La destinée. Ages Lucie des
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу La destinée - Ages Lucie des страница 8

Название: La destinée

Автор: Ages Lucie des

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066083618

isbn:

СКАЧАТЬ Puis, quelle délicatesse de teint! On dirait une petite rose de Bengale, à mesure que ses joues se colorent sous l'empire de la timidité. Ne voilà-t-il pas un délicieux modèle de jeune princesse! Car il n'y a pas à dire, la petite-fille de ce vieux grippe-sou ne déparerait [pas] les marches d'un trône!

      Le docteur sourit. Mais remarquant le regard inquiet de Sarah en voyant remuer les lèvres du lieutenant, dont elle ne pouvait entendre les paroles, il ne répondit pas à ses remarques et dit en s'adressant à l'enfant:

      - Il y a ici une chambre à louer, nous sommes venus la visiter. Voulez-vous nous la montrer?

      - Volontiers. Elle est de l'autre côté de la cour. Suivez-moi.

      Les guidant, elle leur fit parcourir de longs corridors tortueux, monter un escalier et ouvrit une porte dont la clef était dans la serrure. La pièce dans laquelle ils entrèrent précédait une grande chambre gaie, bien aérée, donnant sur le boulevard et à laquelle on avait accès par un second escalier ouvrant directement dans la cour.

      Lorsque Robert et Jacques sortirent de chez le marchand d'antiquités, le premier dit en regardant interrogativement son ami:

      - Eh bien?

      - Ce logement me convient, je m'en contenterai si ce brave homme ne m'étrangle pas trop.

      - Ce brave homme, comme tu dis, t'étranglera autant qu'il le pourra, attendu qu'il est juif ou à peu près, à ce qu'il paraît, et cette qualité lui concède le droit de pressurer de son mieux les honnêtes chrétiens qui ont affaire à lui. Toutefois, si juif qu'il soit, il ne peut avoir la prétention de te demander une somme folle pour la location de ce palais.

      - Palais en rapport avec mon opulence! reprit le jeune lieutenant en riant. Sais-tu que ce fils d'Israël me paraît devoir être riche? ajouta-t-il.

      - Tu vois ce que nous a dit sa petite-fille.

      - Si son vieil avare de grand-père l'avait entendue!

      - Pourquoi?

      - Comment, pourquoi? Ne vois-tu pas qu'il y a de quoi faire venir l'eau à la bouche d'un voleur? Des monceaux d'or derrière la porte qu'elle nous a montrée! Ah! si j'étais voleur!

      - Heureusement, tu n'exerces pas cette honorable profession. Espérons qu'elle ne fera cette confidence qu'à d'honnêtes gens comme nous.

       Table des matières

      Jacques Hilleret, lieutenant au 33e régiment de ligne, en garnison à Poitiers, et Robert Martelac, docteur en médecine, étaient deux amis de collège, bien que le second fût un peu plus âgé que le jeune officier.

      Lorsque Jacques était arrivé en pension, il avait une douzaine d'années; son visage pâle et maladif, son air timide, le désignaient tout naturellement comme victime aux plaisanteries inconsciemment cruelles parfois des autres enfants de sa classe. On se trouvait en été et les élèves prenaient leurs récréations dans la cour, les petits d'un côté et les grands de l'autre, sans qu'aucune séparation les empêchât de se confondre souvent dans l'ardeur du jeu.

      Un matin de juillet, Robert et quelques jeunes gens de son âge se promenaient en causant sous une rangée d'arbres rabougris plantés à une petite distance du mur. Le soleil, en ce moment très élevé, tombait d'aplomb sur cette immense cour, dans laquelle l'ombre de ces arbres jetait la seule note adoucie au milieu de la lumière brûlante réfléchie de tous les côtés par les hautes murailles. Resserrés les uns contre les autres et couverts d'une couche de poussière sous laquelle leur feuillage avait une teinte sale, on eût dit qu'ils boudaient contre leur sort et consentaient à regret à égayer la cour d'un établissement que tant d'enfants, habitués aux gâteries du foyer paternel, considéraient comme une prison.

      Depuis un instant, les regards de Robert s'étaient arrêtés sur un groupe d'élève acharnés autour de Jacques. Celui-ci, debout contre le mur, sur lequel sa fluette petite personne s'appuyait, avait une expression dans laquelle la crainte se mêlait à une impuissante colère à la vue du nombre grossissant de ses adversaires.

      - Lâches! lâches! criait-il tandis que ses mains faibles et tremblantes essayaient vainement de les repousser.

      Son poing, dirigé au hasard, s'abattit sur une tête brune qui se redressa en riant d'un air moqueur; un coup solidement appliqué par celui auquel elle appartenait vint le faire repentir de son audace:

      - Petit moucheron! Nouveau de malheur! Attends, voilà de quoi te corriger!

      Les larmes roulèrent sur le visage du nouveau, larmes de rage plus encore que de souffrance, car il sentait à peine les coups, tant il était en proie à une sorte de désespoir. Sa tête, fine et douce comme une tête d'ange, se rejetait en arrière pour dominer ses persécuteurs et ses yeux avaient à travers leurs larmes des éclairs de fureur contrastant avec les lignes pures et encore enfantines de son visage.

      Ayant suivi cette scène des yeux, Robert n'y tint plus. Il se précipita avec indignation au milieu du groupe, le dispersa par quelques coups habilement distribués et se campant fièrement devant Jacques, il regarda les petits bourreaux terrifiés en s'écriant:

      - Le premier qui lui [sic] touchera aura les oreilles tirées de façon à rester privé à jamais de cet ornement naturel et précieux!

      Puis se tournant vers son protégé, il le toisa du regard:

      - Et toi, il faut te défendre. Dégourdis-toi! Tu ne peux pas rester toute ta vie comme une poule mouillée et te laisser plumer par de petits vauriens sans coeur!

      La taille élevée de Robert, son ton froid, ses traits fortement accentués et une teinte bleuâtre qui marquait déjà comme un collier autour du visage la place de la barbe lui donnaient presque l'apparence d'un homme. Ses yeux graves considéraient Jacques tremblant devant lui.

      Tu ressembles à une petite demoiselle, dit-il.

      Son visage s'illumina subitement d'un sourire protecteur; les yeux de Jacques, encore humides de larmes, reflétèrent ce sourire et le regardèrent avec une confiante reconnaissance.

      - Comment t'appelles-tu?

      - Jacques Hilleret.

      - Moi, Robert Martelac. Chaque fois qu'on te cherchera querelle, appelle-moi. A nous deux, nous aurons raison de tout ton cours.

      Jacques inclina la tête et mit sa petite main dans la main large et nerveuse que lui tendait Robert. Ainsi fut scellée l'amitié des jeunes gens, amitié solide faite d'estime mutuelle et de protection acceptée de la part du plus faible, fier de la haute considération dont son défenseur jouissait au collège.

      La promesse de Robert fut tenue consciencieusement et il sut donner de sévères leçons aux persécuteurs de son nouvel ami.

      J'ai connu un petit garçon qui tirait vanité de la véhémence avec laquelle son père le corrigeait par des arguments frappants.

      - Oh! papa, disait-il, il est fort, il fouette bien!

      L'honneur d'avoir un tel СКАЧАТЬ