Название: LUPIN: Les aventures complètes
Автор: Морис Леблан
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066379902
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– En effet.
– Eh bien, j’ai compris plus tard que la couturière, c’était vous. Et, dans le bateau, cette nuit, par un effort de mémoire, qui est peut-être une des choses dont il me sera permis de tirer vanité, je suis parvenu à reconstituer les deux derniers chiffres de votre numéro de téléphone… 73. De la sorte, possédant la liste de vos maisons « retouchées », il m’a été facile, dès mon arrivée à Paris, ce matin, à onze heures, de chercher et de découvrir dans l’annuaire du téléphone le nom et l’adresse de M. Félix Davey. Ce nom et cette adresse connus, j’ai demandé l’aide de M. Ganimard.
– Admirable ! De premier ordre ! Je n’ai qu’à m’incliner. Mais ce que je ne saisis pas, c’est que vous ayez pris le train du Havre. Comment avez-vous fait pour vous évader de L’Hirondelle ?
– Je ne me suis pas évadé.
– Cependant…
– Vous aviez donné l’ordre au capitaine de n’arriver à Southampton qu’à une heure du matin. On m’a débarqué à minuit. J’ai donc pu prendre le paquebot du Havre.
– Le capitaine m’aurait trahi ? C’est inadmissible.
– Il ne vous a pas trahi.
–Alors ?
– C’est sa montre.
– Sa montre ?
– Oui, sa montre que j’ai avancée d’une heure.
– Comment ?
– Comme on avance une montre, en tournant le remontoir. Nous causions, assis l’un près de l’autre, je lui racontais des histoires qui l’intéressaient… ma foi, il ne s’est aperçu de rien.
– Bravo, bravo, le tour est joli, je le retiens. Mais la pendule, qui était accrochée à la cloison de sa cabine ?
– Ah la pendule, c’était plus difficile, car j’avais les jambes liées, mais le matelot qui me gardait pendant les absences du capitaine a bien voulu donner un coup de pouce aux aiguilles.
– Lui ? Allons donc ! Il a consenti ?…
– Oh ! Il ignorait l’importance de son acte ! Je lui ai dit qu’il me fallait à tout prix prendre le premier train pour Londres, et… il s’est laissé convaincre…
– Moyennant…
– Moyennant un petit cadeau… que l’excellent homme d’ailleurs a l’intention de vous transmettre loyalement.
– Quel cadeau ?
– Presque rien.
– Mais encore ?
– Le diamant bleu.
– Le diamant bleu !
– Oui, le faux, celui que vous avez substitué au diamant de la comtesse, et qu’elle m’a confié…
Ce fut une explosion de rire, soudaine et tumultueuse. Lupin se pâmait, les yeux mouillés de larmes.
– Dieu, que c’est drôle ! Mon faux diamant repassé au matelot ! Et la montre du capitaine ! Et les aiguilles de la pendule ! …
Jamais encore Sholmès n’avait senti la lutte aussi violente entre Lupin et lui. Avec son instinct prodigieux, il devinait, sous cette gaieté excessive, une concentration de pensée formidable, comme un ramassement de toutes les facultés.
Peu à peu Lupin s’était rapproché. L’Anglais recula et, distraitement, glissa les doigts dans la poche de son gousset.
– Il est trois heures, Monsieur Lupin.
– Trois heures déjà ? Quel dommage !… On s’amusait tellement !…
– J’attends votre réponse.
– Ma réponse ? Mon Dieu que vous êtes exigeant ! Alors c’est la fin de la partie que nous jouons. Et comme enjeu, ma liberté !
– Ou le diamant bleu.
– Soit… jouez le premier. Que faites-vous ?
– Je marque le roi, dit Sholmès, en jetant un coup de revolver.
– Et moi le point, riposta Arsène en lançant son poing vers l’Anglais.
Sholmès avait tiré en l’air, pour appeler Ganimard dont l’intervention lui semblait urgente. Mais le poing d’Arsène jaillit droit à l’estomac de Sholmès qui pâlit et chancela. D’un bond Lupin sauta jusqu’à la cheminée, et déjà la plaque de marbre s’ébranlait… trop tard ! La porte s’ouvrit.
– Rendez vous, Lupin. Sinon…
Ganimard, posté sans doute plus près que Lupin n’avait cru, Ganimard était là, le revolver braqué sur lui. Et derrière Ganimard, dix hommes, vingt hommes se bousculaient, de ces gaillards solides et sans scrupules, qui l’eussent abattu comme un chien au moindre signe de résistance.
Il fit un geste, très calme.
– Bas les pattes ! Je me rends.
Et il croisa ses bras sur sa poitrine.
Il y eut comme une stupeur. Dans la pièce dégarnie de ses meubles et de ses tentures, les paroles d’Arsène Lupin se prolongeaient ainsi qu’un écho. « Je me rends ! » Paroles incroyables ! On s’attendait à ce qu’il s’évanouît soudain par une trappe, ou qu’un pan de mur s’écroulât devant lui et le dérobât une fois de plus à ses agresseurs. Et il se rendait !
Ganimard s’avança, et, très ému, avec toute la gravité que comportait un tel acte, lentement, il étendit la main sur son adversaire, et il eut la jouissance infinie de prononcer :
– Je vous arrête, Lupin.
– Brrr, frissonna Lupin, vous m’impressionnez, mon bon Ganimard. Quelle mine lugubre ! On dirait que vous parlez sur la tombe d’un ami. Voyons, ne prenez pas ces airs d’enterrement.
– Je vous arrête.
– Et ça vous épate ? Au nom de la loi dont il est le fidèle exécuteur, Ganimard, inspecteur principal, arrête le méchant Lupin. Minute historique, et dont vous saisissez toute l’importance… et c’est la seconde fois que pareil fait se produit. Bravo, Ganimard, vous irez loin dans la carrière !
Et il offrit ses poignets au cabriolet d’acier…
Ce fut un événement qui s’accomplit d’une manière un peu solennelle. Les agents, malgré leur brusquerie ordinaire et l’âpreté de leur ressentiment contre Lupin, agissaient avec réserve, étonnés qu’il leur fût permis de toucher à cet être intangible.
– Mon pauvre Lupin, soupira-t-il, que diraient СКАЧАТЬ