Mémoires du comte Reynier: Campagne d'Égypte. Berthier Louis-Alexandre
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СКАЧАТЬ ville est trop étendue, et contenait une population trop considérable, pour qu'on pût penser à la fortifier et à la défendre; on occupa seulement les points qui la dominaient. On tira le parti le plus ingénieux de l'ancien château; et du chaos de ces vieilles constructions, s'éleva une citadelle susceptible d'être défendue par un petit nombre de troupes, dont l'artillerie et la position commandaient la ville du Caire, et imposaient aux habitans. D'autres petits forts furent construits autour de la ville, vers les quartiers éloignés de la citadelle, pour défendre, avec de faibles garnisons, quelques établissemens.

      Il fallait aussi, au centre des opérations militaires, un dépôt nécessaire à l'armée, et des ateliers particulièrement pour l'artillerie; ces établissemens devaient être sur les bords du Nil pour la facilité des transports. Gizëh fut désigné; et, pour le fortifier, on profita d'une enceinte que Mourâd-Bey avait fait construire.

      Après avoir déterminé le centre des opérations de l'armée, et les moyens de conserver ce point important pour la possession de l'Égypte, il fallut s'occuper de la défense d'un autre point plus intéressant pour l'armée française, du port de mer qui contenait sa marine, presque tous les magasins, et par lequel elle pouvait recevoir des secours.

      L'influence militaire d'Alexandrie, comme place de guerre, est à peu près nulle. Cette ville, isolée par un désert, est presque regardée comme étrangère par les habitans: on peut posséder toutes les terres cultivées sans avoir besoin de cette ville, tandis qu'elle ne pourrait que difficilement exister sans l'eau du Nil et les vivres de l'Égypte; mais, comme port de mer excellent, et le seul qui existe sur la côte, Alexandrie en est vraiment la clef. Aucune opération maritime ne peut être bien consolidée sans sa possession; c'est là que se fait le principal commerce, parce que les boghaz de Rosette et de Damiette ne peuvent être franchis que par de petits bâtimens.

      C'est près d'Alexandrie qu'est la rade d'Aboukir, dangereuse seulement lors des vents du nord et de nord-est: c'est aussi au fond de cette rade qu'est le point de la côte le plus favorable pour débarquer.

      Toutes ces raisons déterminèrent à fortifier Alexandrie, et à augmenter d'autant plus les défenses de cette place, qu'elle était la seule exposée à l'attaque des troupes européennes. Mais ces fortifications exigeaient beaucoup de temps, de main-d'œuvre et des travaux considérables. L'armée ne pouvait, sans s'affaiblir, y laisser une forte garnison, et cependant la défense de la ville et du port embrassait un développement immense; tout le terrain environnant était couvert d'anciennes constructions et de montagnes de décombres. On tira parti d'une portion de l'enceinte construite par les anciens Arabes, du Phare, etc., pour former une ligne de défense qu'on fit flanquer par des redoutes tracées sur des montagnes de décombres très dominantes, et que dans la suite on convertit en forts revêtus. Ces travaux, poussés avec autant de rapidité que le peu de moyens disponibles le permettaient, eurent bientôt une apparence extérieure assez formidable, mais en effet, furent toujours très faibles.

      Une vieille mosquée, bâtie sur l'île ou rocher du Marabou, fut convertie en fort; elle servit à défendre l'anse où l'armée avait opéré son débarquement, et la passe occidentale du port vieux d'Alexandrie.

      Le vieux château d'Aboukir fut réparé et armé; il servit de batterie de côte; achevé, il aurait formé un réduit capable de résister jusqu'à l'arrivée de l'armée, si l'ennemi avait débarqué dans le fond de la rade.

      Les autres points importans de la côte étaient les deux bouches du Nil: on s'occupa de leur défense. Les villes de Rosette et de Damiette étaient trop grandes et trop peuplées pour être converties en postes militaires; elles étaient trop éloignées de l'embouchure pour en défendre l'entrée, et les bâtimens de guerre postés en dedans du boghaz ne pouvaient le défendre efficacement, s'ils n'étaient protégés par des feux de terre. Un ancien château, situé à une demi-lieue au-dessous de Rosette, fut réparé et armé; on le nomma le fort Julien. Au-dessous de Damiette, dans l'endroit le plus resserré de la langue de terre qui sépare le Nil du lac Menzalëh, sur l'emplacement du village de Lesbëh, on construisit un fort. Ce fort, appelé Lesbëh, commandait le Nil, et aurait arrêté l'ennemi si, après avoir débarqué sur la plage à l'est de l'embouchure, il avait voulu marcher sur Damiette. Il était cependant trop éloigné du boghaz pour protéger les bâtimens chargés d'en défendre l'entrée: deux tours anciennement construites sur les deux rives, furent réparées et armées.

      Il restait encore quelques points de la côte qu'il était nécessaire d'occuper, tels que les bouches de Bourlos, Dibëh et Omm-Faredje; mais on ne put y travailler que dans les derniers temps. On y construisit des tours couvertes d'un glacis, et armées de quelques pièces d'artillerie; elles furent en outre défendues par des bâtimens armés.

      Un poste intermédiaire entre le fort Julien et Aboukir était utile pour protéger la communication avec Alexandrie, et augmenter la surveillance sur la côte la plus menacée; pour cet effet, un ancien kervan-serai, nommé la Maison carrée, fut converti en poste militaire; ce poste défendit aussi la bouche du lac d'Edko, qui s'est ouverte près de là.

      Il était nécessaire d'avoir, pour les opérations de l'armée sur la côte, un centre d'action, un dépôt de vivres et de munitions. On choisit pour cet effet, près de Rahmaniëh, l'endroit où le canal d'Alexandrie sort du Nil; on y construisit une redoute, et des magasins y furent formés. Si le Caire était le centre des opérations pour toute l'Égypte, Rahmaniëh pouvait l'être pour les côtes; un corps de réserve se serait porté rapidement de là sur le point menacé entre Bourlos et Alexandrie. S'il était nécessaire de réunir toute l'armée, les corps pouvaient s'y rendre des différentes parties de l'Égypte, et de là marcher ensemble aux ennemis. De Rahmaniëh, il faut trois jours pour aller à Damiette, en traversant le Delta; quatre jours suffisent pour aller par le Delta de Rahmaniëh à Salêhiëh, sur la frontière de Syrie. Des routes, des ponts et des digues, construits dans cette direction, auraient pu rendre cette communication praticable pendant toute l'année.

      Sur la frontière de Syrie, Belbéis et Salêhiëh furent choisis pour postes extrêmes: on voulut d'abord en faire de grandes places, mais les difficultés qu'on éprouvait à conduire des travaux considérables avec peu d'outils et d'ouvriers y firent renoncer. On en forma des postes de dépôts; et Salêhiëh, qui se trouvait sur la lisière des terres cultivées, vers le désert, dut être le plus considérable.

      La campagne de Syrie développa les projets sur la défense de cette frontière; on pensa que le meilleur système était d'occuper, dans le désert, les principales stations. L'ancien château d'El-A'rych, placé presqu'à l'extrémité du désert vers la Syrie, fut choisi pour être occupé et fortifié; on construisit à Catiëh un poste intermédiaire.

      Le vallon d'El-A'rych est tellement placé qu'une armée qui veut marcher de Syrie en Égypte doit nécessairement s'y arrêter, afin de réunir les moyens indispensables pour passer le désert. Une place construite à El-A'rych aurait bien certainement couvert l'Égypte, aurait même donné une attitude menaçante, si elle avait été placée de manière à commander tous les puits; si on avait pu y entretenir une garnison suffisante pour s'opposer à tout établissement dans le vallon; si les ouvrages avaient pu être assez promptement perfectionnés pour résister jusqu'à l'arrivée des secours; si elle avait pu être assez bien approvisionnée non seulement pour soutenir un long blocus, mais pour fournir aux besoins de l'armée qui serait venue la secourir, et poursuivre les ennemis en Syrie. Mais tout cela n'était pas; les constructions étaient fort lentes au milieu d'un désert où tout manquait; la mer n'étant pas libre, les vivres portés à dos de chameau suffisaient à peine pour une garnison très faible; l'ennemi pouvait s'établir dans le vallon d'El-A'rych, y trouver de l'eau pour son armée et en faire le siége, ou contenir avec peu de troupes sa faible garnison, tandis qu'il agirait en Égypte. Les travaux commencés n'étaient pas terminés, et ce poste était peu fortifié СКАЧАТЬ