Monsieur Lecoq. Emile Gaboriau
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Название: Monsieur Lecoq

Автор: Emile Gaboriau

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ jeté votre arme, en criant : Venez me prendre, quelles étaient vos intentions ?…

      – Je comptais fuir….

      – Par où ?…

      – Dame !… monsieur, par la porte, par…

      – Oui, par la porte de derrière, fit le juge avec une ironie glaciale. Reste à expliquer comment vous, qui entriez dans ce cabaret pour la première fois, vous aviez connaissance de cette issue.

      Pour la première fois, l’œil du prévenu se troubla, son assurance disparut, mais ce ne fut qu’un éclair, et il éclata de rire, mais d’un rire faux, voilant mal son angoisse.

      – Quelle farce !… répondit-il, je venais de voir les deux femmes filer par là…

      – Pardon !… vous venez de déclarer que vous ne vous êtes pas aperçu du départ des femmes, que vous aviez trop d’ouvrage pour surveiller leurs mouvements.

      – Ai-je dit cela ?…

      – Mot pour mot ; on va vous donner lecture du passage. Goguet … lisez.

      Le greffier lut, mais alors l’homme entreprit de contester la signification de ses expressions… Il n’avait pas dit, prétendait-il, certainement il n’avait pas voulu dire… on l’avait mal compris….

      Lecoq était aux anges.

      – Toi, mon bonhomme, pensait-il, tu discutes, tu patauges, tu es perdu…

      La réflexion était d’autant plus juste, que la situation d’un prévenu devant le magistrat instructeur peut être comparée à celle d’un homme qui, ne sachant pas nager, s’est avancé dans la mer jusqu’à avoir de l’eau au ras de la bouche. Tant qu’il garde son équilibre tout va bien. Chancèle-t-il ?… Aussitôt il perd plante. S’il se débat et barbotte, c’en est fait ; il avale une gorgée, la vague prochaine le roule ; il veut crier, il boit…, il est noyé.

      – Assez, dit le juge, dont les questions allaient se multiplier et porter sur tous les points, assez. Comment, sortant avec l’intention de vous amuser, aviez-vous dans une de vos poches le revolver que voici.

      – Je l’avais sur moi pour la route, je n’ai pas plus songé à le déposer à l’hôtel qu’à changer de vêtements.

      – Où l’avez-vous acheté ?

      – Il m’a été donné par M. Simpson, c’est un souvenir.

      – Convenez, remarqua froidement le juge, que ce M. Simpson est un personnage commode. Enfin, continuons : Deux coups seulement de cette arme redoutable ont été déchargés et trois hommes sont morts. Vous ne m’avez pas dit la fin de la scène.

      – Hélas !… fit l’homme d’un ton ému, à quoi bon !… Deux de mes ennemis renversés, la partie devenait égale. J’ai donc saisi le dernier, le soldat, à bras le corps, et je l’ai poussé … Il est tombé sur le coin d’une table et ne s’est plus relevé.

      M. Segmuller avait déplié sur son bureau le plan du cabaret dessiné par Lecoq.

      – Approchez, dit-il au prévenu, et précisez sur ce papier votre position et celle de vos adversaires.

      L’homme obéit, et avec une sûreté un peu bien surprenante chez un homme de sa condition apparente, il expliqua le drame.

      – Je suis entré, disait-il, par cette porte marquée C, je me suis assis à la table H, qui est à gauche en entrant ; les autres occupaient cette table qui est entre la cheminée F et la fenêtre B.

      Lorsqu’il eut achevé :

      – Je dois, dit le juge, rendre à la vérité cet hommage que vos déclarations s’accordent parfaitement avec les constatations des médecins, lesquels ont reconnu qu’un des coups avait été tiré à bout portant et l’autre de la distance de deux mètres environ.

      Un prévenu vulgaire eût triomphé. L’homme, au contraire, eut un imperceptible haussement d’épaules.

      – Cela prouve, murmura-t-il, que ces médecins savent leur métier.

      Lecoq était content.

      Juge, il n’eût pas mené autrement l’interrogatoire.

      Il bénissait le ciel, qui lui avait donné M. Segmuller au lieu et place de M. d’Escorval.

      – Ceci réglé, reprit le juge, il vous reste, prévenu, à m’apprendre le sens d’une phrase prononcée par vous, quand l’agent que voici vous a renversé.

      – Une phrase ?…

      – Oui !… vous avez dit : « C’est les Prussiens qui arrivent, je suis perdu ! » Qu’est-ce que cela signifiait ?

      Une fugitive rougeur colora les pommettes du meurtrier. Il devint clair qu’il avait prévu toutes les autres questions et que celle-ci le prenait au dépourvu.

      – C’est bien étonnant, fit-il avec un embarras mal déguisé, que j’aie dit cela !…

      Évidemment il gagnait du temps, il cherchait une explication.

      – Cinq personnes vous ont entendu, insista le juge.

      – Après tout, reprit l’homme, la chose est possible. C’est une phrase qu’avait coutume de répéter un vieux de la garde de Napoléon, qui, après la bataille de Waterloo, était entré au service de M. Simpson…

      L’explication, pour être tardive, n’en était pas moins ingénieuse. Aussi M. Segmuller parut-il s’en contenter.

      – Cela peut être, dit-il ; mais il est une circonstance qui passe ma compréhension. Étiez-vous débarrassé de vos adversaires avant l’entrée de la ronde de police ?… Répondez oui ou non.

      – Oui.

      – Alors, comment, au lieu de vous échapper par l’issue dont vous deviniez l’existence, êtes-vous resté debout sur le seuil de la porte de communication, avec une table devant vous en guise de barricade, votre arme dirigée vers les agents, pour les tenir en échec ?

      L’homme baissa la tête, et sa réponse se fit attendre.

      – J’étais comme fou, balbutia-t-il, je ne savais si c’étaient des agents de police qui arrivaient ou des amis de ceux que j’avais tués.

      – Votre intérêt vous commandait de fuir les uns comme les autres.

      Le meurtrier se tut.

      – Eh bien !… reprit M. Segmuller, la prévention suppose que vous vous êtes sciemment et volontairement exposé à être arrêté, pour protéger la retraite des deux femmes qui se trouvaient dans ce cabaret.

      – Je me serais donc risqué pour deux coquines que je ne connaissais pas ?…

      – Pardon !… La prévention a de fortes raisons de croire que vous les connaissez au contraire très bien, ces deux femmes.

      – Ça, par exemple !… si on me le prouve !…

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