Correspondance, 1812-1876 — Tome 5. Жорж Санд
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Correspondance, 1812-1876 — Tome 5 - Жорж Санд страница 13

Название: Correspondance, 1812-1876 — Tome 5

Автор: Жорж Санд

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

Серия:

isbn:

isbn:

СКАЧАТЬ dans ma vie, qui offre le moindre intérêt de nouveauté et de curiosité au public parisien.

       GEORGE SAND

      DLXXXIII

      A M. ARMAND BARBES, A LA HAYE

      Palaiseau, 15 janvier 1865.

      Cher ami, Combien je suis touchée de tout ce que vous m'écrivez! Vos souffrances, votre courage invincible, votre affection pour moi, voilà bien des sujets de douleur et de joie. Vous vous êtes cramponné à l'exil, et il a bien fallu vous admirer, malgré les prières et les regrets.

      Mais, si vous avez eu un moment de santé suffisante, comme Nadar me le disait, pourquoi n'en avoir pas profité pour chercher, ne fût-ce que momentanément, un climat meilleur pour vous? Vous parlez si peu de vous-même, vous faites si bon marché de votre mal, qu'on ne sait pas ce qui peut l'alléger.

      Pour ma part, j'ai une foi, c'est qu'il n'y a pas de maladies incurables. La médecine avancée commence à le croire; moi, je l'ai toujours cru, et je me dis que c'est un devoir envers l'avenir, envers l'humanité, de vouloir guérir. J'ai eu, il y a quatre ans, une fièvre typhoïde: il m'est resté une maladie de l'estomac qui a duré trois ans et qui était qualifiée de chronique. M'en voilà guérie, mais aussi je l'ai voulu.

      Et, pourtant, croyez bien que je pourrais dire avec vous: Ma vie a été triste! Elle a été, elle sera toujours pleine d'atroces déchirements, et mon fonds de gaieté intérieure ne me préserve pas des accablements complets. J'ai perdu, l'été dernier, mon petit Marc, l'enfant de Maurice et de sa gentille compagne, la fille de Calamatta. Le pauvre petit avait un an, il était né le 14 juillet; le jour de son premier anniversaire, son agonie a commencé. Il était joli et intelligent déjà. Quelle douleur! nous n'en sommes pas encore revenus; et, pourtant, je demande, je commande un autre enfant; car il faut aimer, il faut souffrir, il faut pleurer, espérer, créer, être; il faut vouloir enfin, dans tous les sens, divin et naturel. Mes pauvres enfants ne me répondent encore que par des larmes; ils ont trop aimé ce premier enfant, ils craignent de ne pas aimer le second; ce qui prouve, hélas! qu'ils l'aimeront trop encore! mais peut-on se dire qu'on limitera les élans du coeur et des entrailles?

      Vous me dites, ami, que vous me comparez quelquefois à la France; je sens du moins que je suis Française, à cette conviction souveraine, qu'il ne faut pas compter les chutes, les blessures, les vains espoirs, les cruels écrasements de la pensée, mais qu'il faut toujours se relever, ramasser, rassembler les lambeaux de son coeur accrochés à toutes les ronces du chemin, et aller toujours à Dieu avec ce sanglant trophée.

      Me voilà loin de mon sermon sur la santé; pourtant, j'y reviens naturellement. Votre vie est précieuse, quelque brisée ou déchirée qu'elle soit. Faites donc tout au monde pour nous la garder.

      Adieu, ami; je vous aime. Maurice aussi, lui!

       GEORGE SAND.

      DLXXXIV

      A SON ALTESSE LE PRINCE NAPOLÉON (JEROME) A PARIS

      Palaiseau, 7 février 1865.

      Voilà votre victoire annoncée dans les journaux, mon grand ami! C'est un beau soleil d'Austerlitz que ce jour brumeux de février. Il ne fera pas brailler tant de trompettes, mais on en célébrera plus longtemps l'anniversaire. C'est votre oeuvre, on le saura et on s'en souviendra. Moi, je n'oublierai pas que vous avez passé avec nous, dans un petit coin, la soirée après ce beau combat, et, en vous écoutant, j'aurais oublié les heures; je crains que nous n'ayons abusé de votre bonté, nous qui n'avons rien de mieux à faire que de vous entendre, tandis que, vous, vous avez tant de grandes et bonnes choses à accomplir.

      Le bonheur est une abstraction en même temps qu'une réalité, quoi qu'en disent les philosophes. Durable et certain à l'état d'idéal pour qui en connaît la vraie et haute nature, il est momentané et puissant à l'état de réalité, quand les faits servent l'idéal. Donc, portant en vous la vraie notion du bonheur, qui est de le répandre et de le donner, vous en savourez quelquefois la sensation, quand les faits obéissent à votre ardente et généreuse volonté.

      Soyez donc heureux, puisque le bonheur est une conquête et que vous venez de gagner une belle bataille. Les jours de dégoût et de fatigue reviendront. Le bonheur à l'état de réalité complète n'est pas une chose permanente pour l'homme; mais il vous restera à l'état d'idéal, augmenté du souvenir des victoires; et la morale de ceci est qu'il faut combattre toujours pour augmenter votre trésor de force et de foi. La reconnaissance des hommes, ce qu'on appelle la gloire n'est qu'une conséquence, un accessoire peut-être! vous l'aurez. Mais votre but est plus élevé. Vous n'êtes pas pour rien de la race ambitieuse du bien, qui lutte en ce siècle contre la race ambitieuse d'argent. Vous avez des forces à dépenser, c'est déjà un bonheur que d'être riche en ce sens-là.

      J'ai reçu vos invitations en règle; merci de votre bon souvenir. Mais me voilà au coin du feu avec la grippe, et, pour quelques jours, je lutterai sans grand effort contre la fièvre.

      Ce ne sera rien; je penserai à vous et je parlerai de vous, ayant auprès de moi quelqu'un qui ne demande que cela.

      Avez-vous pensé, en vous en allant tout seul, à pied, depuis le Panthéon, les mains dans vos poches, au clair de la lune, que, dans cent ans d'ici, la France, le monde par conséquent vivrait, grâce à vous, d'une autre vie?

      Du haut du Panthéon quelque chose a dû vous parler et vous crier:

      «Marche!»

      A vous de coeur toujours et toujours plus.

       G. SAND.

      DLXXXV

      AU MÊME

      Palaiseau, 9 mars 1865.

      Cher prince, vous me disiez bien que rien n'était fait puisqu'il y avait encore à faire. Le désaveu de M. Duruy et de votre généreuse inspiration ne vous surprend peut-être pas; mais il doit vous fâcher. Moi, Je n'en suis pas contente, oh! non. Mais c'est partie remise, j'espère, et vous emporterez d'assaut la citadelle à la première occasion. Il y a là une belle question à plaider devant le pays. Vous la plaiderez, n'est-ce pas?

      Je ne sais pas si on vous a envoyé, comme je l'avais demandé, l'épreuve de mon article sur la Vie de César. Je n'ai pas dû me demander si elle plairait ou non à l'illustre auteur.

      Tout en rendant hommage au talent réel et considérable, je ne puis accepter la thèse, et j'ai failli dire que, comparer l'oeuvre de César, cet acheteur de consciences, à l'oeuvre, peut-être blâmable à certains égards, mais du moins intègre et vraiment fière de Napoléon Ier me paraissait un blasphème. Je l'aurais dit si je n'eusse craint d'empiéter sur le domaine de la politique, interdite au petit journal où j'insère cet article, à la demande de mon éditeur.

      Vous m'avez fait espérer que je vous verrais un de ces jours, mon grand ami. J'ai tellement peur de vous manquer, que je ne bougerai pas de la semaine. Je vous aime de tout mon coeur.

       G. SAND.

      DLXXXVI

СКАЧАТЬ