Название: LUPIN: Les aventures complètes
Автор: Морис Леблан
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066379902
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– Parfait, capitaine ! s’écria Lupin. Vous avez reçu la dépêche ?
– Je l’aie reçue.
– L’Hirondelle est prête ?
– L’Hirondelle est prête.
– En ce cas, Monsieur Sholmès ?
L’Anglais regarda autour de lui, vit un groupe de personnes à la terrasse d’un café, un autre plus près, un instant, puis comprenant qu’avant toute intervention, il serait happé, embarqué, expédié à fond de cale, il traversa la passerelle et suivit Lupin dans la cabine du capitaine.
Elle était vaste, d’une propreté méticuleuse, et toute claire du vernis de ses lambris et de l’étincellement de ses cuivres.
Lupin referma la porte et, sans préambule, presque brutalement, il dit à Sholmès :
– Que savez-vous au juste ?
– Tout.
– Tout ? Précisez.
Il n’y avait plus dans l’intonation de sa voix cette politesse un peu ironique qu’il affectait à l’égard de l’Anglais. C’était l’accent impérieux du maître qui a l’habitude de commander et l’habitude que tout le monde plie devant lui, fût-ce un Herlock Sholmès.
Ils se mesurèrent du regard, ennemis maintenant, ennemis déclarés et frémissants. Un peu énervé, Lupin reprit :
– Voilà plusieurs fois, Monsieur, que je vous rencontre sur mon chemin. C’est autant de fois de trop, et j’en ai assez de perdre mon temps à déjouer les pièges que vous me tendez. Je vous préviens donc que ma conduite avec vous dépendra de votre réponse. Que savez-vous au juste ?
– Tout, Monsieur, je vous le répète.
Arsène Lupin se contint et d’un ton saccadé :
– Je vais vous le dire, moi, ce que vous savez. Vous savez que, sous le nom de Maxime Bermond, j’ai… retouché quinze maisons construites par M. Destange.
– Oui.
– Sur ces quinze maisons, vous en connaissez quatre.
– Oui.
– Et vous avez la liste des onze autres.
– Oui.
– Vous avez pris cette liste chez M. Destange, cette nuit sans doute.
– Oui.
– Et comme vous supposez que, parmi ces onze immeubles, il y en a fatalement un que j’ai gardé pour moi, pour mes besoins et pour ceux de mes amis, vous avez confié à Ganimard le soin de se mettre en campagne et de découvrir ma retraite.
– Non.
– Ce qui signifie ?
– Ce qui signifie que j’agis seul, et que j’allais me mettre, seul, en campagne.
– Alors, je n’ai rien à craindre, puisque vous êtes entre mes mains.
– Vous n’avez rien à craindre tant que je serai entre vos mains.
– C’est-à-dire que vous n’y resterez pas ?
– Non.
Arsène Lupin se rapprocha encore de l’Anglais, et lui posant très doucement la main sur l’épaule :
– Écoutez, Monsieur, je ne suis pas en humeur de discuter, et vous n’êtes pas, malheureusement pour vous, en état de me faire échec. Donc, finissons-en.
– Finissons-en.
– Vous allez me donner votre parole d’honneur de ne pas chercher à vous échapper de ce bateau avant d’être dans les eaux anglaises.
– Je vous donne ma parole d’honneur de chercher par tous les moyens à m’échapper, répondit Sholmès, indomptable.
– Mais, sapristi, vous savez pourtant que je n’ai qu’un mot à dire pour vous réduire à l’impuissance. Tous ces hommes m’obéissent aveuglément. Sur un signe de moi, ils vous mettent une chaîne au cou…
– Les chaînes se cassent.
– … Et vous jettent pardessus bord à dix milles des côtes.
– Je sais nager.
– Bien répondu, s’écria Lupin en riant. Dieu me pardonne, j’étais en colère. Excusez-moi, maître… et concluons. Admettez-vous que je cherche les mesures nécessaires à ma sécurité et à celle de mes amis ?
– Toutes les mesures. Mais elles sont inutiles.
– D’accord. Cependant vous ne m’en voudrez pas de les prendre.
– C’est votre devoir. Allons-y.
Lupin ouvrit la porte et appela le capitaine et deux matelots. Ceux-ci saisirent l’Anglais, et après l’avoir fouillé lui ficelèrent les jambes et l’attachèrent à la couchette du capitaine.
– Assez ! ordonna Lupin. En vérité, il faut votre obstination, Monsieur, et la gravité exceptionnelle des circonstances, pour que j’ose me permettre…
Les matelots se retirèrent. Lupin dit au capitaine :
– Capitaine, un homme d’équipage restera ici à la disposition de M. Sholmès, et vous-même lui tiendrez compagnie autant que possible. Qu’on ait pour lui tous les égards. Ce n’est pas un prisonnier, mais un hôte. Quelle heure est-il à votre montre, capitaine ?
– Deux heures cinq.
Lupin consulta sa montre, puis une pendule accrochée à la cloison de la cabine.
– Deux heures cinq ?… nous sommes d’accord. Combien de temps vous faut-il pour aller à Southampton ?
– Neuf heures, sans nous presser.
– Vous en mettrez onze. Il ne faut pas que vous touchiez terre avant le départ du paquebot qui laisse Southampton à minuit et qui arrive au Havre à huit heures du matin. Vous entendez, n’est-ce pas, capitaine ? Je me répète : comme il serait infiniment dangereux pour nous tous que Monsieur revînt en France par ce bateau, il ne faut pas que vous arriviez à Southampton avant une heure du matin.
– C’est compris.
– Je vous salue, Maître. À l’année prochaine, dans ce monde ou dans l’autre.
– À demain.
Quelques minutes plus tard Sholmès entendit l’automobile qui s’éloignait, et tout de suite, aux profondeurs de L’Hirondelle, la vapeur haleta plus violemment. Le bateau démarrait.
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