Les mystères d'Udolphe. Анна Радклиф
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Название: Les mystères d'Udolphe

Автор: Анна Радклиф

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

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isbn: 4064066080297

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СКАЧАТЬ ses idées, et de comprendre que la cloche avait sonné matines. Cette cloche ne sonnait plus, tout était paisible, elle n'alla pas plus loin; mais hors d'état de se rendormir, et invitée d'ailleurs par l'éclat d'une lune brillante, elle ouvrit sa fenêtre et considéra le pays.

      La nuit était calme et belle, le firmament était sans nuage, et le zéphyr à peine agitait les arbres de la vallée. Elle était attentive, lorsque l'hymne nocturne des religieux s'éleva doucement de la chapelle. Cette chapelle était plus basse, et le chant sacré semblait monter au ciel à travers le silence des nuits. Les pensées se suivirent; de l'admiration des ouvrages, son âme se porta à l'adoration de leur auteur tout-puissant et bon. Pénétrée d'une dévotion pure et sans mélange d'aucun système, son âme s'élevait au-dessus de notre univers; ses yeux versaient des pleurs; elle adorait sa puissance dans ses œuvres, et sa bonté dans ses bienfaits.

      Le chant des moines fit de nouveau place au silence; mais Emilie ne quitta sa fenêtre que lorsque la lune s'étant couchée, l'obscurité sembla l'inviter au sommeil.

       Table des matières

      Saint-Aubert se trouva le lendemain assez bien rétabli pour continuer le voyage; il espérait arriver ce jour même en Roussillon, et il se mit en route dès le matin. Le théâtre que parcouraient alors les voyageurs était aussi sauvage, aussi pittoresque que les précédents; seulement de temps à autre, les scènes moins sévères déployaient une beauté plus riante.

      Quand Saint-Aubert paraissait occupé des plantes, il contemplait avec transport Emilie et Valancourt qui se promenaient ensemble; l'un avec la contenance et l'émotion du plaisir, indiquait un grand trait dans la scène qui s'offrait à eux; l'autre écoutait et regardait avec une expression de sensibilité sérieuse qui indiquait l'élévation de son esprit. Ils avaient l'air de deux amants qui n'avaient jamais quitté leurs montagnes, que leur situation avait préservés de la contagion des frivolités, dont les idées, simples et grandes comme le paysage qu'ils parcouraient, ne concevaient le bonheur que dans la tendre union des cœurs purs. Saint-Aubert souriait et soupirait en même temps, en songeant au bonheur romanesque dont son imagination lui présentait le tableau; il soupirait encore en songeant combien la nature et la simplicité étaient donc étrangères au monde, puisque leurs doux plaisirs paraissaient un roman.

      Le monde, disait-il en suivant sa pensée, le monde ridiculise une passion qu'il connaît à peine; ses mouvements, ses intérêts distrayent l'esprit, dépravent les goûts, corrompent le cœur; et l'amour ne peut exister dans un cœur quand il n'a plus la douce dignité de l'innocence. La vertu et le goût sont presque la même chose; la vertu, c'est le goût mis en action, et les plus délicates affections de deux cœurs forment ensemble le véritable amour. Comment pourrait-on chercher l'amour au sein des grandes villes? la frivolité, l'intérêt, la dissipation, la fausseté y remplacent continuellement la simplicité, la tendresse et la franchise.

      Il était près de midi, quand les voyageurs arrivèrent à un chemin si dangereux qu'il leur fallut descendre de la voiture; la route était bordée de bois, et, plutôt que de la suivre, ils se détournèrent pour chercher l'ombre. Une fraîcheur humide était répandue dans l'air; la brillante verdure du gazon, l'heureux mélange des fleurs, des baumes, des thyms, des lavandes qui l'enrichissaient, la hauteur des pins, des hêtres, des châtaigniers qui protégeaient leur existence, tout concourait à faire de ce lieu une retraite vraiment délicieuse. Quelquefois le feuillage, plus serré, interdisait la vue du paysage; ailleurs, quelques échappées mystérieuses indiquaient à l'imagination des tableaux plus charmants qu'elle n'en avait encore observés, et les voyageurs se livraient volontiers à ces jouissances presque idéales.

      Les pauses et le silence qui avaient déjà interrompu les entretiens de Valancourt et d'Emilie furent ce jour-là bien plus fréquents. Valancourt, de la plus expressive vivacité, tombait dans un accès de langueur, et la mélancolie se peignait sans dessein jusque dans son sourire. Emilie ne pouvait plus s'y méprendre: son propre cœur partageait le même sentiment.

      Quand Saint-Aubert fut rafraîchi, ils continuèrent de marcher dans le bois, croyant toujours côtoyer la route; mais ils s'aperçurent enfin qu'ils l'avaient tout à fait perdue. Ils avaient suivi la pente où la beauté des sites les retenait, et la route s'élevait entièrement sur l'escarpement au-dessus d'eux. Valancourt appela Michel, mais l'écho seul répondit à ses cris, et ses efforts furent également vains pour retrouver la route. Dans cet état, ils aperçurent la cabane d'un berger placée entre des arbres, et encore à quelque distance. Valancourt y courut pour demander quelque indication; en arrivant, il ne vit que deux enfants qui jouaient sur le gazon. Il regarda jusqu'au fond de la maison, et ne vit personne. L'aîné de ces enfants lui dit que son père était aux champs, que sa mère était dans la vallée et ne tarderait pas à revenir. Valancourt songeait à ce qu'il fallait faire, quand la voix de Michel résonna tout à coup sur les roches au-dessus et fit retentir leurs échos. Valancourt répondit aussitôt et s'efforça de l'aller joindre; après un travail pénible entre les branches et les rochers, il parvint enfin jusqu'à lui, et ce ne fut pas sans peine qu'il en obtint un peu de silence. La route était fort loin du lieu où se reposaient Saint-Aubert et Emilie. Il était difficile de ramener la voiture; il eût été trop fatigant pour Saint-Aubert de gravir tout le bois comme lui-même l'avait fait, et Valancourt était fort en peine de trouver un chemin plus praticable.

      Pendant ce temps, Saint-Aubert et Emilie s'étaient rapprochés de la chaumière et se reposaient sur un banc champêtre appuyé entre deux pins et couronné de leur feuillage; ils avaient observé Valancourt et attendaient qu'il les rejoignît.

      L'aîné des deux enfants avait quitté son jeu pour regarder les voyageurs; mais le petit continuait ses gambades et tourmentait son frère pour qu'il revînt l'aider. Saint-Aubert examinait avec plaisir cette simplicité enfantine, quand tout à coup ce spectacle lui rappelant les enfants qu'il avait perdus à cet âge, et surtout leur mère bien-aimée, il retomba dans la rêverie. Emilie, qui s'en aperçut, commença un de ces airs touchants qu'il aimait de préférence et qu'elle savait chanter avec le plus de grâce et d'expression. Saint-Aubert lui sourit au travers de ses larmes; il prit sa main, la serra tendrement, et tâcha de bannir ses mélancoliques réflexions.

      Elle chantait encore, lorsque Valancourt revint; il ne voulut pas l'interrompre et s'arrêta pour écouter. Quand elle eut fini, il approcha et raconta qu'il avait trouvé Michel et même un chemin pour gravir le rocher. Saint-Aubert à ces mots en mesura l'étonnante hauteur; il était déjà accablé, et la montée lui semblait formidable. Ce parti néanmoins lui paraissait préférable à une route longue et toute rompue; il se résolut de l'essayer, mais Emilie, toujours soigneuse, lui proposa de dîner d'abord pour rétablir un peu ses forces, et Valancourt retourna à la voiture pour y chercher des provisions.

      A son retour, il proposa de se placer un peu plus haut, parce que la vue y serait plus étendue et plus belle. Ils allaient s'y rendre, quand ils virent une jeune femme s'approcher des enfants, les caresser, et pleurer amèrement sur eux.

      Les voyageurs, intéressés à son malheur, s'arrêtèrent pour mieux l'observer. Elle prit dans ses bras le plus jeune des enfants, et découvrant des étrangers, elle sécha ses larmes à la hâte et se rapprocha de la chaumière. Saint-Aubert lui demanda ce qui pouvait tant l'affliger. Il apprit que son époux était un pauvre berger qui tous les ans passait l'été dans cette cabane pour y conduire un troupeau sur les montagnes. La nuit précédente, il avait tout perdu; une troupe de bohémiens, qui depuis quelque temps désolaient le voisinage, avait enlevé toutes les brebis de son maître. Jacques, ajoutait la femme, avait amassé un peu d'argent, et il en avait acheté quelques brebis pour nous, mais aujourd'hui, il faut bien qu'elles remplacent le troupeau qu'on a pris à son СКАЧАТЬ