Название: L'année terrible
Автор: Victor Hugo
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066304270
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Prend la peine d’ouvrir sa fosse, et, se plaçant
Sous l’effrayant couteau qu’un mystère environne,
Coupe sa tête afin d’affermir sa couronne!
III
Quand la comète tombe au puits des nuits, du moins
A-t-elle en s’éteignant les soleils pour témoins
Satan précipité demeure grandiose;
Son écrasement garde un air d’apothéose;
Et sur un fier destin, farouche vision,
La haute catastrophe est un dernier rayon.
Bonaparte jadis était tombé ; son crime,
Immense, n’avait pas déshonoré l’abîme;
Dieu l’avait rejeté, mais sur ce grand rejet
Quelque chose de vaste et d’altier surnageait;
Le côté de clarté cachait le côté d’ombre;
De sorte que la gloire aimait cet homme sombre,
Et que la conscience humaine avait un fond
De doute sur le mal que les colosses font.
Il est mauvais qu’on mette un crime dans un temple,
Et Dieu vit qu’il fallait recommencer l’exemple.
Lorsqu’un titan larron a gravi les sommets,
Tout voleur l’y veut suivre; or il faut désormais
Que Sbrigani ne puisse imiter Prométhée;
Il est temps que la terre apprenne épouvantée
A quel point le petit peut dépasser le grand,
Comment un ruisseau vil est pire qu’un torrent,
Et de quelles stupeurs la main du sort est pleine,
Même après Waterloo, même après Sainte-Hélène!
Dieu veut des astres noirs empêcher le lever.
Comme il était utile et juste d’achever
Brumaire et ce Décembre encor couvert de voiles
Par une éclaboussure allant jusqu’aux étoiles
Et jusqu’aux souvenirs énormes d’autrefois,
Comme il faut au plateau jeter le dernier poids,
Celui qui pèse tout voulut montrer au monde,
Après la grande fin, l’écroulement immonde,
Pour que le genre humain reçût une leçon,
Pour qu’il eût le mépris ayant eu le frisson,
Pour qu’après l’épopée on eût la parodie,
Et pour que nous vissions ce qu’une tragédie
Peut contenir d’horreur, de cendre et de néant
Quand c’est un nain qui fait la chute d’un géant.
Cet homme étant le crime, il était nécessaire
Que tout le misérable eût toute la misère,
Et qu’il eût à jamais le deuil pour piédestal;
Il fallait que la fin de cet escroc fatal
Par qui le guet-apens jusqu’à l’empire monte
Fût telle que la boue elle-même en eût honte,
Et que César, flairé des chiens avec dégoût,
Donnât, en y tombant, la nausée à l’égout.
IV
Azincourt est riant. Désormais Ramillies,
Trafalgar, plaisent presque à nos mélancolies;
Poitiers n’est plus le deuil, Blenheim n’est plus l’affront,
Crécy n’est plus le champ où l’on baisse le front,
Le noir Rosbach nous fait l’effet d’une victoire.
France, voici le lieu hideux de ton histoire,
Sedan. Ce nom funèbre, où tout vient s’éclipser,
Crache-le, pour ne plus jamais le prononcer.
V
Plaine! affreux rendez-vous! Ils y sont, nous y sommes.
Deux vivantes forêts, faites de têtes d’hommes,
De bras, de pieds, de voix, de glaives, de fureur,
Marchent l’une sur l’autre et se mêlent. Horreur!
Cris! Est-ce le canon? sont-ce des catapultes?
Le sépulcre sur terre a parfois des tumultes,
Nous appelons cela hauts faits, exploits; tout fuit,
Tout s’écroule, et le ver dresse la tête au bruit.
Des condamnations sont par les rois jetées
Et sont par l’homme, hélas! sur l’homme exécutées;
Avoir tué son frère est le laurier qu’on a.
Après Pharsale, après Hastings, après Iéna,
Tout est chez l’un triomphe et chez l’autre décombre.
O Guerre! le hasard passe sur un char d’ombre
Par d’effrayants chevaux invisibles traîné.
La lutte était farouche. Ln carnage effréné
Donnait aux combattants des prunelles de braise;
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