El sistema financiero a finales de la Edad Media: instrumentos y métodos. AAVV
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу El sistema financiero a finales de la Edad Media: instrumentos y métodos - AAVV страница 5

СКАЧАТЬ Normandie médiévale, dotée de sources abondantes et caractérisée par une monétarisation précoce des contrats, est un champ d’étude prometteur, en raison de l’abondance des mentions de paiements en grains, aussi bien de redevances seigneuriales que de versements liés à des contrats de crédit. Ces documents ont depuis longtemps été repérés et ils ont été utilisés dans des recherches sur l’histoire locale et les pratiques agraires.3 Récemment, Isabelle Theiller a pu mettre en lumière, à partir d’un dossier exceptionnel de chartes de l’abbaye Saint-Amand de Rouen et du prieuré conventuel de Bonne-Nouvelle, certains aspects juridiques et pratiques du fonctionnement de ce type de paiements.4 L’acte constituant une rente annuelle de 4 muids de froment, versée par les moines de Bonne-Nouvelle aux moniales de Saint-Amand, mettait fin au conflit qui opposait les deux communautés autour de la possession d’un domaine dans le pays de Caux. La renonciation des moniales à leurs prétentions sur le domaine était conditionnée au versement d’une rente à titre de dédommagement. Bien qu’il ne se soit pas agi à proprement parler d’un acte de crédit, l’accord recourait à un instrument essentiel dans ce secteur conclu et indiquait avec beaucoup de précision les modalités du paiement: celui-ci devait intervenir entre la Saint-Michel et l’octave de la Saint-André, sur le marché au blé de Rouen par 4 vendredis, chaque muid au prix de 4 sous à la somme de moins que le meilleur blé.5

      Un document du milieu du XIVe siècle permet d’aller un peu plus loin dans la compréhension de l’évaluation monétaire des redevances en grains. L’affaire oppose des habitants du village de Martragny, non loin de Bayeux, aux fermiers des revenus du duc de Normandie (il s’agit alors du fils aîné du roi Philippe VI, le futur roi Jean le Bon). Dans un jugement rendu en 1344 et ayant valeur de jurisprudence sur le sujet, le vicomte de Caen (c’est-à-dire le juge royal), après enquête sur place, ordonne aux percepteurs des revenus domaniaux du duc de Normandie de s’en tenir à la pratique accoutumée en ce qui concerne le paiement des rentes en grains dus à Pâques, c’est à dire d’évaluer le grain au prix fixé à la mi-carême sur le marché caennais, sans aucune augmentation:

      Un petit dossier de 4 contrats passés en 1388 devant les tabellions de Bernay (Annexe 5) permet d’observer des opérations à court terme sur de petites quantités de froment (1 à 2 sextiers), menés sur les marchés de Bernay et de Brionne, dont les mesures sont utilisées comme références. Deux d’entre elles concernent l’engagement de payer à la Saint-Michel, les quantités de blé reçue, le prix à acquitter étant le plus haut qui sera observé sur le marché jusqu’à la Saint-Clair (18 juillet) c’est-à-dire probablement jusqu’au début des opérations de récolte. Les deux autres portent sur des ventes à terme de blé à livrer à la Toussaint pour l’un, à Noël pour l’autre, portant l’un et l’autre la mention du prix qui sera payé par rapport à celui du «meilleur blé»: 2 sous de moins au sextier dans le premier cas 2 deniers de moins, sans doute à la somme, dans le second cas. Les différences entre les contrats sur la nature de la mesure, comble ou rase, ou sur la présence d’une clause d’obligation de corps suggèrent que de telles transactions s’inscrivent dans un marché complexe où chaque contrat porte des nuances subtiles dont l’historien ne peut le plus souvent rendre compte. Pour autant, leur fonctionnement est clair: la plupart des contrats sont passés sur la base d’un versement à la Saint-Michel, plus rarement à Noël, c’est-à-dire au moment où l’offre est à son maximum sur les marchés, avec le solde de la récolte précédente et l’arrivée de la récolte nouvelle et où la demande est aussi très forte, en raison des semailles à venir. Dans ces conditions, on peut penser que le prix d’équilibre atteint sur le marché reflètera assez fidèlement la valeur du stock localement disponible. C’est lui qui servira de référence pour le paiement des rentes aux deux termes de Saint-Michel et de Pâques. Les contrats portant sur des grains à payer au prix plafond atteint dans les jours qui précèdent la récolte sont beaucoup plus rares. Ils ne constituent jamais de rentes perpétuelle ni même sur plusieurs récoltes. Il peuvent s’interpréter comme un second marché à très court terme, de nature plus clairement spéculative.

      LA RENTE: INSTRUMENT DE CRÉDIT ET INSTRUMENT DE GESTION