Nach Paris! (Roman). Dumur Louis
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Читать онлайн книгу Nach Paris! (Roman) - Dumur Louis страница 8

Название: Nach Paris! (Roman)

Автор: Dumur Louis

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066081256

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СКАЧАТЬ j'avais donnée au feldwebel pendant mon volontariat pour me concilier sa bienveillance. Mais ce qui surprenait le plus dans l'appartement du feldwebel Schlapps, c'était la quantité prodigieuse de souvenirs de femmes qui en ornaient tous les coins et recoins. On ne comptait pas les écharpes, les rubans, les mouchoirs, les débris de gaze, les bouquets fanés, les gants jaunis, les jarretières, les nœuds de chemise qui s'accrochaient à tous les clous, rôdaient sur les meubles, chargeaient des étagères, piquaient les angles des cadres et des miroirs. Les plus intimes de ces objets étaient naturellement dévolus à la décoration de la chambre à coucher, où l'on pouvait voir jusqu'à un pantalon de linon, avec des faveurs roses et des dentelles, servant de têtière à un fauteuil oriental. Le nombre des photographies surtout était considérable: il y en avait de toutes les sortes, dans toutes les poses et dans tous les costumes. Les unes présentaient de sémillants minois en toilette de ville, d'autres des déshabillés suggestifs, d'autres de piaffantes mascarades de théâtre-variété. Il y en avait de poétiques et de provocantes, de sensuelles et de sentimentales, de lascives, de perverses, de triviales; quelques unes même pouvaient être qualifiées de nettement obscènes. Tout ce qui avait passé sur les scènes des music-halls de Magdebourg, sur la piste de son cirque, dans ses tavernes, dans ses confiseries, dans ses bals publics, dans ses bars, sur ses trottoirs ou dans ses maisons louches s'étalait là, paradant, aguicheur, érotique et brutal, témoignage impressionnant des robustes appétits et des succès féminins de notre feldwebel.

      J'en étais là de ma contemplation et ma pensée rougissante s'en allait déjà, portée par un courant naturel, errer à la dérive du côté des charmes encore à peine entrevus de ma chère Dorothéa, quand le tailleur Stich entra. Il avait les bras chargés de deux ou trois tuniques et d'autant de pantalons.

      —A vos ordres, monsieur l'aspirant. J'ai conservé vos mesures de l'année dernière. Avez-vous grandi? Avez-vous grossi?

      —Pas d'un pouce, Stich.

      —Alors, fit-il de sa voix nasillarde, voilà qui doit vous aller comme un gant.

      Il me présenta un uniforme et m'aida à l'endosser. J'en examinai l'effet dans la grande glace de Schlapps.

      C'était le fameux uniforme feldgrau, dont j'avais déjà porté un spécimen aux manœuvres.

      La glace me renvoyait mon image guerrière, grise du collet aux genoux. Tout y était feldgrau, jusqu'aux pattes d'épaules, jusqu'aux parements des manches. La couleur du corps d'armée ne se remarquait que par le mince liseré rouge des pattes d'épaules, sur lesquelles s'inscrivait en rouge le numéro du régiment. Un rang de boutons jaunes fermait la tunique. Un passepoil rouge et un galon doré de sous-officier bordaient le collet et les parements.

      —Eh bien, murmurait Stich en me tapotant de tous les côtés, il me semble que ça va!

      —Ça va.

      —C'est un peu ample, mais vous serez mieux à votre aise. Vous n'allez pas à la parade, vous allez à la guerre.

      Je lui donnai un mark de pourboire, puis j'allai au magasin d'habillement et à l'armurerie toucher le reste de mon équipement. Je choisis un casque, recouvert de sa housse en toile verdâtre, une casquette avec son bandeau rouge et sa cocarde prussienne, un manteau avec sa patte de drap rouge au collet, une paire de demi-bottes de cuir jaune, un havresac avec sa marmite individuelle, ses sachets à vivres, sa toile et ses accessoires de tente, un ceinturon avec ses trois cartouchières, son étui-musette et son petit bidon, un sabre-baïonnette avec son fourreau bruni et sa fausse dragonne aux couleurs du bataillon et de la compagnie, enfin un fusil avec sa lame-chargeur, sa hausse et son curseur. Tout cela avait pris un certain temps et quand je fus de retour chez le feldwebel, j'y trouvai Kœnig qui m'attendait.

      —Et maintenant, mein lieber, allons voir le capitaine Kaiserkopf.

      Le bureau du capitaine était situé à l'extrémité de l'étage occupé par notre compagnie. Une sentinelle en tenue de guerre, baïonnette au canon, en gardait l'entrée. Au passage de Kœnig, l'homme rectifia la position et présenta l'arme. Nous fûmes reçus dans l'antichambre par l'ordonnance.

      —Monsieur le capitaine est-il là?

      —A vos ordres, monsieur le lieutenant. Monsieur le capitaine est là, avec le vice-feldwebel Biertümpel.

      Nous pénétrâmes dans une grande pièce qui s'éclairait sur la cour principale par deux hautes fenêtres à stores verts. Derrière un bureau de chêne chargé de dossiers, se hérissait, entre une énorme chope de bière et un revolver de gros calibre, une tête étrange et presque monstrueuse. Sous la casquette à visière un front proéminent, bossué, corroyé comme du cuir de botte projetait une paire de formidables sourcils aux soies épaisses et menaçantes. Le nez se gonflait et bourgeonnait entre les poches des yeux et les puissants méplats des joues aux teintes calcinées. Une rude et gigantesque moustache grisonnante boisait entièrement les lèvres et retombait pesamment autour du menton bestial. Le col rouge, érigé entre les pattes d'épaules plates en argent piquées de leurs deux étoiles, soutenait violemment cette figure énergique et féroce.

      Je m'étais figé dans une attitude raide, les talons joints, la main gantée à la jugulaire du casque, attendant que le capitaine Kaiserkopf daignât lever les yeux sur moi. Un crayon à la main, il s'occupait à pointer sur un état d'effectifs des noms que lui défilait la voix éraillée du vice-feldwebel Biertümpel:

      —Schuhmacher, Hans; Müller, Jakob; Petermann, Otto; Schnupf, Siegfried...

      Cela aurait pu durer longtemps ainsi et j'aurais pu l'examiner encore plus en détail, si, ce qui lui arrivait sans doute à intervalles rapprochés, il n'avait éprouvé le besoin de boire. Sa main velue se porta vers l'anse de sa chope, de gros yeux gris de fer se levèrent, roulèrent un instant sous leurs sourcils énormes et se fixèrent sur moi. J'en profitai pour m'annoncer:

      —Offiziers-Aspirant Wilfrid Hering!

      Il aperçut en même temps Kœnig qui le saluait; il lui tendit deux doigts, puis, montant sa chope à ses lèvres, il y trempa largement sa moustache, tandis que Kœnig prononçait:

      —Monsieur le capitaine, l'aspirant Hering est notre meilleur volontaire de la classe 1912. C'est un sujet distingué, qui fera honneur au régiment. Le capitaine Braumüller faisait grand cas de lui.

      —Braumüller, Braumüller... grommela le capitaine Kaiserkopf. Ce n'est pas une raison.

      —Ce n'est pas une raison, sans doute, monsieur le capitaine, mais c'est une indication.

      —Schœn, Schœn. Voyons ses notes, Biertümpel.

      Puis tandis que le vice-feldwebel feuilletait en dossier:

      —Belle mine, solide gaillard, formula-t-il en me jaugeant de son œil gris. Superbe balafre.

      —S'il vous plaît, monsieur le capitaine, croassa le vice-feldwebel en lui présentant la feuille qui me concernait.

      Le capitaine Kaiserkopf y plongea le nez.

      —Ah! voyons... Einjæhrig-Freiwilliger Wilfrid Hering, c'est bien ça... octobre 1912... stimmt... Tenue, bonne; instruction militaire bonne; baïonette, passable... Ah! ah! il paraît que vous n'êtes pas fort sur la baïonnette? Teufel! voilà qui est mauvais, monsieur Hering, voilà qui est très mauvais! La baïonnette, Donnerwetter! c'est capital. Comment voulez-vous vous en tirer, si vous n'êtes pas fort sur СКАЧАТЬ