Robert Burns. Angellier Auguste
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Читать онлайн книгу Robert Burns - Angellier Auguste страница 36

Название: Robert Burns

Автор: Angellier Auguste

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ Cela donne à sa poésie une étonnante solidité, et en même temps un pittoresque continuel. C'est une grande marque d'observation que cette connaissance des objets et des métiers; c'est un des traits des grands observateurs. Les expressions empruntées aux jeux, aux outils, aux instruments, indiquent que l'écrivain a un œil pour tout. Les deux hommes qui ont poussé cette science minutieuse des choses le plus loin sont peut-être Shakspeare et Rabelais. Cervantès en est plein. Ils ont tout vu. Et ce n'est pas chez eux étalage de termes techniques empruntés à des manuels, de pures énumérations verbales d'objets démontés et presque classifiés. Ce sont les choses saisies dans leur jeu, dans leur travail, et leur aspect vivant. C'est une qualité par laquelle Burns se rapproche des grands esprits à qui rien n'échappe.

      Cette parfaite exactitude, unie à son absence de parti pris dans la copie de la vie, a donné à son observation une grande variété. Il accepte les sujets tels que la réalité les lui fournit et tous ceux qu'elle lui fournit à peu près indistinctement. Les plus vulgaires lui sont aussi bons que les plus élevés. Il chante le recueillement religieux et austère du samedi soir, la prière commune et la lecture de la Bible. Mais si, à l'église, il aperçoit un pou sur le chapeau d'une demoiselle toute fière de sa toilette, il s'empare du sujet et chante l'insecte «gros et gris comme une groseille à maquereau255». Presque toutes ces pièces sont écrites sur des incidents réels; presque aucune n'est un pur effort d'imagination né du désir de produire quelque chose de littéraire. Avec cette disposition, le champ ouvert devant lui était immense. Ne se dérobant à rien de ce que lui présentait la vie, son étude s'est étendue autant qu'elle.

      Il a donc représenté dans son entier le monde qui l'entourait. Non seulement les faits principaux, les amours, les morts, les travaux, les angoisses, les fatigues, mais tous les incidents qui se groupent autour d'eux, les superstitions, les joyeusetés de table, les souvenirs patriotiques, les aspirations égalitaires, mille scènes de comédie ou de colère. Ici, c'est la prière d'un Ancien hypocrite et vicieux; là, la querelle de deux curés de la Vieille-Lumière; plus loin, le portrait d'un médecin de village; plus loin l'énumération des ustensiles d'une ferme; plus loin un petit domestique qu'on engage, une brebis qu'on perd, un enfant illégitime qu'on salue, une assemblée religieuse, une comparution devant la Kirk-Session, rien ne manque, pas même les aspects plus dignes et plus sérieux de la vie. Emerson a dit avec justesse: «Les riches poètes comme Homère, Chaucer, Shakspeare et Raphaël n'ont évidemment aucune limite à leur œuvre que les limites de leur vie, et ressemblent à un miroir porté par la rue et prêt à rendre l'image de toute chose créée256.» Burns était un miroir, plus petit à coup sûr, un fragment de miroir, si l'on veut, mais, dans sa mesure, également capable de tout réfléchir.

      À côté de ce don d'exactitude, Burns en avait un autre qui caractérise sa représentation de la vie à un degré plus haut encore: le mouvement, l'agitation, la faculté de représenter la vie elle-même, agissante, prise sur le fait. C'est une conséquence des mêmes qualités de fidélité, car la vie est remuante, jamais en repos. Mais il faut, pour la prendre au vol et dans l'action qui passe, un merveilleux coup d'œil et un don spécial. Il y a des hommes, qui, à des degrés différents, comme Ben Jonson et Crabbe, ont abordé l'étude de la vie, avec un désir de conscience et d'exactitude complètes. Ils l'ont observée minutieusement, fidèlement, jusque dans ses manifestations les plus vulgaires. Mais le don du mouvement, du geste, leur a manqué. Ils ont été dépourvus de cette qualité supérieure qu'ont les hommes comme Shakspeare, Molière ou Cervantès, qu'a un homme comme Dickens, et que n'a pas un homme comme Thackeray: le don de la représentation instantanée et complète, et non de la représentation réfléchie et partielle; le coup d'œil qui ramasse tout un être d'un trait, et non l'attention qui l'étudie par fragments. Il faut remarquer encore que Ben Jonson, Crabbe et Thackeray étaient des gens cultivés, et qu'il leur était plus difficile de s'oublier dans le fait de saisir la réalité. Cette allure, cette agitation, Burns l'a eue à un très haut point. Tout chez lui est continuellement en action, tout bouge, remue, va, vient, court, gesticule; un acte est à peine indiqué qu'un autre le remplace. On comprend ce que cette rapidité de mouvement, ajoutée à l'exactitude des traits, peut donner d'intensité à ses tableaux. Dans ses pièces, presque chaque mot est un mot d'action. Ses écrits, déjà si nerveux par le fait de leur précision et de leur sobriété, le paraissent encore davantage, comme des gens en marche.

      Cette qualité est si répandue chez lui qu'on pourrait en trouver des exemples dans chacune de ses pièces. Cependant, sa Veillée de la Toussaint et sa Foire-Sainte peuvent servir, peut-être mieux que certaines autres, à en donner une idée.

      Halloween est la veille du jour de la Toussaint, le jour où il semble que l'hiver commence, et qu'avec l'accroissement des nuits l'empire des choses mystérieuses s'élargit. Dans les croyances des paysans écossais, c'est le jour où l'on peut, au moyen de certaines pratiques, voir dans l'avenir. On se réunit, ce soir-là, pour accomplir les rites et les opérations qui doivent ouvrir les secrets de l'année qui va venir. Le sujet de la pièce est une de ces soirées. C'est une pièce toute chargée de superstitions locales, et à laquelle Burns lui-même a mis de nombreuses notes explicatives, dans sa première édition destinée uniquement aux gens du pays. Mais une fois qu'on a pris connaissance de ces superstitions, il est impossible de désirer une description plus gaie, plus vivante, plus remuante. Tout est en agitation. Si on soulignait les substantifs et les adjectifs qui désignent un mouvement, on soulignerait la moitié des mots. En même temps aucun morceau ne peut mieux faire juger à quel point cette poésie est faite d'exactitude.

      La pièce s'ouvre par une charmante strophe, féerique et légère, toute brillante de clair de lune et qui fait penser aux passages de Shakspeare où passent des elfes et des gnomes. Elle donne aussitôt le caractère, l'atmosphère de superstition de tout le morceau. Elle est tout aérienne.

      Cette nuit où les fées légères

      Sur les dunes de Cassilis dansent;

      Ou bien par les champs, dans une lumière splendide,

      Caracolent sur de vifs coursiers;

      Ou bien prennent la route de Colean

      Sous les pâles rayons de la lune,

      Pour y errer et se perdre dans la caverne,

      Parmi les rocs et les ruisseaux,

      Et jouer cette nuit-là257.

      Ce regard rapide vers les hauteurs sauvages et sombres de Cassilis donne à la réunion autour du feu une sensation de sécurité et de bien-être, en répandant autour de la maison un peu de terreur. On entend courir, dans la nuit, le Doon, sinueux et clair sous la lune. Les voisins arrivent; les fillettes propres et plus jolies que lorsqu'elles ont leurs atours. Les gars viennent bientôt après, avec un double nœud à leurs jarretières pour indiquer qu'ils font leur cour; les uns, taciturnes, les autres, bavards; bien des cœurs déjà se mettent à battre.

      Les cérémonies commencent et, avec elles, les rires, les cris, les exclamations et les bousculades, qui vont aller en grandissant. On se rend d'abord au jardin cueillir, les yeux fermés, une tige de chou. Si elle est grosse ou mince, droite ou tordue, ce sont autant d'indications. Ce sont des cris. Puis, les fillettes vont à la grange arracher un épi, et ce sont d'autres farces et d'autres jeux. Voici qu'on range devant le feu les noix qui doivent décider du destin des filles et des gars: quelques-unes restent tranquilles l'une à côté de l'autre et se consument de compagnie; c'est signe du mariage; d'autres s'agitent, craquent, sautent, éclatent dans la cheminée. Alors ce sont des exclamations, des éclats de rire. Le bruit augmente; les noix font une fusillade; les clameurs se croisent, parmi les jurons de dépit et les confidences. Merran qui pense à Andrew Bill et qui est assise derrière les autres, en profite pour sortir et aller dévider un écheveau de laine dans un pot. Si, en le repelotonnant, quelque chose l'arrête, on peut demander au pot: «qui tient?» Et le pot répond le nom de la personne СКАЧАТЬ



<p>255</p>

To a Louse.

<p>256</p>

Emerson. Essays, The Poet.

<p>257</p>

Halloween.