Название: Jim Harrison, boxeur
Автор: Артур Конан Дойл
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
isbn:
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Ils poussaient des hurlements de satisfaction et lui jetaient à grands cris des phrases, des conseils.
– Secouez-lui un peu sa suie, Lord Frederick, criaient-ils. Servez-lui son déjeuner à ce Jeannot-tout-cru. Roulez-le dans son tas de cendre. Et dépêchez-vous, sans quoi vous allez voir son dos.
Encouragé par ces clameurs, le jeune patricien s'avança vers son homme.
Le forgeron ne bougea pas, mais ses lèvres se contractèrent avec une expression farouche pendant que ses gros sourcils s'abaissaient sur ses yeux perçants et gris.
Il avait lâché les tenailles et les bras libres étaient ballants.
– Faites attention, mon maître, dit-il. Sans cela vous allez vous faire poivrer.
Il y avait dans cette voix un ton d'assurance, il y avait dans cette attitude une fermeté calme, qui firent deviner le danger au jeune Lord.
Je le vis examiner son antagoniste attentivement et aussitôt ses mains tombèrent, sa figure s'allongea.
– Pardieu! s'écria-t-il, c'est Jack Harrison.
– Lui-même, mon maître.
– Ah! je croyais avoir affaire à quelque mangeur de lard du comté d'Essex. Eh! eh! mon homme, je ne vous ai pas revu depuis le jour où vous avez presque tué Baruch le noir, ce qui m'a coûté cent bonnes livres.
Quels hurlements poussait-on sur la voiture!
– Kiss! Kiss! Par Dieu! criaient-ils, c'est Jack Harrison l'assommeur. Lord Frederick était sur le point de s'en prendre à l'ex-champion. Flanquez-lui un coup sur le tablier, Fred, et voyons ce qui arrivera.
Mais le conducteur était déjà remonté sur son siège et riait plus fort que tous ses camarades.
– Nous vous laissons aller pour cette fois, Harrison, dit-il.
Sont-ce là vos fils?
– Celui-ci est mon neveu, maître.
– Voici une guinée pour lui. Il ne pourra pas dire que je l'aie privé de son oncle.
Et ayant mis ainsi les rieurs de son côté par la façon gaie de prendre les choses, il fit claquer son fouet et l'on partit à fond de train pour faire en moins de cinq heures le trajet de Londres, tandis que Harrison, son fer non achevé à la main, rentrait chez lui en sifflant.
II – LE PROMENEUR DE LA FALAISE ROYALE
Tel était donc le champion Harrison.
Il faut maintenant que je dise quelques mots du petit Jim, non seulement parce qu'il fut mon compagnon de jeunesse, mais parce qu'en avançant dans la lecture de ce livre, vous vous apercevrez que c'est son histoire encore plus que la mienne et qu'il arriva un temps où son nom et sa réputation furent sur les lèvres de tout le peuple anglais.
Vous prendrez donc votre parti de m'entendre vous exposer son caractère, tel qu'il était à cette époque, et particulièrement vous raconter une aventure très singulière qui n'est pas de nature à s'effacer jamais de notre mémoire à tous deux.
On était bien surpris en voyant Jim avec son oncle et sa tante, car il avait l'air d'appartenir à une race, à une famille bien différentes de la leur.
Souvent, je les ai suivis des yeux quand ils longeaient les bas- côtés de l'église le dimanche, tout d'abord l'homme aux épaules carrées, aux formes trapues, puis la petite femme à la physionomie et aux regards soucieux et enfin ce bel adolescent aux traits accentués, aux boucles noires, dont le pas était si élastique et si léger qu'il ne paraissait tenir à la terre que par un lien plus mince que les villageois à la lourde allure dont il était entouré.
Il n'avait point encore atteint ses six pieds de hauteur, mais pour peu qu'on se connût en hommes (et toutes les femmes au moins s'y entendent) il était impossible de voir ses épaules parfaites, ses hanches étroites, sa tête fière posée sur son cou, comme un aigle sur son perchoir, sans éprouver cette joie tranquille que nous donnent toutes les belles choses de la nature, cette sorte de satisfaction de soi que l'on ressent, en leur présence, comme si l'on avait contribué à leur création.
Mais nous avons l'habitude d'associer la beauté chez un homme avec la mollesse.
Je ne vois aucune raison à cette association d'idées; en tout cas, la mollesse n'apparut jamais chez Jim.
De tous les hommes que j'ai connus, il n'en est aucun dont le coeur et l'esprit rappelassent davantage la dureté du fer.
En était-il un seul parmi nous qui fût capable d'aller de son pas ou de le suivre, soit à la course, soit à la nage?
Qui donc, dans toute la campagne des environs, aurait osé se pencher par-dessus l'escarpement de Wolstonbury et descendre jusqu'à cent pieds du bord, pendant que la femelle du faucon battait des ailes à ses oreilles, en de vains efforts, pour l'écarter de son nid.
Il n'avait que seize ans et ses cartilages ne s'étaient pas encore ossifiés, quand il se battit victorieusement avec Lee le Gypsy, de Burgess Hill, qui s'était donné le surnom de Coq des dunes du sud.
Ce fut après cela que le champion Harrison entreprit de lui donner des leçons régulières de boxe.
– J'aimerais autant que vous renonciez à la boxe, petit Jim, dit- il, et madame est de mon avis, mais puisque vous tenez à mordre, ce ne sera pas ma faute si vous ne devenez pas capable de tenir tête à n'importe qui du pays du sud.
Et il ne mit pas longtemps à tenir sa promesse.
J'ai déjà dit que le petit Jim n'aimait guère ses livres, mais par là j'entendais des livres d'école, car dès qu'il s'agissait de romans de n'importe quel sujet qui touchait de près ou de loin aux aventures, à la galanterie, il était impossible de l'en arracher, avant qu'il eût fini.
Lorsqu'un livre de cette sorte lui tombait entre les mains, Friar's Oak et la forge n'étaient plus pour lui qu'un rêve et sa vie se passait à parcourir l'Océan, à errer sur les vastes continents, en compagnie des héros du romancier.
Et il m'entraînait à partager ses enthousiasmes, si bien que je fus heureux de me faire le Vendredi de ce Crusoé, quand il décida que le petit bois de Clayton était une île déserte et que nous y étions jetés pour une semaine.
Mais lorsque je m'aperçus qu'il s'agissait de coucher en plein air, sans abri, toutes les nuits, et qu'il proposa de nous nourrir de moutons des dunes, (de chèvres sauvages, ainsi qu'il les dénommait) en les faisant cuire sur du feu que l'on obtiendrait par le frottement de deux bâtons, le coeur me manqua et je retournai auprès de ma mère.
Quant à Jim, il tint bon pendant toute une longue et maussade semaine, et au bout de ce temps, il revint l'air plus sauvage et plus sale que son héros, tel qu'on le voit dans les livres à images.
Heureusement, il n'avait parlé que de tenir une semaine, car s'il s'était agi d'un mois, il serait mort de froid et de faim, avant que son orgueil lui permît de retourner à la maison.
L'orgueil! C'était là le fond de la nature de Jim. À mes yeux, c'était un attribut mixte, moitié vertu, moitié vice. Une vertu, en ce qu'il maintient un homme au-dessus de la fange, un vice, en ce qu'il lui СКАЧАТЬ