Mémoires d'un cambrioleur retiré des affaires. Galopin Arnould
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СКАЧАТЬ m'avez salement lâché, hier soir…

      – Excusez-moi, mon bon Alcide, mais je me suis senti subitement indisposé…

      – La grippe, sans doute?.. Tout le monde a la grippe. Figurez-vous que le patron est rentré cette nuit avec une fièvre de cheval… Le médecin dit que c'est grave… et si le vieux s'en tire, il sera sans doute obligé de garder le lit pendant un bon mois… Mais, à propos, c'est moi que vous alliez voir?

      – Non… j'étais venu rendre visite à un ami qui habite cette maison…

      Et de la main je désignai Manzana qui se tenait adossé à la rampe.

      – Ah! très bien… je croyais… Je vous quitte, car je suis pressé… le vieux attend après ses médicaments… Fichues, les séances de cinéma!..

      Quand Alcide eut disparu, je me rapprochai de mon compagnon et nous continuâmes de descendre.

      Une fois dans la rue, il demanda:

      – Quel est ce grand escogriffe?.. le domestique de M. Bénoni, sans doute?

      – Oui… et vous avez entendu ce qu'il a dit? Son patron est couché… Donc, rien à faire… notre expédition est manquée?

      Manzana hocha lentement la tête.

      – Il faudra trouver autre chose, dit-il au bout d'un instant.

      Nous étions arrivés devant un café blanc qui fait l'angle de la place des Ternes et du faubourg Saint-Honoré…

      – Entrons ici, dis-je.

      Je commandai deux mokas avec des petits pains. Manzana, qui me parut affamé, mangeait et buvait en silence. Un pli barrait son front jaune et il avait, par instants, de petits mouvements d'impatience. On voyait qu'il réfléchissait…

      Tout à coup, il se frappa le front.

      – J'ai trouvé, dit-il.

      Et se penchant vers moi, il m'exposa le projet qui venait de germer dans sa cervelle de bandit.

      – Mon cher Pipe, me confia-t-il, je crois que nous sommes sauvés…

      – Ah!

      – Oui, mais l'affaire est assez délicate.

      – Un cambriolage?

      – Non…

      – Au fond, j'aime mieux ça.

      – Et moi aussi… mais voilà… nous allons nous heurter à bien des difficultés.

      – Expliquez-vous toujours.

      – Eh bien, je songe à vendre les meubles de mon appartement…

      – Mais ces meubles ne vous appartiennent pas?

      – Cela n'a aucune importance… le principal, c'est que je trouve un acquéreur…

      – Bah! des acquéreurs, vous en trouverez tant que vous voudrez, mais vous oubliez qu'il y a un concierge dans la maison.

      – Nous éloignerons le concierge sous un prétexte quelconque.

      – Mais avant de vous régler le montant de la vente que vous lui aurez consentie, l'acheteur prendra des renseignements… il voudra savoir si les meubles vous appartiennent réellement… Non… croyez-moi, si c'est tout ce que vous avez trouvé…

      – Voyez-vous une autre combinaison?

      – Pour le moment, non… mais peut-être qu'en réfléchissant…

      – Ne pourrait-on faire scier le diamant par un ouvrier lapidaire à qui on promettrait une forte récompense? Est-il nécessaire d'aller en Hollande?

      – Oui… car en Hollande, je vous l'ai déjà dit, j'ai un ami sur lequel je puis compter… Il ne me dénoncera pas, celui-là.

      – Oui, je vois… vous vous entendrez avec lui… et je serai roulé.

      – Alors, rendez-moi mon diamant.

      – Quant à ça, non, par exemple… je l'ai, je le garde…

      – Pas pour vous seul, je suppose?

      – Bien sûr… bien sûr… Ah! tenez, mon cher Pipe, excusez-moi, je perds la tête. Voyons… raisonnons… vous êtes sûr que nous ne pouvons pas nous débarrasser de notre pierre, en la vendant, même au rabais, à quelque courtier marron?

      – Impossible.

      – Cependant, il y a des gens qui se prêtent à ce genre d'affaires?

      – Oui, mais un courtier marron, comme vous dites, ne dispose pas de deux ou trois millions…

      – Par son intermédiaire, il serait peut-être possible de trouver un ouvrier qui consentirait à fractionner notre diamant.

      – Non… car cet ouvrier nous dénoncerait aussitôt. Il y a des pierres précieuses qui sont connues, cataloguées, étiquetées, et la nôtre est de celles-là.

      – Elle appartenait à une collection?

      – Oui…

      – Au baron de Rothschild, peut-être?

      – Non… au musée du Louvre…

      – Ah! diable! mais alors, c'est un Diamant de la Couronne… le Régent, peut-être?

      – Vous l'avez dit.

      – Oui… oui… je comprends… fallait-il que je fusse bête!.. j'aurais dû me douter que c'était le Régent… Je l'ai vu plus de dix fois, là-bas, dans sa vitrine et en le contemplant, je me suis dit souvent: «Si j'avais ce diamant-là dans ma poche!»

      – Eh bien, vous l'avez aujourd'hui, non pas dans votre poche, mais dans votre coffre-fort et vous n'êtes pas plus riche pour cela…

      – C'est vrai… je n'aurais jamais supposé qu'avec une fortune pareille dans son gousset, on pût mourir de faim.

      – Nous ne mourrons pas de faim, je l'espère, mais nous ne tenons pas encore nos millions… Je vous l'ai dit et je vous le répète, ce n'est qu'à Amsterdam que nous pourrons écouler ce «bibelot» gênant… Faites-moi confiance, c'est tout ce que je vous demande… Si vous voulez agir à votre guise, mener vous-même cette affaire, vous ferez tout manquer. Que demandez-vous? de l'argent… vous en aurez, soyez-en sûr, mais suivez mes conseils. Qu'avez-vous à craindre? que je vous dénonce? Le puis-je sans me dénoncer moi-même?

      Ce raisonnement parut convaincre Manzana. Il me tendit une main molle que je serrai sans effusion, et nous sortîmes du café.

      Dans la rue, il me prit le bras et nous nous acheminâmes vers l'Etoile.

      Tout en marchant, nous continuions, bien entendu, à échafauder combinaisons sur combinaisons, sans parvenir à en trouver une qui valût la peine d'être retenue. Nous venions de nous engager dans l'avenue des Champs-Elysées, СКАЧАТЬ