Les vrais mystères de Paris. Eugène François Vidocq
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Название: Les vrais mystères de Paris

Автор: Eugène François Vidocq

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066080952

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СКАЧАТЬ lendemain faire un petit voyage, avait remis ses pistolets à son domestique, en lui ordonnant de les mettre en état, et celui-ci avait déchargé imprudemment ces armes dans le jardin, sur lequel donnait la fenêtre de la petite pièce dans laquelle se trouvaient alors les voleurs.

      Ceux-ci, en se sauvant, renversèrent presque le domestique qui, étonné de rencontrer au milieu de la nuit quatre individus dans le jardin de son maître, se mit sans hésiter à leur poursuite; il allait atteindre l'un d'eux, et les cris qu'il poussait allaient infailliblement amener du monde sur le lieu de la scène: le bandit se retourna l'attendit de pied ferme et lui porta en pleine poitrine un coup de poignard qui l'étendit sur le sol.

      Débarrassés du domestique, les voleurs, que rien ne vint plus contrarier dans leur fuite, purent quitter l'hôtel Carmagnola, et se disperser sans être davantage inquiétés.

      —Vous allez bien, mon cher, dit Duchemin à Salvador, lorsque tous deux se trouvèrent réunis devant un bon feu dans la chambre de l'hôtel de la Bonne-femme qu'ils habitaient, vous allez bien, c'est une justice à vous rendre; un homme blessé, tué peut-être.

      —Ne fallait-il pas me laisser prendre? répondit Salvador, je tuerais dix hommes plutôt que de faire connaissance avec les prisons italiennes.

      —Très-bien, mon cher élève. Un jour, je l'espère, vous surpasserez votre maître. Mais quels seront les résultats de tout ceci?

      —Nuls; ce domestique, s'il n'est pas mort, ne pourra reconnaître personne puisque, suivant notre coutume, nous étions masqués.

      Duchemin et Salvador en étaient là de leur conversation, lorsqu'un domestique de l'hôtel vint les prévenir qu'un inconnu désirait leur parler. Salvador répondit qu'on pouvait faire entrer.

      —Demandez des chevaux de poste et partez à l'instant même, leur dit celui qu'on avait introduit auprès d'eux, et qui n'était autre qu'un de ceux qui les avait aidés dans la tentative de vol qui venait d'échouer, partez, si vous ne voulez pas être arrêtés dans quelques heures. La rumeur publique, corroborée par les assertions du domestique que vous avez blessé et qui prétend avoir reconnu M. le vicomte de Lestang, vous accuse hautement.

      —Mais cela est impossible, s'écria Salvador, nous étions tous masqués.

      —Votre masque se sera dérangé; vous avez peut-être dit quelques mots; tout ce que je puis vous dire, c'est que vous êtes reconnus, que je suis certain de ce que j'avance, et que les gens de justice sont actuellement chez le banquier. Faites maintenant ce que vous voudrez.

      Salvador voulait rester et tenir tête à l'orage, mais Duchemin crut qu'il était plus sage de partir.

      —Lorsque l'on a du beurre sur la tête, dit-il à son compagnon, il ne faut pas aller au soleil; le beurre fond et tache[190].

      L'avis de Duchemin l'emporta, et quelques minutes après l'entretien que nous venons de rapporter, une voiture des frères Bonnafous emportait Salvador et ses deux compagnons.

      A peine rentrés en France, ils volèrent le receveur général du Var, à Draguignan, auquel ils enlevèrent une somme de près de 35,000 francs, avec des circonstances assez singulières, que nous rapporterons pour donner à nos lecteurs la mesure du caractère audacieux de Salvador et de ses complices.

      Salvador, en échangeant des espèces contre des mandats au porteur, sur divers receveurs généraux, mandats qui s'escomptent partout avec facilité, avait pu prendre toutes les empreintes qui étaient nécessaires; Duchemin, de son côté, qui de gouverneur du vicomte de Lestang était devenu son valet de chambre, avait si adroitement manœuvré, qu'il était parvenu à se lier avec le domestique de confiance du receveur-général.

      Ce domestique couchait dans la pièce où se trouvait la caisse. C'était un très-honnête garçon et Duchemin vit de suite qu'il ne fallait pas songer à le corrompre. L'attaquer, le mettre, non pas peut-être en quartiers, mais au moins dans l'impossibilité de s'opposer à la réussite de leur entreprise, Salvador et ses compagnons l'eussent fait volontiers, mais le domestique, semblable à ce chien dont parle le bon la Fontaine, était de taille à se vaillamment défendre. Duchemin avait donc cru devoir l'aborder très-humblement. Quelques bouteilles de vin de Jurançon, offertes à propos, délièrent la langue du domestique, qui raconta toute son histoire à Duchemin.

      Cette histoire était celle de tout le monde; cependant elle renfermait l'énonciation d'un fait dont Duchemin crut qu'il pourrait tirer parti. Le valet, dans le cours de sa narration, ayant parlé d'un vieux château, situé dans son pays, dans lequel, suivant lui, il revenait des esprits, Duchemin s'était mis à rire.

      —Si vous aviez vu, comme moi, ces esprits, vous n'auriez pas envie de rire, s'était écrié le domestique.

      —Vraiment, lui répondit Duchemin qui venait de concevoir les moyens de mener à bien l'entreprise qu'il méditait et avait repris son sérieux. Vraiment vous avez vu des esprits?

      —Comme je vous vois.

      Et le domestique raconta une de ces longues et lamentables chroniques qui se disent aux veillées.

      La nuit était venue, et Duchemin et le domestique qui s'étaient arrêtés dans une petite auberge des environs de Draguignan, songèrent à rentrer en ville. La journée avait été chaude, et à des certains intervalles des flammes du feu Saint-Elme, si commun dans le Midi, apparaissaient dans la campagne. Le domestique, encore sous l'impression du récit qu'il venait de faire, paraissait en proie à la plus vive frayeur.

      —J'ai toujours cru, disait-il en saisissant le bras de Duchemin, que ces petites flammes bleues étaient des âmes en peine.

      —Vous pourriez bien avoir raison, lui répondait celui-ci.

      Arrivés en ville ils se quittèrent.

      Salvador avait approuvé le projet qu'avait conçu Duchemin.

      Vêtus tous deux d'un costume complet de pénitent noir, ils s'introduisirent heureusement dans la pièce où couchait le domestique qui était comme nous l'avons dit, celle dans laquelle se trouvait la caisse. Leur compagnon faisait le guet.

      Le pauvre gardien dont les rêves retraçaient les images dont il s'était occupé toute la journée, s'étant éveillé fut saisi d'une telle frayeur à la vue des deux effroyables fantômes qui se trouvaient devant ses yeux, qu'il n'eut pas la force de jeter un seul cri. Salvador et Duchemin ne perdirent pas de temps; tandis que le premier ouvrait la caisse avec les fausses clés qu'ils avaient fabriquées, le second jetait de la poudre de Lycopode sur la flamme d'une petite bougie qu'il tenait à la main.

      Le malheureux domestique, qui se serait défendu avec courage s'il avait su avoir affaire à deux malfaiteurs, n'avait pas de force contre des esprits. Il perdit l'usage de ses sens.

      Salvador et Duchemin se retirèrent sans rencontrer d'obstacles; mais par une fatalité singulière, le lendemain du jour où fut commis ce vol, les deux amis furent arrêtés, par un gendarme intelligent, au moment où ils allaient monter en diligence.

      Traduits devant la cour d'assises d'Aix, ils furent condamnés tous deux à dix années de travaux forcés, et conduits au bagne de Toulon.

      Lorsqu'un voleur, qui durant le cours de sa carrière s'est fait connaître par quelques action d'éclat, arrive au bagne, il a le droit que personne ne songe à lui contester de СКАЧАТЬ