures mystérieuses. Mais le lieu eût été mal choisi pour l’ouvrir et il se décida à ne la décacheter qu’au moment où, rentré chez lui, il pourrait la lire sans craindre d’être dérangé par une nouvelle bagarre.

      Le souper au Grand-Quinze ne le tentait pas du tout. Il était entré au bal, parce qu’il avait rencontré sur le boulevard Ernest Pibrac qui l’avait entraîné, et il ne tenait pas à enterrer sa vie de garçon dans un cabinet de restaurant.

      Après avoir rajustée sa cravate, son gilet et son habit que le fuyard, en l’étreignant, avait fortement fripés, il s’empressa de regagner le corridor des premières.

      Il n’y rencontra ni Alain, ni le double-blanc, comme disait Pibrac; mais il n’eut qu’à écouter pour apprendre que la cause de la bousculade était un vulgaire filou surpris en flagrant délit de vol à la tire par un monsieur qui sans doute s’était vite consolé de la perte de son portefeuille, car au lieu de poursuivre le voleur, qu’il avait laissé échapper, il s’était prestement éclipsé.

      Hervé ne s’attarda point à entendre les commentaires qu’on faisait entendre autour de lui sur cet incident. Il avait hâte de partir et il s’en alla réclamer son pardessus qu’il avait confié à l’ouvreuse de la loge où ses compagnons étaient restés. Il arriva juste au moment où ils en sortaient pour mener à la Maison d’Or un lot de soupeuses recrutées au hasard, et il eut toutes les peines du monde à se défendre d’être de la fête. Il lui fallut même, bon gré mal gré, les accompagner pendant le court trajet de la rue Le Peletier à la rue Laffitte.

      C’était si près que toute la bande fit le voyage à pied par le boulevard.

      Pibrac s’était accroché au bras d’Hervé et s’évertuait à lui démontrer qu’il ne pouvait pas décemment lâcher des camarades.

      – Mon cher, lui disait-il, je comprends que tu ne t’affiches plus avec des demoiselles. C’était bon quand tu achevais de manger ta fortune, et depuis ta promotion au grade de fiancé, tu es obligé de te gouverner autrement, je le reconnais. Mais en soupant avec nous, tu te compromettras moins qu’en te montrant sur le devant de notre loge, comme tu viens de le faire. Et d’ailleurs, puisque tu as mis un pied dans le crime, tu peux bien y mettre les deux.

      – D’accord, répondait distraitement Hervé, mais je préfère aller me coucher. Je ne me sens pas en train.

      – Dis donc plutôt que tu es amoureux de ta promise. Ce n’est pas moi qui te le reprocherai. On l’épouserait rien que pour ses beaux yeux et elle a un million de dot, sans compter les espérances… et pour comble de bonheur, tu n’auras pas de belle-mère! Bernage est veuf. En voilà un qui ne gênera pas son gendre!… Il ne pense qu’à ses affaires… et elles lui réussissent… Il a encore gagné trois cent milles francs à la dernière liquidation. Tu sais ça… mais tu ne te doutes pas qu’il est venu cette nuit au bal de l’Opéra.

      – Allons donc!

      – Parfaitement, mon petit. Je l’ai rencontré dans les couloirs. Il avait mis un faux-nez, mais je l’ai reconnu tout de même, et je lui ai fait la farce de crier son nom, derrière lui. Il s’est retourné, je me suis dérobé et je crois qu’il a décampé immédiatement. Je me demande pourquoi il tenait tant à garder l’incognito.

      – Je me le demande aussi, dit entre ses dents Hervé, tout étonné d’apprendre que son futur beau-père fêtait le carnaval dans la salle de la rue Le Peletier.

      Ce financier aurait pu sans inconvénient y louer une loge et s’y montrer en compagnie d’hommes aussi sérieux que lui, mais rôder par les corridors, affublé d’un faux-nez, c’était à n’y pas croire, et Hervé pensa que son facétieux ami inventait cette histoire pour le taquiner.

      Peu lui importait d’ailleurs qu’elle fût vraie et que M. Bernage l’eût aperçu, car il ne comptait pas se cacher d’être allé au bal masqué. Il se proposait même de raconter cette escapade à Mlle Solange de Bernage, sa fiancée, qui était trop intelligente et surtout trop Parisienne pour la lui reprocher.

      Il en serait quitte pour ne pas lui parler de la blonde.

      – Je ne me charge pas de résoudre ce problème, reprit Pibrac; et puisque décidément tu ne veux pas être des nôtres, nous souperons sans toi. Bonne nuit, mon cher! Tâche de ne pas rêver que tu joues aux dominos et que tu poses le double-blanc.

      Cette allusion à la femme disparue coupa court à la causerie, car, pour éviter les questions qu’il prévoyait et auxquelles il ne se souciait pas de répondre, Hervé fila au pas accéléré, plantant là ses amis et leurs donzelles.

      Il faisait un froid sec et, par ce temps clair, c’était un plaisir de marcher jusqu’à la place Vendôme. Le seigneur de Scaër n’eut garde de manquer une si belle occasion de dégourdir ses jambes, СКАЧАТЬ