Название: Опасные связи / Les liaisons dangereuses. Книга для чтения на французском языке
Автор: Пьер Шодерло де Лакло
Издательство: КАРО
Жанр: Иностранные языки
Серия: Littérature classique (Каро)
isbn: 978-5-9925-1551-0
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Je suis bien fâchée que vous êtes encore triste à présent, mais ce n’est pas ma faute. Je demanderai à jouer de la harpe aussitôt que vous serez arrivé, afin que vous ayez ma lettre tout de suite. Je ne peux pas mieux faire.
Adieu, Monsieur. Je vous aime bien, de tout mon cœur : plus je vous le dis, plus je suis contente ; j’espère que vous le serez aussi.
De …, ce 24 août 17**.
Lettre XXXI. Le Chevalier Danceny à Cécile Volanges
Oui, sans doute, nous serons heureux. Mon bonheur est bien sûr, puisque je suis aimé de vous ; le vôtre ne finira jamais, s’il doit durer autant que l’amour que vous m’avez inspiré. Quoi ! vous m’aimez, vous ne craignez plus de m’assurer de votre amour ! Plus vous me le dites, et plus vous êtes contente ! Après avoir lu ce charmant je vous aime, écrit de votre main, j’ai entendu votre belle bouche m’en répéter l’aveu. J’ai vu se fixer sur moi ces yeux charmants, qu’embellissait encore l’expression de la tendresse. J’ai reçu vos serments de vivre toujours pour moi. Ah ! recevez le mien de consacrer ma vie entière à votre bonheur ; recevez-le, et soyez sûre que je ne le trahirai pas.
Quelle heureuse journée nous avons passée hier ! Ah ! pourquoi Mme de Merteuil n’a-t-elle pas tous les jours des secrets à dire à votre Maman ? pourquoi faut-il que l’idée de la contrainte qui nous attend vienne se mêler au souvenir délicieux qui m’occupe ? pourquoi ne puis-je sans cesse tenir cette jolie main qui m’a écrit je vous aime ! la couvrir de baisers, et me venger ainsi du refus que vous m’avez fait d’une faveur plus grande ?
Dites-moi, ma Cécile, quand votre Maman a été rentrée ; quand nous avons été forcés, par sa présence, de n’avoir plus l’un pour l’autre que des regards indifférents ; quand vous ne pouviez plus me consoler par l’assurance de votre amour, du refus que vous faisiez de m’en donner des preuves, n’avez-vous donc senti aucun regret ? ne vous êtes-vous pas dit : Un baiser l’eût rendu plus heureux, et c’est moi qui lui ai ravi ce bonheur ? Promettez-moi, mon aimable amie, qu’à la première occasion vous serez moins sévère. A l’aide de cette promesse, je trouverai du courage pour supporter les contrariétés que les circonstances nous préparent ; et les privations cruelles seront au moins adoucies, par la certitude que vous en partagez le regret.
Adieu, ma charmante Cécile : voici l’heure où je dois me rendre chez vous. Il me serait impossible de vous quitter, si ce n’était pour aller vous revoir. Adieu, vous que j’aime tant ! vous, que j’aimerai toujours davantage !
De …, ce 25 août 17**.
Lettre XXXII. Madame de Volanges à la Présidente de Tourvel
Vous voulez donc, Madame, que je croie à la vertu de M. de Valmont ? J’avoue que je ne puis m’y résoudre, et que j’aurais autant de peine à le juger honnête, d’après le fait isolé que vous me racontez, qu’à croire vicieux un homme de bien reconnu, dont j’apprendrais une faute. L’humanité n’est parfaite dans aucun genre, pas plus dans le mal que dans le bien. Le scélérat a ses vertus, comme l’honnête homme a ses faiblesses. Cette vérité me paraît d’autant plus nécessaire à croire, que c’est d’elle que dérive la nécessité de l’indulgence pour les méchants comme pour les bons, et qu’elle préserve ceux-ci de l’orgueil, et sauve les autres du découragement. Vous trouverez sans doute que je pratique bien mal, dans ce moment, cette indulgence que je prêche ; mais je ne vois plus en elle qu’une faiblesse dangereuse, quand elle nous mène à traiter de même le vicieux et l’homme de bien.
Je ne me permettrai point de scruter les motifs de l’action de M. de Valmont ; je veux les croire louables comme elle : mais en a-t-il moins passé sa vie à porter dans les familles le trouble, le déshonneur et le scandale ? Ecoutez, si vous voulez, la voix du malheureux qu’il a secouru, mais qu’elle ne vous empêche pas d’entendre les cris de cent victimes qu’il a immolées. Quand il ne serait, comme vous le dites, qu’un exemple du danger des liaisons, en serait-il moins lui-même une liaison dangereuse ? Vous le supposez susceptible d’un retour heureux ? Allons plus loin ; supposons ce miracle arrivé : ne resterait-il pas contre lui l’opinion publique, et ne suffit-elle pas pour régler votre conduite ? Dieu seul peut absoudre au moment du repentir ; il lit dans les cœurs ; mais les hommes ne peuvent juger les pensées que par les actions ; et nul d’entre eux, après avoir perdu l’estime des autres, n’a droit de se plaindre de la méfiance nécessaire, qui la lui rend si difficile à recouvrer. Songez surtout, ma jeune amie, que quelquefois il suffit, pour la perdre, d’avoir l’air d’y attacher trop peu de prix ; et ne taxez pas cette sévérité d’injustice ; car, outre qu’on est fondé à croire qu’on ne renonce pas à ce bien précieux quand on a droit d’y prétendre, celui-là est en effet plus près de mal faire, qui n’est plus contenu par ce frein puissant. Tel serait cependant l’aspect sous lequel vous montrerait une liaison intime avec M. de Valmont, quelque innocente qu’elle pût être.
Effrayée de la chaleur avec laquelle vous le défendez, je me hâte de prévenir les objections que je prévois. Vous me citerez Madame de Merteuil ; à qui on a pardonné cette liaison ; vous me demanderez pourquoi je le reçois chez moi : vous me direz que, loin d’être rejeté par les gens honnêtes, il est admis, recherché même dans ce qu’on appelle la bonne compagnie. Je peux, je crois, répondre à tout.
D’abord Mme de Merteuil, en effet très estimable, n’a peut-être d’autre défaut que trop de confiance en ses forces ; c’est un guide adroit qui se plaît à conduire un char entre les rochers et les précipices, et que le succès seul justifie : il est juste de la louer, il serait imprudent de la suivre ; elle-même en convient et s’en accuse. A mesure qu’elle a vu davantage, ses principes sont devenus plus sévères ; et je ne crains pas de vous assurer qu’elle-même penserait comme moi.
Quant à ce qui me regarde, je ne me justifierai pas plus que les autres. Sans doute je reçois M. de Valmont, et il est reçu partout ; c’est une inconséquence de plus à ajouter à mille autres qui gouvernent la société. Vous savez, comme moi, qu’on passe sa vie à les remarquer, à s’en plaindre et à s’y livrer. M. de Valmont, avec un beau nom, une grande fortune, beaucoup de qualités aimables, a reconnu de bonne heure que pour avoir l’empire dans la société, il suffisait de manier, avec une égale adresse, la louange et le ridicule. Nul ne possède comme lui ce double talent : il séduit avec l’un, et se fait craindre avec l’autre. On ne l’estime pas ; mais on le flatte. Telle est son existence au milieu d’un monde qui, plus prudent que courageux, aime mieux le ménager que le combattre.
Mais ni Mme de Merteuil elle-même, ni aucune autre femme, n’oserait sans doute aller s’enfermer à la campagne, presque en tête-à-tête avec un tel homme. Il était réservé à la plus sage, à la plus modeste d’entr’elles, de donner l’exemple de cette inconséquence ; pardonnez-moi ce mot, il échappe à l’amitié. Ma belle amie, votre honnêteté même vous trahit, par la sécurité qu’elle vous inspire. Songez donc que vous aurez pour juges, d’une part, des gens frivoles, qui ne croiront pas à une vertu dont ils ne trouvent pas le modèle chez eux ; et de l’autre, des méchants qui feindront de n’y pas croire, pour vous punir de l’avoir eue. Considérez que vous faites, dans ce moment, ce que quelques hommes n’oseraient pas risquer. En effet, parmi les jeunes gens, dont СКАЧАТЬ