Les liaisons dangereuses. Choderlos de Laclos
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Название: Les liaisons dangereuses

Автор: Choderlos de Laclos

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

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isbn: 4064066073763

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СКАЧАТЬ l’abandon du négligé qu’elle est vraiment ravissante. Grâce aux chaleurs accablantes que nous éprouvons, un déshabillé de simple toile me laisse voir une taille ronde et souple. Une seule mousseline couvre sa gorge, et mes regards furtifs, mais pénétrants, en ont déjà saisi les formes enchanteresses. Sa figure, dites-vous, n’a nulle expression. Et qu’exprimerait-elle dans les moments où rien ne parle à son cœur? Non, sans doute, elle n’a point, comme nos femmes coquettes, ce regard menteur qui séduit quelquefois et nous trompe toujours. Elle ne sait pas couvrir le vide d’une phrase par un sourire étudié; et quoiqu’elle ait les plus belles dents du monde, elle ne rit que de ce qui l’amuse. Mais il faut voir comme, dans les folâtres jeux, elle offre l’image d’une gaîté naïve et franche! comme, auprès d’un malheureux qu’elle s’empresse de secourir, son regard annonce la joie pure et la bonté compatissante! Il faut voir, surtout au moindre mot d’éloge ou de cajolerie, se peindre, sur sa figure céleste, ce touchant embarras d’une modestie qui n’est point jouée!... Elle est prude et dévote, et de là vous la jugez froide et inanimée? Je pense bien différemment. Quelle étonnante sensibilité ne faut-il pas avoir pour la répandre jusque sur son mari, et pour aimer toujours un être toujours absent? Quelle preuve plus forte pourriez-vous désirer? J’ai su pourtant m’en procurer une autre.

      Soyons de bonne foi: dans nos arrangements, aussi froids que faciles, ce que nous appelons bonheur est à peine un plaisir. Vous le dirai-je? je croyais mon cœur flétri, et ne me trouvant plus que des sens, je me plaignais d’une vieillesse prématurée. Mme de Tourvel m’a rendu les charmantes illusions de la jeunesse. Auprès d’elle, je n’ai pas besoin de jouir pour être heureux. La seule chose qui m’effraye est le temps que va me prendre cette aventure, car je n’ose rien donner au hasard. J’ai beau me rappeler mes heureuses témérités, je ne puis me résoudre à les mettre en usage. Pour que je sois vraiment heureux, il faut qu’elle se donne, et ce n’est pas une petite affaire.

      Je suis sûr que vous admireriez ma prudence. Je n’ai pas encore prononcé le mot d’amour, mais déjà nous en sommes à ceux de confiance et d’intérêt. Pour la tromper le moins possible, et surtout pour prévenir l’effet des propos qui pourraient lui revenir, je lui ai raconté moi-même, et comme en m’accusant, quelques-uns de mes traits les plus connus. Vous ririez de voir avec quelle candeur elle me prêche. Elle veut, dit-elle, me convertir. Elle ne se doute pas encore de ce qu’il lui en coûtera pour le tenter. Elle est loin de penser qu’en plaidant, pour parler comme elle, pour les infortunées que j’ai perdues, elle parle d’avance dans sa propre cause. Cette idée me vint hier au milieu d’un de ses sermons, et je ne pus me refuser au plaisir de l’interrompre pour l’assurer qu’elle parlait comme un prophète. Adieu, ma très belle amie. Vous voyez que je ne suis pas perdu sans ressource.

      P.-S.—A propos, ce pauvre chevalier s’est-il tué de désespoir? En vérité, vous êtes cent fois plus mauvais sujet que moi, et vous m’humilieriez si j’avais de l’amour-propre.

      Du château de..., ce 9 août 17**.

       Table des matières

      Si je ne t’ai rien dit de mon mariage, c’est que je ne suis pas plus instruite que le premier jour. Je m’accoutume à n’y plus penser et je me trouve assez bien de mon genre de vie. J’étudie beaucoup mon chant et ma harpe; il me semble que je les aime mieux depuis que je n’ai plus de maître, ou plutôt c’est que j’en ai un meilleur. M. le chevalier Danceny, ce monsieur dont je t’ai parlé et avec qui j’ai chanté chez Mme de Merteuil, a la complaisance de venir ici tous les jours et de chanter avec moi des heures entières. Il est extrêmement aimable. Il chante comme un ange et compose de très jolis airs dont il fait aussi les paroles. C’est bien dommage qu’il soit chevalier de Malte! Il me semble que s’il se mariait sa femme serait bien heureuse... Il a une douceur charmante. Il n’a jamais l’air de faire un compliment et, pourtant, tout ce qu’il dit flatte. Il me reprend sans cesse, tant sur la musique que sur autre chose; mais il mêle à ses critiques tant d’intérêt et de gaieté qu’il est impossible de ne pas lui en savoir gré. Seulement, quand il vous regarde, il a l’air de vous dire quelque chose d’obligeant. Il joint à tout cela d’être très complaisant. Par exemple, hier, il était prié d’un grand concert, il a préféré de rester toute la soirée chez maman. Cela m’a bien fait plaisir, car quand il n’y est pas, personne ne me parle et je m’ennuie; au lieu que quand il y est, nous chantons et nous causons ensemble. Il a toujours quelque chose à me dire. Lui et Mme de Merteuil sont les deux seules personnes que je trouve aimables. Mais adieu, ma chère amie, j’ai promis que je saurais pour aujourd’hui une ariette dont l’accompagnement est très difficile, et je ne veux pas manquer de parole. Je vais me remettre à l’étude jusqu’à ce qu’il vienne.

      De..., ce 7 août 17**.

       Table des matières

      La Présidente de TOURVEL à Madame de VOLANGES.

      On ne peut être plus sensible que je le suis, madame, à la confiance que vous me témoignez, ni prendre plus d’intérêt СКАЧАТЬ