Valvèdre. Жорж Санд
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Читать онлайн книгу Valvèdre - Жорж Санд страница 8

Название: Valvèdre

Автор: Жорж Санд

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ style="font-size:15px;">      – Oui, j'aime de toute mon âme, s'écria-t-il, et tu comprends mon silence! A présent, parlons raison. Cette arrivée imprévue, qui me comble de joie, me cause aussi de l'inquiétude. Avec les caprices de… certaines personnes… ou de la destinée…

      – Dis les caprices de madame de Valvèdre. Tu crains de sa part quelque obstacle à ton bonheur?

      – Des obstacles, non! mais… des influences… Je ne plais pas beaucoup à la belle Alida!

      – Elle s'appelle Alida? C'est recherché, mais c'est joli, plus joli qu'elle! Je n'ai pas été émerveillé du tout de sa figure.

      – Bien, bien, n'importe… Mais, dis-moi, puisque tu l'as vue, sais-tu ce qu'elle vient faire ici?

      – Et comment diable veux-tu que je le sache? J'ai cru comprendre qu'une vive inquiétude conjugale…

      – Madame de Valvèdre inquiète de son mari?.. Elle ne l'est pas ordinairement; elle est si habituée…

      – Mais mademoiselle Paule?

      – Oh! elle adore son frère, elle; mais ce n'est certainement pas son ascendant qui a pu agir en quoi que ce soit sur sa belle-soeur. Toutes deux savent, d'ailleurs, que Valvèdre n'aime pas qu'on le suive et qu'on le tiraille pour le déranger de ses travaux. Il doit y avoir quelque chose là-dessous, et je cours m'en informer, s'il est possible de le savoir.

      Moi, je courus m'habiller, espérant que les voyageuses dîneraient dans la salle commune; mais elles n'y parurent pas. On les servit dans leur appartenant, et elles y retinrent Obernay. Je ne le revis qu'à la nuit close.

      – Je te cherche, me dit-il, pour te présenter à ces dames. On m'a chargé de t'inviter à prendre le thé chez elles. C'est une petite solennité; car, de la terrasse, nous verrons, à neuf heures, partir de la montagne une ou plusieurs fusées qui seront, de la part de Valvèdre, un avis télégraphique dont j'ai la clef.

      – Mais la cause de l'arrivée de ces dames? Je ne suis pas curieux, pourtant je désire bien apprendre que ce n'est pas pour toi un motif de chagrin ou de crainte.

      – Non, Dieu merci! Cette cause reste mystérieuse. Paule croit que sa belle-soeur était réellement inquiète de Valvèdre. Je ne suis pas aussi candide; mais Alida est charmante avec moi, et je suis rassuré. Viens.

      Madame de Valvèdre s'était emparée du logement de son mari, qui était assez vaste, eu égard aux proportions du chalet. Il se composait de trois chambres dans l'une desquelles Paule préparait le thé en nous attendant. Elle était si peu coquette, qu'elle avait gardé sa robe de voyage toute fripée et ses cheveux dénoués et en désordre sous son chapeau de paille. C'était peut-être un sacrifice qu'elle avait fait à Obernay de rester ainsi, pour ne pas perdre un seul des instants qu'ils pouvaient passer ensemble. Pourtant je trouvai qu'elle acceptait trop bien cet abandon de sa personne, et je pensai tout de suite qu'elle n'était pas assez femme pour devenir autre chose que la femme d'un savant. J'en félicitai Obernay dans mon coeur; mais tout sentiment d'envie ou de regret personnel fit place à une franche sympathie pour la bonté et la raison dont sa future était douée.

      Madame de Valvèdre n'était pas là. Elle resta dans sa chambre jusqu'au moment où Paule frappa à la porte en lui criant que c'était bientôt l'heure du signal. Elle sortit alors de ce sanctuaire, et je vis qu'elle avait endossé un délicieux négligé. Ce n'était peut-être pas bien conforme aux agitations d'esprit qu'elle affichait; mais, si par hasard elle avait fait cette toilette à mon intention, pouvais-je ne pas lui en savoir gré?

      Elle m'apparut tellement différente de ce qu'elle m'avait semblé sur le sentier de la montagne, que, si je l'eusse revue ailleurs que chez elle, j'eusse hésité à la reconnaître. Perchée sur son mulet et drapée dans son burnous, je l'avais imaginée grande et forte; elle était, en réalité, petite et délicate. Animée par la chaleur, sous le reflet de son ombrelle, elle m'avait paru rouge et comme marbrée de tons violacés. Elle était pâle et de la carnation la plus fine et la plus lisse. Ses traits étaient charmants, et toute sa personne avait, comme sa mise, une exquise distinction.

      J'eus à peine le temps de la regarder et de la saluer. L'heure approchait, et l'on se précipitait sur le balcon. Elle s'y plaça la dernière, sur un siège que je lui présentai, et, m'adressant la parole avec douceur:

      – Il me semble, dit-elle, que les premiers gîtes de ceux qui entreprennent de semblables courses n'ont rien d'inquiétant.

      – En effet, répondit Obernay, ce gîte est un trou dans le rocher, avec quelques pierres alentour. On n'y est pas trop bien, mais on y est en sûreté. Attention cependant! Voici les cinq minutes écoulées…

      – Où faut-il regarder? demanda vivement mademoiselle de Valvèdre.

      – Où je vous ai dit. Et pourtant… non! voici la fusée blanche. C'est de beaucoup plus haut qu'elle part. Il aura dédaigné l'étape marquée par les guides. Il est sur les grands plateaux, si je ne me trompe.

      – Mais les grands plateaux ne sont-ils pas des plaines de neige?

      – Permettez… Seconde fusée blanche!.. La neige est dure, et il a installé sa tente sans difficulté… Troisième fusée blanche! Ses instruments ont bien supporté le voyage, rien n'est cassé ni endommagé. Bravo!

      – Dès lors il passera une meilleure nuit que nous, dit madame de Valvèdre; car ses instruments sont ce qu'il a de plus cher au monde.

      – Pourquoi, madame, ne dormiriez-vous pas tranquille? me hasardai-je à dire à mon tour. M. de Valvèdre est si bien prémuni contre le froid; il a une telle expérience de ces sortes d'aventures…

      Madame de Valvèdre sourit imperceptiblement, soit pour me remercier de mes consolations, soit pour les dédaigner, soit encore parce qu'elle me trouvait bien naïf de croire qu'un mari comme le sien pût être la cause de ses insomnies. Elle quitta le balcon où Obernay, n'attendant plus d'autre signal, restait à parler de Valvèdre avec Paule, et, comme je suivais Alida auprès de la table à thé, je fus encore une fois très indécis sur le charme de sa physionomie. Il sembla qu'elle devinait mon incertitude, car elle s'étendit nonchalamment sur une sorte de chaise longue assez basse, et je pus la voir enfin, éclairée en entier par la lampe placée sur la table.

      Je la contemplais depuis un instant sans parler, et légèrement troublé, lorsqu'elle leva lentement ses yeux sur les miens, comme pour me dire: «Eh bien, vous décidez-vous enfin à voir que je suis la plus parfaite créature que vous ayez jamais rencontrée?» Ce regard de femme fut si expressif, que je le sentis passer en moi, de la tête aux pieds, comme un frisson brûlant, et que je m'écriai éperdu:

      – Oui, madame, oui!

      Elle vit à quel point j'étais jeune et ne s'en offensa point; car elle me demanda avec un étonnement peu marqué à quoi je répondais.

      – Pardon, madame, j'ai cru que vous me parliez!

      – Mais pas du tout. Je ne vous disais rien!

      Et un second regard, plus long et plus pénétrant que le premier, acheva de me bouleverser, car il m'interrogeait jusqu'au fond de l'âme.

      A ceux qui n'ont pas rencontré le regard de cette femme, je ne pourrai jamais faire comprendre quelle était sa puissance mystérieuse. L'oeil, extraordinairement long, clair et bordé de cils sombres qui le détachaient du plan de la joue par une ombre changeante, n'était ni bleu, ni noir, ni verdâtre, ni orangé. Il était СКАЧАТЬ