Anie. Hector Malot
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Название: Anie

Автор: Hector Malot

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066089573

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СКАЧАТЬ Du talent, un tout petit, tout petit talent, peut-être. Et encore cela n'est pas prouvé. Ce qui l'est, c'est que je fais difficilement des choses faciles quand, pour gagner notre vie, ce serait précisément le contraire que je devrais faire. Donc il me faut un mari, et, si je peux espérer en trouver un, ne pas laisser passer l'âge où j'ai encore de la fraîcheur et de la jeunesse. Voilà pourquoi je suis pressée ; pour cela et non pour autre chose, car tu dois bien penser que je ne suis pas assez folle pour m'imaginer que ce mari va me donner une existence large, facile, mondaine, qui réalise des rêves que j'ai pu faire autrefois, mais qui maintenant sont envolés. Ce que je lui demande à ce mari, c'est d'être simplement l'appui dont je te parlais tout à l'heure, et de m'empêcher de tomber dans la misère noire dont j'ai une peur horrible, ou de rouler dans les aventures de Berthe et d'Amélie Touchard dont j'ai plus grand'peur encore. La vie que cela nous donnera sera ce qu'elle sera, et je m'en contenterai ; il m'aidera, je l'aiderai ; il travaillera, je travaillerai, et comme, revenue de mes hautes espérances, j'aurai le droit d'abandonner le grand art pour le métier, je pourrai gagner quelque argent qui sera utile dans notre ménage. Ce mari est-il introuvable ? J'imagine que non.

      — As-tu quelqu'un en vue ?

      — Dix, vingt, ceux que je connais, et surtout ceux que je ne connais pas, mais sans rien de précis, bien entendu. Juliette doit amener des amis de son frère et ceux-ci des camarades de bureau. Employés des finances, employés de la Ville, c'est en eux que j'espère ; plusieurs qui écrivent dans les journaux se feront une position plus tard ; pour le moment leurs ambitions sont modestes et dans le nombre il peut s'en rencontrer, je ne dis pas beaucoup, mais un me suffit, qui comprenne qu'une femme intelligente sans le sou est quelquefois moins chère pour un mari qu'une autre qui aurait des goûts et des besoins en rapport avec sa dot. Si je trouve celui-là, s'il ne me répugne pas trop, s'il apprécie à sa juste valeur ma robe en papier… si… si… mon mariage est fait : tu vois donc qu'avec toutes ces conditions il ne l'est pas encore.

      Tout cela avait été dit avec un enjouement voulu qui pouvait tromper un indifférent, mais non un père ; aussi l'écoutait-il ému et angoissé, sans penser à manger, ne la quittant pas des yeux, cherchant à lire en elle et à apprécier la gravité de l'état que ces paroles lui révélaient.

      Madame Barincq en descendant de sa chambre les interrompit :

      — Comment ! s'écria-t-elle en trouvant son mari attablé, tu n'as pas encore fini ! et toi, Anie, tu bavardes avec ton père au lieu de le presser de manger.

      — J'ai fini, dit il en s'emplissant la bouche.

      — Eh bien, range ton assiette, que Barnabé trouve tout en ordre, et va t'habiller, tu ne seras jamais prêt ; n'entre pas dans la chambre, ta chemise et tes vêtements sont dans le débarras.

      — Je te nouerai ta cravate, dit Anie.

      — Est-ce que tu crois que je n'ai pas le temps de fumer une pipe ? demanda-t-il en s'adressant à sa femme.

      — Il ne manquerait plus que ça.

      — Dans le jardin ?

      — Devant la colère de sa mère, Anie intervint.

      — On peut arriver d'un moment à l'autre, dit-elle.

      — Alors je vais m'habiller.

      — Il y a longtemps que cela devrait être fait, dit madame Barincq.

      A ce moment on entendit un bruit de pas lourds, écrasant le gravier du chemin, et Barnabé parut sur le seuil du hall, tenant à la main un papier bleu.

      — Une dépêche qui vient d'arriver, et que la concierge m'a remise pour vous, monsieur Barincq, dit-il.

      Mais ce fut madame Barincq qui la prit et l'ouvrit.

      — Qui nous manque de parole ? demanda Anie.

      — Ce n'est pas d'un invité, dit madame Barincq après un moment de silence.

      — Alors ?

      Au lieu de répondre à sa fille, elle se tourna vers son mari.

      — Ton frère est mort.

      Elle lui tendit la dépêche :

      — Gaston ! s'écria-t-il d'une voix qui se brisa dans sa gorge.

      Ce fut d'une main tremblante qu'il prit la dépêche.

      « Triste nouvelle à t'apprendre ; Gaston mort subitement à quatre heures d'une embolie ; funérailles fixées à après-demain, onze heures, sauf contre-ordre ; fais faire invitations en ton nom.

      RÉBÉNACQ. »

      — Mon pauvre Gaston, dit-il en se laissant tomber sur une chaise.

      Sa femme le regarda avec un étonnement mêlé de colère.

      — Tu vas pleurer ton frère, maintenant, dit-elle, un égoïste, avec qui tu es fâché depuis dix-huit ans et dont tu n'hérites pas.

      — Il n'en est pas moins mon frère ; dix-huit années de brouille n'effacent pas quarante ans d'amitié fraternelle.

      — Elle a été jolie l'amitié fraternelle, qui nous a abandonnés le jour où nous avons eu besoin d'elle !

      — Tu sais bien que Gaston était d'un caractère entier, qui ne pardonnait pas les torts qu'on avait envers lui.

      — Ni surtout ceux qu'il avait envers les autres ; ton frère a été indigne envers nous, et plus encore envers Anie qui, elle, ne lui avait rien fait ; n'aurait-il pas dû lui laisser sa fortune ?

      — Sais-tu s'il ne la lui a pas laissée ?

      — Est-ce que Rébénacq ne te le dirait pas ? notaire de ton frère, son ami, son conseil, il connaît ses affaires : s'il se tait sur elles, c'est que, de ce côté, il n'aurait que de tristes nouvelles à t'apprendre, c'est-à-dire l'existence d'un testament qui nous déshérite.

      — Il fait faire les invitations en mon nom.

      — Seraient-elles décentes au nom du bâtard de ton frère ? Si nous ne sommes pas la famille pour l'héritage, on ne peut pas nous empêcher de l'être pour les invitations, et l'on se sert de nous ; elles seraient vraiment jolies celles qui seraient faites de la part de M. Valentin Sixte, capitaine de dragons, fils naturel du défunt, et un fils naturel non reconnu encore. Si, avec ta tête toujours tournée à l'espérance et aux illusions, tu t'es imaginé que tu pouvais hériter de ton frère, parce qu'il était ton frère, tu t'es abusé une fois de plus : quand vous vous êtes fâchés, il t'a bien dit que tu n'aurais jamais rien de lui sois tranquille, il a tenu sa parole ; et le notaire Rébénacq a aux mains un bon testament qui institue le capitaine Sixte légataire universel.

      — Pourquoi Rébénacq ne le dit-il pas ?

      — Dans l'espérance de t'avoir à l'enterrement.

      — N'y serais-je pas allé quand même j'aurais eu la certitude du testament ?

      — Tu veux aller à cet enterrement ?

      — Admets-tu СКАЧАТЬ