Cara. Hector Malot
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Название: Cara

Автор: Hector Malot

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066089252

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      —Ah! ce monsieur l'accompagne?

      —Comme tu me dis cela.

      —C'est que, ne connaissant pas ce M. Souillier, je m'étonne qu'il accompagne mon oncle.

      —M. Soullier est un magistrat de la cour de Caen qui habite Bernières pendant les vacances; papa et lui se voient presque tous les jours et bien souvent ils vont à la pêche ensemble; il va ramener papa tout à l'heure et tu feras sa connaissance; je suis même surprise qu'ils ne soient pas encore arrivés. Mais entre donc; donne-moi ton sac; on le portera à l'hôtel, où je t'ai retenu une chambre, car nous n'en avons pas à te donner dans cette maison qui n'est pas grande, tu le vois.

      Pendant que Madeleine lui donnait ces explications, Léon eut le temps de se remettre et de composer son visage.

      La vérité n'était que trop évidente: l'irréparable était à cette heure accompli, et les dispositions prises par son oncle s'étaient réalisées: «Quand tu arriveras à Saint-Aubin, Madeleine ne saura rien, au moins j'aurai tout arrangé pour cela.» Ils étaient faciles à deviner ces arrangements, et certainement cette visite à ce M. Soullier avait été une tromperie inventée par le père pour abuser la fille. Maintenant il n'y avait plus qu'à attendre que cette tromperie se révélât; il n'y avait plus qu'à se conformer aux désirs de la lettre: «Au moment où elle sera frappée, qu'elle trouve une main qui la soutienne et un coeur dans lequel elle puisse pleurer.» S'il arrivait trop tard pour sauver son oncle, au moins arrivait-il assez tôt pour tendre la main à sa cousine. Cependant telles étaient les circonstances, qu'il ne devait pas devancer les événements, mais au contraire n'intervenir qu'après qu'ils auraient parlé.

      —Es-tu fatigué? demanda Madeleine.

      —Pas du tout.

      —Je te demande cela pour savoir si tu veux attendre papa ici, ou bien si tu veux que nous allions dans notre cabine au bord de la mer.

      —Je ferai ce que tu voudras, dit-il.

      —Eh bien! allons sur la plage, c'est le mieux pour voir papa plus tôt.

      Ayant mis vivement un chapeau et un manteau, elle tendit la main à son cousin.

      —M'offres-tu ton bras? dit-elle.

      Avant de prendre le chemin qui conduit à la plage, Madeleine frappa doucement au carreau d'une fenêtre.

      —Madame Exupère, dit-elle à la femme qui ouvrit cette fenêtre, voulez-vous avoir la complaisance de dire à papa, si par hasard il revenait par la grande route, que je suis dans la cabine avec mon cousin Léon; vous n'oublierez pas, n'est-ce pas, mon cousin Léon?

      La pauvre enfant, comme elle était loin de prévoir le coup épouvantable qui allait la frapper dans quelques instants, dans quelques secondes peut-être! Et Léon sa demanda s'il n'était pas possible d'amortir la violence de ce coup en la préparant à le recevoir. Mais comment? Que dire? Lorsque la vérité serait connue, n'éclairerait-elle pas d'une lueur sinistre ce qu'il aurait tenté en ce moment? Toute parole n'était-elle pas imprudente?

      Madeleine ne lui laissa pas le temps de réfléchir.

      —Sais-tu, dit-elle, que ta dépêche m'a causé autant de surprise que de joie? Te souviens-tu du dernier jour où nous nous sommes vus?

      —Il y a environ deux ans.

      —Il y a deux ans, trois mois et onze jours.

      —J'ai dû par respect et par convenance ne pas donner un démenti à mon père.

      —Qu'allons-nous inventer pour expliquer ton voyage, il ne faut pas l'effrayer, et il s'inquiète tant du danger qui le menace que ce serait lui porter un coup pénible, que de lui dire que tu as été averti de ce danger par ... par qui? Est-ce par le docteur La Roë?

      Léon avait préparé sa réponse à cette question, car il avait bien prévu qu'elle lui serait posée: il raconta donc l'histoire qu'il avait inventée à l'avance.

      —Ne peux-tu pas dire que tu faisais une excursion de plaisir sur le littoral?

      —Précisément, et comme mon oncle me parlera sans doute de sa maladie, je pourrai tout naturellement lui demander si je peux lui être utile à quelque chose.

      Ils étaient arrivés sur la plage.

       Table des matières

      La mer calme, que frappaient les rayons obliques du soleil, arrivait menaçante comme une inondation, et sur la grève plate, déjà aux trois quarts recouverte, les pointes verdâtres des rochers qui émergeaient encore de l'eau semblaient sombrer tout à coup au milieu des vagues clapoteuses, exactement comme une barque qui aurait coulé à pic; là où quelques secondes auparavant on avait vu des amas de pierres et de goëmons, ou des sables jaunes, on ne voyait plus qu'une ligne d'écume blanche qui se rapprochait d'instants en instants.

      Et devant la marée montante, tous ceux qui avaient profité de la basse mer pour aller au loin, sur les roches qui ne se découvrent que rarement, pêcher des coquillages ou ramasser des varechs, se hâtaient vers le rivage; à l'entrée des chemins qui du village ou des champs aboutissent à la grève, c'était un long défilé de voitures chargées d'étoiles de mer, de moules, de fucus, d'algues, de goëmons que les cultivateurs des environs rapportaient pour fumer leurs champs, et aussi toute une procession de pêcheurs et de pêcheuses, le filet à crevette sur l'épaule ou le crochet à la main, qui, mouillés jusqu'aux épaules, s'en revenaient gaiement.

      —Tout le monde rentre, dit Madeleine, nous ne devons pas tarder maintenant à voir mon père arriver avec M. Soullier.

      Et guidant Léon elle le conduisit à leur cabine, dont elle ouvrit les deux portes vitrées, puis l'ayant fait asseoir et s'étant elle-même installée en se tournant du côté de Bernières:

      —Ainsi placée, dit-elle, je verrai mon père arriver de loin et je te préviendrai:

      C'était toujours la même idée qui revenait comme si Madeleine eut été sous l'oppression d'un funeste pressentiment. Il eut voulu l'en distraire, mais comment? Ne valait-il pas mieux après tout qu'elle fût jusqu'à un certain point préparée à recevoir le coup suspendu au-dessus de sa tête, et qui d'un moment à l'autre, dans quelques minutes, peut-être allait la frapper; n'en serait-il pas moins dangereux, s'il n'en était pas moins rude?

      —Qu'as-tu donc? lui demanda-t-elle après un moment de silence.

      —Je pense à mon oncle.

      —Tu es inquiet, n'est-ce pas?

      —Inquiet, pourquoi? Je pense à sa maladie.

      —Si tu savais comme il en souffre, non par le mal lui-même, mais par l'angoisse qu'il lui cause pour le présent et plus encore pour l'avenir, car tu comprends que sa position se trouve compromise. Aussi voudrait-il cacher à tous le danger qui le menace. S'il se doute que quelqu'un de Rouen t'a parlé de sa maladie, cela le tourmentera beaucoup.

      —N'est-il pas convenu que СКАЧАТЬ