David Copperfield – Tome II. Чарльз Диккенс
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СКАЧАТЬ désordre pour le moment, grâce à M. Jack Maldon qui lui avait offert dernièrement ses services comme secrétaire, et qui n'avait pas l'habitude de cette occupation; mais nous aurions bientôt remis tout cela en état, et nous marcherions rondement. Je trouvai plus tard, quand nous fûmes tout de bon à l'oeuvre, que les efforts de M. Jack Maldon me donnaient plus de peine que je ne m'y étais attendu, vu qu'il ne s'était pas borné à faire de nombreuses méprises, mais qu'il avait dessiné tant de soldats et de têtes de femmes sur les manuscrits du docteur, que je me trouvais parfois plongé dans un dédale inextricable.

      Le docteur était enchanté de la perspective de m'avoir pour collaborateur de son fameux ouvrage, et il fut convenu que nous commencerions dès le lendemain à sept heures. Nous devions travailler deux heures tous les matins et deux ou trois heures tous les soirs, excepté le samedi qui serait un jour de congé pour moi. Je devais naturellement me reposer aussi le dimanche; la besogne n'était donc pas bien pénible.

      Nos arrangements faits ainsi, à notre mutuelle satisfaction, le docteur m'emmena dans la maison pour me présenter à mistress Strong que je trouvai dans le nouveau cabinet de son mari, occupée à épousseter ses livres, liberté qu'il ne permettait qu'à elle de prendre avec ces précieux favoris.

      Ils avaient retardé leur déjeuner pour moi, et nous nous mîmes à table ensemble. Nous venions à peine d'y prendre place quand je devinai, d'après la figure de mistress Strong, qu'il allait venir quelqu'un, avant même d'entendre aucun bruit qui annonçât l'approche d'un visiteur. Un monsieur à cheval arriva à la grille, fit entrer son cheval par la bride, dans la petite cour, comme s'il était chez lui, l'attacha à un anneau sous la remise vide, et entra dans la salle à manger, son fouet à la main. C'était M. Jack Maldon, et je trouvai que M. Jack Maldon n'avait rien gagné à son voyage aux Indes. Il est vrai de dire que j'étais d'une humeur vertueuse et farouche contre tous les jeunes gens qui n'abattaient pas des arbres dans la forêt des difficultés, de sorte qu'il faut faire la part de ces impressions peu bienveillantes.

      «Monsieur Jack, dit le docteur, je vous présente Copperfield!»

      M. Jack Maldon me donna une poignée de main, un peu froidement à ce qu'il me sembla, et d'un air de protection languissante qui me choqua fort en secret. Du reste, son air de langueur était curieux à voir, excepté pourtant quand il parlait à sa cousine Annie.

      «Avez-vous déjeuné, monsieur Jack? dit le docteur.

      – Je ne déjeune presque jamais, monsieur, répliqua-t-il en laissant aller sa tête sur le dossier de son fauteuil. Cela m'ennuie.

      – Y a-t-il des nouvelles aujourd'hui? demanda le docteur.

      – Rien du tout, monsieur, repartit M. Maldon. Quelques histoires de gens qui meurent de faim en Écosse, et qui sont assez mécontents. Mais il y a toujours de ces gens qui meurent de faim et qui ne sont jamais contents.»

      Le docteur lui dit d'un air grave et pour changer de conversation:

      «Alors il n'y a pas de nouvelles du tout? Eh bien! pas de nouvelles, bonnes nouvelles, comme on dit.

      – Il y a une grande histoire dans les journaux à propos d'un meurtre, monsieur, reprit M. Maldon, mais il y a tous les jours des gens assassinés, et je ne l'ai pas lu.»

      On ne regardait pas dans ce temps-là une indifférence affectée pour toutes les notions et les passions de l'humanité comme une aussi grande preuve d'élégance qu'on l'a fait plus tard. J'ai vu, depuis, ces maximes-là très à la mode. Je les ai vu pratiquer avec un tel succès que j'ai rencontré de beaux messieurs et de belles dames, qui, pour l'intérêt qu'ils prenaient au genre humain, auraient aussi bien fait de naître chenilles. Peut-être l'impression que me fit alors M. Maldon ne fut-elle si vive que parce qu'elle m'était nouvelle, mais je sais que cela ne contribua pas à le rehausser dans mon estime, ni dans ma confiance.

      «Je venais savoir si Annie voulait aller ce soir à l'Opéra, dit M. Maldon en se tournant vers elle. C'est la dernière représentation de la saison qui en vaille la peine, et il y a une cantatrice qu'elle ne peut pas se dispenser d'entendre. C'est une femme qui chante d'une manière ravissante, sans compter qu'elle est d'une laideur délicieuse.»

      Là-dessus il retomba dans sa langueur.

      Le docteur, toujours enchanté de ce qui pouvait être agréable à sa jeune femme, se tourna vers elle et lui dit:

      «Il faut y aller, Annie, il faut y aller.

      – Non, je vous en prie, dit-elle au docteur. J'aime mieux rester à la maison. J'aime beaucoup mieux rester à la maison.»

      Et sans regarder son cousin, elle m'adressa la parole, me demanda des nouvelles d'Agnès, s'informa si elle ne viendrait pas la voir; s'il n'était pas probable qu'elle vint dans la journée; le tout d'un air si troublé que je me demandais comment il se faisait que le docteur lui-même, occupé pour le moment à étaler du beurre sur son pain grillé, ne voyait pas une chose qui sautait aux yeux.

      Mais il ne voyait rien. Il lui dit en riant qu'elle était jeune, et qu'il fallait qu'elle s'amusât, au lieu de s'ennuyer avec un vieux bonhomme comme lui. D'ailleurs, disait-il, il comptait sur elle pour lui chanter tous les airs de la nouvelle cantatrice, et comment s'en tirerait-elle si elle n'allait pas l'entendre? Le docteur persista donc à arranger la soirée pour elle. M. Jack Maldon devait revenir dîner à Highgate. Ceci conclu, il retourna à sa sinécure, je suppose, mais en tout cas il s'en alla à cheval, sans se presser.

      J'étais curieux, le lendemain matin, de savoir si elle était allée à l'Opéra. Elle n'y avait pas été, elle avait envoyé à Londres pour se dégager auprès de son cousin, et, dans la journée, elle avait fait visite à Agnès. Elle avait persuadé au docteur de l'accompagner, et ils étaient revenus à pied à travers champs, à ce qu'il me raconta lui-même, par une soirée magnifique. Je me dis à part moi qu'elle n'aurait peut-être pas manqué le spectacle, si Agnès n'avait pas été à Londres; Agnès était bien capable d'exercer aussi sur elle une heureuse influence!

      On ne pouvait pas dire qu'elle eût l'air très-enchanté, mais enfin elle paraissait satisfaite, ou sa physionomie était donc bien trompeuse. Je la regardais souvent, car elle était assise près de la fenêtre pendant que nous étions à l'ouvrage, et elle préparait notre déjeuner que nous mangions tous en travaillant. Quand je partis à neuf heures, elle était à genoux aux pieds du docteur, pour lui mettre ses souliers et ses guêtres. Les feuilles de quelques plantes grimpantes qui croissaient près de la fenêtre jetaient de l'ombre sur son visage, et je pensai tout le long du chemin, en me rendant à la Cour, à cette soirée où je l'avais vue regarder son mari pendant qu'il lisait.

      J'avais donc maintenant fort affaire: j'étais sur pied à cinq heures du matin, et je ne rentrais qu'à neuf ou dix heures du soir. Mais j'avais un plaisir infini à me trouver à la tête de tant de besogne, et je ne marchais jamais lentement; il me semblait que plus je me fatiguais, plus je faisais d'efforts pour mériter Dora. Elle ne m'avait pas encore vu dans cette nouvelle phase de mon caractère, parce qu'elle devait venir chez miss Mills prochainement; j'avais retardé jusqu'à ce moment tout ce que j'avais à lui apprendre, me bornant à lui dire dans mes lettres, qui passaient toutes secrètement par les mains de miss Mills, que j'avais beaucoup de choses à lui conter. En attendant, j'avais fort réduit ma consommation de graisse d'ours; j'avais absolument renoncé au savon parfumé et à l'eau de lavande, et j'avais vendu avec une perte énorme, trois gilets que je regardais comme trop élégants pour une vie aussi austère que la mienne.

      Je n'étais pas encore satisfait: je brûlais de faire plus encore, et j'allai voir Traddles qui demeurait pour le moment sur le derrière d'une maison de Castle-Street-Holborn. J'emmenai avec moi M. Dick, qui m'avait déjà accompagné deux fois à Highgate et qui СКАЧАТЬ