Cités et ruines américaines: Mitla, Palenqué, Izamal, Chichen-Itza, Uxmal. Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
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СКАЧАТЬ les Mèdes, en Égypte, en Grèce, en Italie, dans le nord de la Gaule, en Bretagne, en Germanie et en Scandinavie. Or, au Mexique, le cheval n'est représenté nulle part sur les monuments. Les bas-reliefs si curieux de Chichen-Itza nous montrent les guerriers combattant à pied des serpents et des tigres. Nous ne trouvons sur ces monuments figurés, pas plus que dans les textes, la trace de pasteurs. Dans le Popol-Vuh, l'animal domestique n'existe pas, les habitudes des pasteurs ne laissent aucune trace; le principe de la famille, si puissant chez tous les peuples aryans ou issus d'aryans, le patriarcat est confus; toutefois la caste existe, ainsi que la noblesse du sang.

      Si, dans la Floride, les Espagnols ont vu des troupeaux de bestiaux domestiques, il ne paraît pas que les Mexicains en aient jamais possédés; or l'aryan est pasteur. On ne conçoit guère même comment des édifices aussi considérables que ceux du Mexique ont pu être construits sans le concours de bêtes de somme. Quant à ce dernier point, n'oublions pas que, dans l'empire de Montézuma, des hommes, considérés comme appartenant à une race inférieure, étaient soumis aux travaux imposés aux brutes, et que l'idée de la supériorité de caste est tellement évidente dans le Popol-Vuh, par exemple, que le peuple, c'est-à-dire la masse étrangère aux tribus quichées, n'est jamais désigné que sous des noms d'animaux; ce sont les fourmis, les rats, les singes, les oiseaux, les tortues, les abeilles, etc. À chaque instant, dans ce livre, ces bêtes sont chargées, par les nobles quichés, de messages, d'entreprises; c'est avec leur aide que les Xibalbaïdes sont détruits, et ce sont même les animaux alliés qui sont chargés d'assurer les suites de la conquête.

      N'y a-t-il pas là un signe évident de la race blanche au milieu de populations regardées par elle comme très-inférieures? Quant aux chevaux, si les tribus blanches qui ont envahi le Mexique ne sont arrivées du nord, comme tout porte à le croire, qu'après une suite d'étapes prolongées peut-être pendant plusieurs siècles, et après un ou plusieurs voyages à travers l'Océan, il ne serait pas surprenant, qu'arrivés sous le 20e degré de latitude, ils n'eussent plus possédé un seul cheval, qu'ils eussent perdu même le souvenir de ces compagnons de leurs expéditions. D'ailleurs, il paraît évident que ces émigrations blanches étaient, relativement à ce qu'elles furent en Asie et en Europe, peu nombreuses. Leur disparition presque totale et le peu de fixité de leurs établissements en Amérique en serait une preuve.

      Doit-on conclure de l'état sauvage actuel d'une grande partie des populations de l'Amérique que ces peuples ne sont pas encore civilisés ou qu'ils nous laissent voir les restes de civilisations depuis longtemps étouffées? Cette dernière hypothèse est adoptée par Guillaume de Humboldt, et elle paraît très-voisine de la vérité, si l'on considère qu'à l'époque de la conquête des Espagnols, Fernand Cortez trouva en Amérique des États policés là où l'on ne rencontre plus que des populations misérables, clair-semées au milieu des déserts, et que ces États avaient atteint déjà l'ère de leur décadence.

      Mais telle est la puissance de la race blanche que, si faible qu'elle soit numériquement parlant, elle laisse des traces indélébiles, et que seule elle possède ce privilège d'inaugurer les civilisations. En l'état de mélange où se rencontrent les grandes races humaines sur la surface du globe aujourd'hui, il est assez difficile de distinguer les aptitudes premières de chacune d'elles; cependant, là où le noir est sans mélange, il n'existe pas, à proprement parler, une civilisation; il n'y a ni progrès ni décadence: c'est un état normal barbare où la force matérielle et la ruse gouvernent seules; là où la race touranienne ou finnique est restée pure, si les mœurs sont moins grossières, si l'on trouve une apparence d'autorité morale, il n'y a point cependant de progrès et de variations sensibles dans l'état social. L'industrie, le commerce se développent jusqu'à un certain point; le bien-être matériel et la discipline peuvent régner, mais jamais l'amour du beau, le dévouement raisonné, l'attrait de la gloire ne remuent ces populations paisibles, attachées à la satisfaction des besoins matériels de chaque jour. L'élément blanc seul donne la vie à ces masses inertes et obscures; il apporte sa cosmogonie, l'observation des temps, sa passion pour la renommée, son besoin incessant d'activité; il veut vivre dans l'avenir et écrit l'histoire. Les traditions ou souvenirs écrits de ce monde datent de l'invasion de l'élément aryan; or, les Mexicains avaient une histoire, tous les auteurs espagnols l'ont reconnu, et Las Casas[50], entre autres, le dit de la manière la plus formelle.

      «Dans les républiques de ces contrées, dans les royaumes de la Nouvelle-Espagne et ailleurs, entre autres professions et gens qui en avaient la charge étaient ceux qui faisaient les fonctions de chroniqueurs ou d'historiens. Ils avaient la connaissance des origines et de toutes les choses touchant à la religion, aux dieux et à leur culte, comme aussi des fondateurs des villes et des cités. Ils savaient comment avaient commencé les rois et les seigneurs, ainsi que leurs royaumes, leurs modes d'élection et de succession; le nombre et la qualité des princes qui avaient passé; leurs travaux, leurs actions et faits mémorables, bons et mauvais; s'ils avaient gouverné bien ou mal; quels étaient les hommes vertueux ou les héros qui avaient existé; quelles guerres ils avaient eu à soutenir et comment ils s'y étaient signalés; quelles avaient été leurs coutumes antiques et les premières populations; les changements heureux ou les désastres qu'ils avaient subis; enfin tout ce qui appartient à l'histoire, afin qu'il y eût raison et mémoire des choses passées.

      «Ces chroniqueurs tenaient le comput des jours, des mois et des années. Quoiqu'ils n'eussent point une écriture comme nous, ils avaient, toutefois, leurs figures et caractères, à l'aide desquels ils entendaient tout ce qu'ils voulaient, et de cette manière ils avaient leurs grands livres composés avec un artifice si ingénieux et si habile, que nous pourrions dire que nos lettres ne leur furent pas d'une bien grande utilité... Il ne manquait jamais de ces chroniqueurs; car, outre que c'était une profession qui passait de père en fils et fort considérée dans la république, toujours il arrivait que celui qui en était chargé instruisait deux ou trois frères ou parents de la même famille en tout ce qui concernait ces histoires; il les y exerçait continuellement durant sa vie, et c'était à lui qu'ils avaient recours lorsqu'il y avait du doute sur quelque point de l'histoire. Mais ce n'était pas seulement ces nouveaux chroniqueurs qui lui demandaient conseil, c'étaient les rois, les princes, les prêtres eux-mêmes...»

      Ces chroniqueurs, ces juges, consultés par les princes, avaient plus d'un rapport avec les mages; ce texte ne laisse à cet égard aucun doute, et il est difficile de leur chercher une autre souche que celle d'où sortaient ces personnages essentiels de la société antique de l'Asie. Les traditions mexicaines donnent aux populations de ces contrées trois origines. Elles prétendent que toutes vinrent du nord et de l'orient; les premières, les Chichimèques, étaient des sauvages vivant de chasse et n'ayant ni villes ni cultures; les secondes, les Colhuas, qui enseignèrent à cultiver la terre et donnèrent les premières notions de la vie civilisée; les dernières, venues longtemps après, furent les Nahuas, qui instituèrent un gouvernement, apportèrent une religion et un culte. Les Colhuas seraient arrivés, à travers l'Océan, de l'orient, neuf ou dix siècles avant l'ère chrétienne, et leurs descendants seraient les fondateurs de ces monuments merveilleux de Palenqué et de Mayapan. Quant aux Nahuas, descendus par le nord-est, ils se seraient, après des luttes acharnées, emparés du Mexique. Nation guerrière, important avec elle un culte farouche, mais intelligente et superbe, elle aurait imposé un joug théocratique aux habitants de ces contrées. Ces immigrations du nord-est paraissent n'avoir pas cessé jusqu'au xiie siècle de notre ère. Ces Nahuas procèdent vis-à-vis les possesseurs du pays comme le faisaient les nations belliqueuses du nord en face du vieil empire romain. Ils demandent d'abord un territoire pour établir une colonie et pour vivre; ils acceptent l'état de vassaux et de tributaires; puis, quand ils se sentent assez forts, ils attaquent la puissance suzeraine.

      L'État de Guatémala et de Chiapas, de Xibalba dans le Popol-Vuh, était le centre de la domination des Quinamés ou Colhuas[51]. Le Livre sacré représente le roi de ces contrées et ses fils comme des géants; l'un se dit l'égal du soleil et de la lune, ses enfants СКАЧАТЬ