Название: La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits
Автор: Rosette
Издательство: Tektime S.r.l.s.
Жанр: Современная зарубежная литература
isbn: 9788873045106
isbn:
Le bruit de la pendule ne m’était guère agréable, il était un son strident, angoissant, vieux.
Sébastian se détacha de moi, le front plissé. “Je dois aller”.
Je sursautai, comme si j’avais été touchée par une balle. “Tu dois vraiment?”
“Je dois, Mélisande. Même les rêves ont une fin”. Dans ses mots soumis il y avait tristesse, à la saveur de l’adieu.
“Tu reviendras?” Je ne pouvais pas le laisser aller de cette façon, sans lutter.
Il m’étudia attentivement, comme il faisait toujours pendant le jour, dans la réalité. “Comme pourrai-je ne pas retourner, maintenant que tu as appris à rêver?”
Celle promesse poétique apaisa le battement du cœur, déjà irrégulier à l’idée de ne le voir plus. Pas comme ça, au moins.
Le rêve s’éteint, comme la petite flamme d’une bougie. Et ainsi la nuit.
La première chose que je vis, en ouvrant les yeux, fut le plafond aux poutres apparentes. Ensuite la fenêtre entrouverte pour le chaud.
J’avais rêvé pour la première fois.
Millicent Mc Millian me fit un sourire gentil, quand elle me vit apparaitre dans la cuisine. “Bonjour chérie. Tu as bien dormi?”
“Comme jamais dans ma vie” répondis-je laconique. Le cœur risquait d’exploser dans ma poitrine, au souvenir du protagoniste de mon rêve.
“J’en suis heureux” dit la gouvernante, sans savoir à quoi je faisais référence. Elle se lança dans une histoire détaillée de la journée passée au village. De la Messe, à la rencontre avec des gens dont les noms ne me disaient rien. Je la laissai parler comme toujours, l’esprit occupé en rêveries décidément plus agréables, les yeux toujours fixés sur l’horloge, dans l’attente fébrile de le revoir.
Il était enfantin de penser qu’il aurait été une journée différente, qu’il aurait eu un autre comportement. Il avait été un rêve, rien d’autre. Mais j’étais si inexperte sur l’argument, que j’avais l’illusion qu’il aurait pu avoir une suite dans la réalité.
Quand j’arrivais dans le bureau, il était en train d’ouvrir des lettres avec un coupe-papier en argent. Il souleva à peine son regard, à mon apparition.
“Une autre lettre de mon éditeur. J’ai éteint le portable justement pour ne devoir pas le supporter! Je déteste les gens sans fantaisie... Ils n’ont pas l’idée du monde d’un artiste, de ses temps, de ses espaces...” Son ton rude me reporta avec les pieds par terre. Aucun salut, aucune reconnaissance spéciale, aucun regard doux. Bon retour à la réalité, je me saluai moi-même. Quelle idiote à penser le contraire! Voilà parce que je n’étais jamais réussie à rêver avant. Parce que je ne croyais pas, je n’espérais pas, je n’osais pas. Je dois être de nouveau la Mélisande d’avant de celle maison, d’avant de celle rencontre, d’avant de l’illusion.
Mais peut-être je le rêverai encore. Ma pensée me réchauffa plus que le thé de Madame Mc Millian, ou du soleil aveuglant au-delà de la fenêtre.
“Eh bien? Qu’est-ce que vous faites, ne restez pas comme ça telle qu’une statue? Asseyez-vous, mince alors”.
Je m’assis face de lui, docilement, le reproche brulant sur la peau.
Il me passa la lettre avec un air sérieuse. “Ecrivez-lui. Dites-lui qu’il aura son manuscrit à la date prévue”.
“Vous êtes sûr d’y réussir? Je veux dire... Vous êtes en train de réécrire tout...”
Il réagit tout froissé à celle qu’il jugea une critique. “Ce sont mes jambes à être paralysées, pas le cerveau. J’ai eu un moment de crise. Finie. Définitivement”.
Je maintins un silence prudent pendant tout le matin, tandis que je le voyais appuyer sur le clavier de l’ordinateur avec une énergie insolite. Sébastian Mc Laine était si susceptible, lunatique et difficile. Facile même à détester, considérai-je, en l’étudiant en cachette. Il est même beau. Trop, et conscient de l’être. Cela le rendait doublement détestable. Dans mon rêve il avait apparu un être inexistant, la projection de mes désirs, et non pas un homme réel, en chair et en os. Le rêve avait été menteur, merveilleusement mensonger.
A un moment donné il m’indiqua les roses. “Change-les, s’il te plait. Je déteste de les voir se flétrir. Je les veux toujours fraiches”.
Je retrouvai la voix. “Je le fais tout de suite”.
“Et fais attention à ne pas te piquer cette fois”. La dureté de son ton m’abasourdit. Je n’étais jamais adéquatement préparée à ses éclats de colère fréquents, chargés de destruction.
Pour ne pas prendre des risques je pris le vase entier, et je descendis dessous. A moitié de l’escalier je rencontrai la gouvernante qui se dépêcha à m’aider. «Qu’est-ce qu’il s’est passé?”
“Il veut de roses nouvelles” expliquai-je avec le souffle court. “Il dit qu’il déteste les voir flétrir”.
La femme leva les yeux au ciel. “Chaque jour il invente une nouvelle requête”.
Nous portâmes le vase dans la cuisine, et ensuite elle alla à prendre des roses fraiches, rigoureusement rouges. Je me laissai tomber sur une chaise, comme si j’avais été contaminée par l’atmosphère lugubre de la maison. Je ne pouvais oublier le rêve de celle nuit, en partie parce qu’il était le premier de ma vie, et j’avais encore le frisson de la découverte, en partie parce qu’il avait été si vivide, douloureusement vivide. Le son de la pendule mi fit sursauter. Il était si terrorisant que je l’avais senti même dans mon rêve. Peut-être qu’il avait été ce détail à le rendre si réel.
Les larmes m’inondèrent les yeux, irréfrénables et impuissantes. Un sanglot m’échappa de la gueule, plus fort que mon fameux autocontrôle. La gouvernante me trouva juste dans cet état, quand elle rentra dans la cuisine. “Voilà les roses fraiches pour notre monsieur et patron” dit-elle heureusement. Donc elle s’aperçut de mes larmes, et porta les mains à la poitrine. “Mademoiselle Bruno! Qu’est-ce qu’il s’est passé? Etes-vous malade? Il est pour l’engueulade de Monsieur Mc Laine? Il est un farceur, ombrageux comme un ours, et adorable quand il se souvient de l’être…Ne vous préoccupez pas, quoi qu’il vous ait dit, il l’aura déjà oublié ”.
“C’est ça le problème” dis-je avec la voix larmoyante, mais elle n’entendit pas, telle qu’elle était déjà lancée dans ses discours.
“Je vous prépare du thé, vous fera bien. Je me souviens qu’une fois, dans la maison où je travaillais avant...”
Je supportai en silence son lourd baratin, en appréciant la tentative manquée de me distraire. Je sirotai la boisson chaude, faisant semblant de me sentir mieux, et refusai son offre d’aide. J’aurais porté moi-même les roses. La femme insista pour m’accompagner au moins jusqu’au palier, et face à sa prise de position gentille, je n’osai pas de refuser. Quand je revins dans le bureau, j’étais la même Mélisande, les yeux secs, le cœur en hibernation, l’esprit СКАЧАТЬ