Micah Clarke – Tome I. Les recrues de Monmouth. Артур Конан Дойл
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СКАЧАТЬ arriva au pont, tout était tranquille et silencieux.

      Il faisait très noir et très froid, car Noël approchait.

      Aucun indice ne décelait nos adversaires.

      On échangea quelques mots à voix basse, pour se demander qui ferait ce coup hardi, et comme j'avais trop d'orgueil pour proposer une chose que je n'oserais pas exécuter, je pris la scie.

      Je m'assis, jambe de çà jambe de là, sur la planche et l'attaquai à son centre même.

      Je me proposais d'en diminuer la résistance au point qu'elle pût encore porter le poids d'un corps, mais qu'elle se rompit au moment ou le gros de la troupe ennemie s'y engagerait de façon à les précipiter dans l'eau glacée du ruisseau.

      L'eau avait au plus deux pieds de profondeur, de sorte qu'ils en seraient quittes pour la peur et un plongeon.

      La fraîcheur de cet accueil les détournerait pour toujours de nous envahir et établirait ma réputation de chef audacieux.

      Ruben Lockarby, mon lieutenant, fils du père John Lockarby, qui tenait la Gerbe de blé, rangea nos forces derrière la haie pendant que je manœuvrais la scie avec vigueur et que je coupais presque entièrement la planche.

      Je n'éprouvais aucun remords en détruisant le pont, car je m'entendais assez en charpente pour savoir qu'un charpentier adroit le rétablirait en une heure de travail de telle sorte qu'il fût plus solide que jamais, en dressant un étai sous l'endroit où je l'avais scié.

      Lorsqu'enfin la courbure de la planche m'avertit que j'étais allé assez loin, et que la moindre tension la romprait d'un seul coup, je m'en allai en rampant, je pris mon poste parmi mes condisciples, et j'attendis l'arrivée de l'ennemi.

      À peine m'étais-je caché que j'entendis les pas de quelqu'un sur le sentier qui aboutissait au pont.

      On se courba derrière le rideau de la haie.

      Nous étions convaincus que ce bruit venait d'un éclaireur que nos adversaires avaient dépêché en avant.

      C'était évidemment un gros gaillard, car son pas était pesant et lent, et il s'y mêlait un tintement métallique auquel nous ne comprenions rien.

      Le bruit se rapprocha et nous finîmes par apercevoir une vague silhouette sortir de l'obscurité sur l'autre bord.

      Elle s'arrêta un instant pour épier aux alentours.

      Puis elle se dirigea vers le pont.

      Ce fut seulement quand le personnage mit le pied sur le pont, et s'avança avec précaution pour le traverser, que nous distinguâmes des contours qui nous étaient familiers.

      Alors nous comprimes la terrible vérité.

      L'individu que nous avions pris pour l'avant-garde ennemie n'était rien moins que le curé Pinfold, et c'était la chute rythmée du bout de sa canne que nous avions entendu entre chacun de ses pas.

      Paralysé par cette vue, nous restâmes là sans pouvoir l'avertir.

      Nous n'étions plus qu'une rangée de prunelles immobiles.

      L'orgueilleux ecclésiastique fit un premier pas, un second, un troisième.

      Alors on entendit un craquement sonore, et il disparut au milieu d'un vaste éclaboussement dans le ruisseau au cours rapide.

      Il avait dû choir sur le dos, car nous distinguions au-dessus de la surface la courbe de son ventre majestueux, pendant qu'il se démenait désespérément pour se remettre sur ses pieds. Il parvint enfin à se redresser, et grimpa sur le bord pour se secouer tout en lâchant une bordée d'exclamations pieuses et de jurons profanes qui nous fit éclater de rire malgré notre frayeur.

      Nous partîmes sous ses pieds comme une couvée de perdreaux.

      Nous gagnâmes au large dans la campagne et rentrâmes dans l'école. Comme vous le pensez bien, nous ne dîmes rien de ce qui s'était passé à notre bon maître.

      Mais l'affaire était trop sérieuse pour qu'il fût possible de l'étouffer.

      Le brusque refroidissement fit tourner en quelque sorte la bouteille de vin du Rhin que le curé venait de boire avec le secrétaire de la ville, et il eut une attaque de goutte qui le mit sur le dos pendant une quinzaine de jours.

      Pendant ce temps-là, un examen du pont fit reconnaître qu'il avait été scié et une enquête amena à découvrir le rôle en cette histoire des pensionnaires de Mr Chillingworth.

      Pour éviter à l'école une expulsion en masse de la ville, je me vis dans la nécessité de me reconnaître à la fois l'inventeur et l'instrument de l'exploit.

      Chillingworth était entièrement à la discrétion du curé.

      Il fut donc forcé de m'adresser en public une longue homélie – qu'il compensa par des paroles bienveillantes quand il me dit adieu en particulier – et il dut me renvoyer solennellement de l'école.

      Jamais je n'ai revu mon vieux maître, car il mourut peu d'années après, mais j'ai appris que son second fils William dirige encore l'école qui est plus florissante que jamais.

      Son fils aîné se fit Quaker et partit pour la colonie de Penn, où, parait-il, il fut massacré par les sauvages.

      Cette aventure fit grand-peine à ma mère, mais elle fut très bien vue de mon père.

      Il en rit au point qu'on entendit dans tout le village les éclats de sa gaieté de Stentor.

      Elle lui rappelait, disait-il, un stratagème analogue, qu'avait employé à Market-Drayton ce pieux serviteur de Dieu, le colonel Pride, et qui eut pour résultat la noyade d'un capitaine et de trois soldats du régiment de cavalerie de Lunsford, à la grande gloire de la véritable Église, et pour la satisfaction du peuple élu.

      Même parmi les partisans de l'Église, plus d'un se réjouit en secret de la mésaventure du curé que ses prétentions et son orgueil avaient rendu odieux dans tout le pays.

      En ce temps-là, j'étais devenu un garçon solide, aux larges épaules.

      Chaque mois ajoutait à ma force et à ma taille.

      À l'âge de seize ans, j'étais capable de porter un sac de farine ou un baril de bière aussi loin qu'aucun homme du village, et de lancer le disque de pierre de quinze livres à la distance de trente-six pieds, c'est-à-dire quatre pieds de plus que Ted Dawson, le forgeron.

      Un jour, mon père ne venant pas à bout de porter hors de la cour un ballot de peaux, je l'enlevai d'un coup et le transportai sur mes épaules.

      Le vieillard me regardait souvent d'un air grave par-dessous ses sourcils épais et saillants, et hochait sa tête grisonnante, quand il était assis dans son fauteuil, à fumer sa pipe.

      – Vous devenez trop gros pour votre nid, mon garçon, me disait-il parfois. Je me demande si un de ses jours les ailes ne vont pas vous pousser et vous emporter loin d'ici.

      Au fond du cœur, je soupirais après cette occasion, car je m'ennuyais de la vie paisible du village.

      J'avais grande envie de voir ce vaste univers СКАЧАТЬ