Nach Paris! (Roman). Dumur Louis
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Название: Nach Paris! (Roman)

Автор: Dumur Louis

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066081256

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СКАЧАТЬ elle doit être à son poste. Le peuple ne veut pas d'aventure guerrière; il veut une politique qui garantisse la paix.

      Sur quoi le leader français Jaurès, lui faisant écho par dessus la frontière, répondait dans son organe l'Humanité:

      Tout ce que nous voyons à l'heure présente, dans cette obscurité, c'est que nos camarades socialistes d'Allemagne ont vigoureusement protesté contre le caractère menaçant et offensant de la note autrichienne. Que les socialistes de tous les pays redoublent d'efforts pour éclairer l'opinion et pour opposer leur solidarité à l'épouvantable catastrophe dont est menacé le monde.

      J'en étais là de ma lecture, quand je me sentis frappé sur l'épaule.

      —Guten Abend, Herr Wilfrid, vous êtes donc à Magdebourg?

      C'était un ami de mon père, le juge de district Obercassel, dont je fréquentais la maison pendant mon année de volontariat.

      —Comme vous le voyez, monsieur le juge de district, je suis ici de passage.

      —Quoi de nouveau? Tout le monde va bien, à Ilsenburg?

      —Tout le monde va bien, je vous remercie. Mon père fait chaque jour son heure de trapèze, ma mère cultive son piano et mes petites sœurs grandissent.

      —Tant mieux, tant mieux, Et vous, Herr Wilfrid? Vous étudiez à Halle, je crois?

      —A Halle, parfaitement, monsieur le juge de district.

      —Oh! oh! fit-il en m'examinant, mes félicitations! Vous avez ramassé là une superbe balafre. Cela vous va fort bien, mon cher!

      Il me secoua cordialement la main, s'assit en face de moi, commanda un litre et, remarquant l'amoncellement de journaux qui formait sur la table une pile presque aussi haute que celle de mes rondelles de cruchons, il demanda:

      —Vous avez lu les feuilles du soir? Quelles sont les nouvelles? L'Autriche a-t-elle fait sa déclaration de guerre?

      —Pas encore, monsieur le juge de district. Nous en sommes toujours à la rupture diplomatique. Vous croyez donc à la guerre?

      —Naturellement.

      —Et la médiation des puissances?

      —Bêtise! L'Autriche veut avoir la Serbie, elle l'aura! Elle n'en fera qu'une bouchée.

      —C'est certain. Mais il y a la Russie. Que fera la Russie?

      —La Russie fera ce qu'elle voudra. Cela nous est égal.

      —Comment, cela nous est égal? Mais si la Russie bouge, nous intervenons!

      —Eh bien, nous intervenons.

      —Vous croyez donc aussi à la guerre européenne?

      —J'y crois aussi.

      —Cependant, notre gouvernement assure qu'il veut la paix.

      —Il l'assure, sans doute. Il faut toujours assurer qu'on veut la paix. Mais je pense que c'est précisément pour avoir un bon motif d'intervention qu'il laisse François-Joseph donner tête baissée dans l'affaire balkanique. Vous comprenez que, si l'Allemagne voulait réellement la paix, notre empereur n'aurait qu'un mot à dire pour que tout rentre aussitôt dans l'ordre.

      —Ce mot, l'empereur va peut-être le dire. Qui sait s'il ne rentre pas aujourd'hui à Berlin pour cela?

      —Je ne le pense pas. L'Allemagne a tout intérêt à une guerre européenne. Jamais la situation ne nous aura été plus favorable: la Russie sans chemins de fer et perdue par ses grèves, la France plus qu'aux trois quarts pourrie, incapable d'un effort militaire, l'Angleterre en proie à la guerre civile et devant forcément rester neutre.

      —C'est juste. Mais si la situation nous est si favorable, ne pensez-vous pas, monsieur le juge de district, qu'aucun pays n'osera nous attaquer? Il faudrait donc que ce soit l'Allemagne qui prenne l'offensive? Assumerait-elle la responsabilité de déclarer la guerre?

      —Pourquoi pas? Je ne vois pas pourquoi l'Allemagne ne déclarerait pas la guerre, si c'est nécessaire. Offensive, défensive, tout cela ne signifie rien, Herr Wilfrid. En réalité, on se défend toujours, même quand on attaque. Or, nous nous sentons attaqués, parce qu'on ne nous laisse pas faire ce que nous voulons. En attaquant à notre tour, nous ne faisons donc que nous défendre. Il n'y a pas un Allemand qui ne comprenne cela.

      —Vous vouiez dire que, de quelque façon que la guerre s'engage, cette guerre ne sera jamais pour nous qu'une guerre défensive?

      —C'est exactement ce que je veux dire. Tenez, les socialistes eux-mêmes... Je vois que vous venez de lire cette peste de Vorwærts, fit-il en posant son gros index poilu sur la feuille socialiste... Eh bien, les socialistes eux-mêmes finiront aussi par le comprendre.

      Et comme j'avais un geste d'incrédulité:

      —Vous verrez, affirma-t-il.

      Puis, après avoir allumé un cigare et fait renouveler son litre, le juge de district Obercassel continua:

      —C'est maintenant qu'il nous faut agir. Dans quelques années, il serait trop tard. Nous avons besoin de nous étendre, de briser autour de nous des résistances qui pourraient devenir trop fortes. Il nous faut les ports du nord, les mines de fer et les colonies françaises. Il nous faut la Vistule et la mainmise sur la Baltique. Il nous faut l'accès de la Méditerranée et la domination surtout l'empire ottoman. Voilà pour commencer. Dans vingt ans, ce sera le tour de l'Angleterre. Dans cinquante ans, les États-Unis seront allemands, le Brésil de même; le canal de Panama nous appartiendra et nous pourrons alors nous occuper sérieusement de la Chine.

      —C'est magnifique! m'écriai-je enthousiasmé.

      —Nous ne verrons pas tout cela. Vous peut-être, pas moi. Mais je suis modeste, je mécontenterai d'assister à la première partie de cette colossale trilogie.

      Il prononçait tout cela tranquillement, l'œil doucement émerillonné, en ingurgitant à petits coups sa bière blonde.

      —Mais j'y songe, fit-il, vous êtes mobilisable, Herr Wilfrid. Vous n'avez encore rien reçu?

      J'hésitais à répondre. Mais je voulus maintenir le secret.

      —Non, dis-je en rougissant.

      —Cela m'étonne, car chez nous l'artillerie et les pionniers sont déjà partis.

      —Quand?

      —Il y a trois jours. Ils doivent être bien loin maintenant.

      —Vous les avez vus?

      —Non. Peu de gens les ont vus. Ils sont partis de nuit. Le 26e régiment d'infanterie est également parti, mais la nuit dernière seulement. Il s'est embarqué à la gare de Neustadt.

      —Et le 183e?

      —Le 183e, on ne le voit pas non plus. Mais je crois qu'il est encore ici. Il doit être consigné СКАЧАТЬ