Clotilde Martory. Hector Malot
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Название: Clotilde Martory

Автор: Hector Malot

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

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isbn: 4064066089115

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СКАЧАТЬ a la forme de la croix de la Légion d'honneur; et au centre se dresse un buste de l'empereur, ombragé par un saule pleureur dont la bouture a été rapportée de Sainte-Hélène: un saule pleureur à Cassis dans un terrain sec comme la cendre, il faut voir ça. Du mois de mai au mois d'octobre, le général consacre deux heures par jour à l'arroser, et quand la sécheresse est persistante, il achète de porte en porte de l'eau à tous ses voisins. Quand le saule jaunit, le général est menacé de la jaunisse.

      —Mais c'est touchant ce que vous racontez là.

      —Vous pourrez voir ça; le général montre volontiers son monument; et comme vous êtes militaire, il vous invitera peut-être à dijuner, ce qui vous donnera l'occasion de l'entendre rappeler sa cuisinière à l'ordre, si par malheur elle a laissé brûler la sauce dans la casterole. C'est là, en effet, sa façon de s'exprimer; car, pour devenir général, il a dépensé plus de sang sur les champs de bataille que d'encre sur le papier. En même temps, vous ferez connaissance avec un personnage intéressant aussi à connaître: le commandant de Solignac, qui a figuré dans les conspirations de Strasbourg et de Boulogne, et qui est l'ami intime, le commensal du vieux Martory; celui-là est un militaire d'un autre genre, le genre aventurier et conspirateur, et nous pourrions bien lui voir jouer prochainement un rôle actif dans la politique, si Louis-Napoléon voulait faire un coup d'État pour devenir empereur.

      —Ce n'est pas l'ami du général Martory que je désire connaître, c'est sa fille.

      —J'aurais voulu vous en parler, mais je ne sais rien d'elle ou tout au moins peu de chose. Elle a perdu sa mère quand elle était enfant et elle a été élevée à Saint-Denis, d'où elle est revenue l'année dernière seulement. Cependant, puisque nous sommes sur son sujet, je veux ajouter un mot, un avis, même un conseil si vous le permettez: Ne pensez pas à Clotilde Martory, ne vous occupez pas d'elle. Ce n'est pas du tout la femme qu'il vous faut: le général n'a pour toute fortune que sa pension de retraite, et il est gêné, même endetté. Si vous voulez vous marier, nous vous trouverons une femme qui vous permettra de soutenir votre nom. Nous avons tous, dans notre famille, beaucoup d'amitié pour vous, mon cher Saint-Nérée, et ce sera, pour une Bédarrides, un honneur et un bonheur d'apporter sa fortune à un mari tel que vous. Ce que je vous dis là n'est point paroles en l'air; elles sont réfléchies, au contraire, et concertées. Mademoiselle Martory a pu vous éblouir, elle ne doit point vous fixer.

       Table des matières

      Ce n'était pas la première fois qu'on me parlait ce langage dans la famille Bédarrides, et déjà bien souvent on avait de différentes manières abordé avec moi ce sujet du mariage.

      —Il faut que nous mariions M. de Saint-Nérée, disait madame Bédarrides mère chaque fois que je la voyais. Qu'est-ce que nous lui proposerions bien?

      Et l'on cherchait parmi les jeunes filles qui étaient à marier. Je me défendais tant que je pouvais, en déclarant que je ne me sentais aucune disposition pour le mariage, mais cela n'arrêtait pas les projets qui continuaient leur course fantaisiste.

      Les gens qui cherchent à vous convertir à leur foi religieuse ou à leurs idées politiques deviennent heureusement de plus en plus rares chaque jour, mais ceux qui veulent vous convertir à la pratique du mariage sont toujours nombreux et empressés.

      Le plus souvent, ils vivent dans leur intérieur comme chien et chat; peu importe: ils vous vantent sérieusement les douceurs et les joies du mariage. Ils vous connaissent à peine, pourtant ils veulent vous marier, et il faudrait que vous eussiez vraiment bien mauvais caractère pour refuser celle à laquelle ils ont eu la complaisance de penser pour vous. C'est pour votre bonheur; acceptez les yeux fermés, quand ce ne serait que pour leur faire plaisir.

      On rit des annonces de celui qui a fait sanctionner le courtage matrimonial et qui en a été «l'initiateur et le propagateur;» le monde cependant est plein de courtiers de ce genre qui font ce métier pour rien, pour le plaisir. Ayez mal à une dent, tous ceux que vous rencontrerez vous proposeront un remède excellent; soyez garçon, tous ceux qui vous connaissent vous proposeront une femme parfaite.

      Ce fut là à peu près la réponse que je fis à Marius Bédarrides, au moins pour le fond; car pour la forme, je tâchai de l'adoucir et de la rendre à peu près polie. Les intentions de ce brave garçon étaient excellentes, et ce n'était pas sa faute si la manie matrimoniale était chez lui héréditaire.

      —Je dois avouer, me dit-il d'un air légèrement dépité, que je ne sais comment concilier la répulsion que vous témoignez pour le mariage avec l'enthousiasme que vous ressentez pour mademoiselle Martory, car enfin vous ne comptez pas, n'est-ce pas, faire de cette jeune fille votre....

      —Ne prononcez pas le mot qui est sur vos lèvres, je vous prie; il me blesserait. J'ai vu chez vous une jeune fille qui m'a paru admirable; j'ai désiré savoir qui elle était; voilà tout. Je n'ai pas été plus loin que ce simple désir, qui est bien innocent et en tous cas bien naturel. Mon enthousiasme est celui d'un artiste qui voit une oeuvre splendide et qui s'inquiète de son origine.

      —Parfaitement. Mais enfin il n'en est pas moins vrai que la rencontre de mademoiselle Martory peut être pour vous la source de grands tourments.

      —Et comment cela, je vous prie?

      —Mais parce que si vous l'aimez, vous vous trouvez dans une situation sans issue.

      —Je n'aime pas mademoiselle Martory!

      —Aujourd'hui; mais demain? Si vous l'aimez demain, que ferez-vous? D'un côté, vous avez horreur du mariage; d'un autre, vous n'admettez pas la réalisation de la chose à laquelle vous n'avez pas voulu que je donne de nom tout à l'heure. C'est là une situation qui me paraît délicate. Vous aimez, vous n'épousez pas, et vous ne vous faites pas aimer. Alors, que devenez-vous? un amant platonique. A la longue, cet état doit être fatigant. Voilà pourquoi je vous répète: ne pensez pas à mademoiselle Martory.

      —Je vous remercie du conseil, mais je vous engage à être sans inquiétude sur mon avenir. Il est vrai que j'ai peu de dispositions pour le mariage; cependant, si j'aimais mademoiselle Clotilde, il ne serait pas impossible que ces dispositions prissent naissance en moi.

      —Faites-les naître tout de suite, alors, et écoutez mes propositions qui sont sérieuses, je vous en donne ma parole, et inspirées par une vive estime, une sincère amitié pour vous.

      —Encore une fois merci, mais je ne puis accepter. Qu'on se marie parce qu'un amour tout-puissant a surgi dans votre coeur, cela je le comprends, c'est une fatalité qu'on subit; on épouse parce que l'on aime et que c'est le seul moyen d'obtenir celle qui tient votre vie entre ses mains. Mais qu'on se décide et qu'on s'engage à se marier, en se disant que l'amour viendra plus tard, cela je ne le comprends pas. On aime, on appartient à celle que l'on aime; on n'aime pas, on s'appartient. C'est là mon cas et je ne veux pas aliéner ma liberté; si je le fais un jour, c'est qu'il me sera impossible de m'échapper. En un mot, montrez-moi celle que vous avez la bonté de me destiner, que j'en devienne amoureux à en perdre la raison et je me marie; jusque-là ne me parlez jamais mariage, c'est exactement comme si vous me disiez: «Frère, il faut mourir.» Je le sais bien qu'il faut mourir, mais je n'aime pas à me l'entendre dire et encore moins à le croire.

      L'entretien en resta là, et Marius Bédarrides s'en alla en secouent la tête.

      —Je ne sais pas si vous devez СКАЧАТЬ