La main froide. Fortuné du Boisgobey
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Название: La main froide

Автор: Fortuné du Boisgobey

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066086527

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СКАЧАТЬ enfants, il ne s'agit pas de tout ça, dit Maria. On s'embête ici, au milieu de tous ces types.

      Tu paies à dîner, pas vrai, mon vieux Jean?

      —À dîner, à souper… tout ce que vous voudrez, mes petites reines.

      —Alors, il est temps d'aller prendre l'absinthe au Boul'Mich.

      —Allons-y! conclut Mirande. En es-tu, Paul?

      —Non. Je dîne chez ma mère, je te l'ai déjà dit.

      —Tiens, s'écria Zoé, j'ai vu jouer une pièce qui s'appelle comme ça.

      —En route! reprit Maria, en s'emparant du bras de Jean.

      Ses aimables compagnes entourèrent le couple et le groupe tumultueux roula comme une avalanche vers la grand escalier de la terrasse.

      Trop heureux d'être délivré de leur bruyante société, Paul Cormier les laissa partir sans regret.

      Ils l'avaient entraîné assez loin de la dame blonde. Il lui tardait de la revoir et d'essayer d'attirer son attention, car il ne désespérait pas de lui plaire, en s'y prenant autrement que ne l'avait fait Mirande.

      Il tenait d'autant plus à tenter l'aventure que pareille occasion ne s'offrirait peut-être plus jamais de réaliser le rêve de toute sa vie.

      Ce rêve ambitieux, c'était de se faire aimer d'une femme du vrai monde et celle-là en était certainement, quoi qu'en pût dire ce Jean qui ne croyait à rien.

      Il s'agissait maintenant de manœuvrer adroitement et Paul avait à choisir entre deux partis: ou aborder à son tour la liseuse, sous prétexte de lui présenter les excuses de son ami, en lui disant que cet ami était gris; ou bien se contenter de la saluer respectueusement, afin de marquer par cette politesse discrète que, lui, Paul Cormier, désapprouvait la conduite de son camarade au chapeau pointu et se tenait prêt à réparer les torts de ce garçon mal élevé, pour peu qu'elle voulût l'y encourager d'un coup d'œil.

      Paul penchait pour cette dernière façon de procéder qui convenait mieux à son tempérament et il en était déjà à se composer une attitude pour ne pas manquer son effet, quand il s'aperçut que la place était vide.

      La dame avait levé le siège, pendant qu'il se défendait contre les instances des invitées de Mirande et il eut beau chercher de tous les côtés, il ne retrouva ni elle ni son chevalier noir.

      —Allons! murmura-t-il tristement, j'arrive trop tard. Et il ne me reste même pas la ressource de la suivre pour voir où elle demeure. Elle a dû remonter dans son équipage qui l'attendait à une des portes du jardin. L'ange blond s'est envolé et je ne le reverrai plus… Bah! qui sait?… en venant tous les jours sur cette terrasse, je l'y rencontrerai peut-être… et, j'aurai soin d'y venir sans ce grand fou de Mirande.

      Médiocrement consolé par ce très vague espoir, Paul s'achemina vers la grille qui fait face aux galeries de l'Odéon.

      Il était résigné à s'en aller rue des Tournelles chez sa mère qui l'attendait pour dîner. Il y a, tout près de cette sortie du Luxembourg, une station de fiacres et il comptait en prendre un.

      Le concert tirait à sa fin; les amateurs de musique en plein vent commençaient à se disperser et le gros de la foule s'écoulait du côté de la rue de Vaugirard.

      Paul suivit le torrent.

      Après avoir passé devant la fontaine de Médicis, il franchit la grille et avant de remonter à droite, du côté où stationnent les voitures de place, il s'arrêta un instant sur le trottoir pour allumer un cigare.

      Quand ce fut fait, en regardant machinalement devant lui, il avisa, au coin de la rue Corneille, un coupé de maître, attelé de deux beaux chevaux bais-bruns.

      Un cocher majestueux, haut perché sur son siège avait les guides en main et le fouet appuyé sur la cuisse droite. Un valet de pied en livrée sombre se tenait debout près de la portière.

      Paul, qui avait la prétention d'être connaisseur en équipages, se mit à admirer celui-là.

      Les glaces étaient levées, quoiqu'il fît très chaud, mais il crut voir à travers la vitre un visage féminin qui disparut aussitôt.

      C'en était assez pour exciter la curiosité d'un flâneur, mais Paul se dit qu'il ferait une sottise en allant regarder de plus près une princesse si bien gardée et passa, non sans se retourner trois fois.

      A la troisième, il constata que le coupé n'était plus là.

      Il avait dû tourner rapidement et filer vers la place de l'Odéon.

      Paul continua son chemin sans se presser.

      Arrivé à la station, il ouvrit la portière du fiacre qui tenait la tête de la file et il allait y monter, lorsqu'une femme y entra du côté opposé et y prit place tranquillement.

      Il n'avait nulle envie de contester le droit de priorité de cette dame et il recula pour se mettre en quête d'une autre voiture, mais l'inconnue lui dit:

      —Venez, monsieur!

      Elle avait rabattu sur sa figure une épaisse voilette de blonde noire, et Paul ne pouvait pas voir si elle était jolie, mais la voix était douce, la tournure distinguée, la toilette élégante.

      C'était décidément la journée aux aventures.

      —Au rond-point des Champs-Élysées! reprit la dame.

      Paul Cormier tombait de son haut. Elle lui parlait comme elle aurait parlé à un de ces commissionnaires qui ouvrent, aux stations, les portières des fiacres.

      Il aurait dû la planter là, mais c'était si drôle qu'il se décida tout de suite à répéter au cocher l'ordre qu'elle venait de donner et à prendre place à côté d'elle dans la voiture.

      Le romanesque Paul aimait l'imprévu: il était servi à souhait.

      Mais il n'augurait pas très bien de cette nouvelle aventure.

      Il savait que les grandes mondaines n'ont pas coutume de se jeter ainsi à la tête d'un monsieur qu'elles n'ont jamais vu et il pensait que cette personne, un peu trop sans façon, pouvait bien n'être qu'une farceuse en quête d'une liaison passagère… et productive.

      Elle avait cependant si bon air qu'il voulait savoir à quoi s'en tenir sur ses intentions.

      Il lui restait tout le temps de faire avec elle, avant d'aller dîner au Marais, une promenade qui éclaircirait ce petit mystère, et rien ne l'empêcherait ensuite de fausser compagnie à la promeneuse, s'il s'apercevait qu'elle ne valait pas la peine d'être conquise.

      Elle ne le fit pas languir.

      Le fiacre commençait à peine à descendre la rue de Tournon et Paul en était encore à chercher une phrase pour entamer la conversation, quand elle releva sa voilette.

      Cette inconnue c'était la blonde aux yeux noirs que Jean de Mirande avait abordée si audacieusement et avec si peu de succès, sur la terrasse du jardin.

      Elle СКАЧАТЬ