Clotilde Martory. Hector Malot
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Clotilde Martory - Hector Malot страница 16

Название: Clotilde Martory

Автор: Hector Malot

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066089115

isbn:

СКАЧАТЬ qui pouvaient m'être utiles.

      La lecture confirma l'opinion qui m'était restée de ces équipées: rien ne pouvait être plus follement, plus maladroitement combiné, et le rôle que le prince Louis-Napoléon avait joué dans les deux me parut tout à fait misérable, sans un seul de ces actes de courage téméraire, sans un seul de ces sentiments romanesques, de ces mots chevaleresques qu'on trouve si souvent dans la vie des aventuriers les plus vulgaires.

      D'un bout à l'autre la lecture de ces pièces révèle la platitude la plus absolue chez le chef de ces entreprises. Napoléon revenant de l'île d'Elbe a marché en triomphe sur Paris; comme il se dit l'héritier de Napoléon, il doit marcher en triomphe de Strasbourg à Paris la première fois, de Boulogne à Paris la seconde; son oncle avait un petit chapeau, il aura un petit chapeau sur lequel il portera un morceau de viande pour qu'un aigle, dressé à venir prendre là sa nourriture, vole au-dessus de sa tête.

      Si tout cela n'avait pas le caractère de l'authenticité, on ne voudrait pas le croire, et l'on dirait qu'on a affaire à un monomane, non à un prétendant; et c'est ce monomane qu'on a accepté pour Président de la République, et dont on voudrait aujourd'hui faire un empereur! Pourquoi le parti royaliste et le parti républicain ne répandent-ils pas ces deux procès dans toute la France? il n'y a qu'à faire connaître cet homme pour qu'il devienne un sujet de risée: si les paysans veulent un Napoléon, ils ne voudront pas un faux Napoléon; s'ils acceptent un aigle, ils se moqueront d'un perroquet.

      Mais ce n'est pas du chef que j'ai souci, c'est du comparse; ce n'est pas du prince Louis, c'est du commandant de Solignac. Et si nous n'étions pas dans des circonstances politiques qui menacent de nous conduire à une révolution militaire, je n'aurais bien certainement point passé mon temps à étudier les antécédents judiciaires du futur empereur.

      Quant à ceux du commandant de Solignac, pour être d'un autre genre que ceux de son chef de troupe, ils n'en sont pas moins curieux et intéressants. Malheureusement, ils ne sont pas aussi complets qu'on pourrait le désirer, car, dans ces deux conspirations, il paraît n'avoir occupé qu'un rang très-secondaire.

      A l'audience, ses explications sont des plus simples: il a servi la cause du prince Louis-Napoléon parce qu'il croit que c'est celle de la France; pour lui, ses croyances, ses espérances se résument dans un nom: «l'Empereur,» et le prince Louis est l'héritier de l'empereur. Il a été entraîné par la reconnaissance du souvenir et par la fidélité des convictions; il le serait encore. Il ne se défend donc pas; il se contente de répondre; on peut faire de lui ce qu'on voudra: une condamnation sera la confirmation du devoir accompli.

      Une pareille attitude avait quelque chose de grand; il me semble que c'eût été celle du général Martory, s'il avait pris part à ces complots. Par malheur pour le commandant de Solignac, il y a dans ses réponses des inconséquences, et quand on les rapproche de celles de ses coaccusés, on trouve des contradictions qui font douter de sa sincérité.

      Au lieu d'avoir été un simple soldat de la conspiration, comme il veut le faire croire, il paraît avoir été un de ses chefs; au lieu d'avoir été entraîné, il semble qu'il a entraîné les autres; au lieu d'avoir obéi à la voix de la France, il pourrait bien n'avoir écouté que celle de son intérêt et de son ambition.

      Mais ce sont plutôt là des insinuations résultant de l'ensemble des deux procès que des accusations nettement formulées, tant la conduite du commandant a toujours été habile et prudente: jamais il ne s'est avancé, jamais il ne s'est compromis au premier rang, et bien que l'on sente partout son action, nulle part on ne peut le saisir en flagrant délit: c'est un Bertrand malin qui se sert des pattes de Raton pour tirer du feu les marrons qu'il doit croquer.

      Une seule chose plaide fortement contre lui, c'est l'état de ses affaires au moment où il se fait le complice de son prince. Elles étaient au plus bas, ces affaires, et telles qu'elles ne pouvaient être relevées que par un coup désespéré.

      Né en 1790, M. de Solignac fait les dernières campagnes de l'empire; à Waterloo il est capitaine. Bien que d'origine noble et apparenté à de bonnes familles, il avance difficilement sous la Restauration; et, en 1832, commandant la première circonscription de remonte, il donne sa démission. Il y a de graves irrégularités dans sa caisse, et un grand nombre de paysans du Calvados se plaignent de ne pas avoir touché le prix des chevaux qu'ils ont vendus, ces prix ayant été encaissés par le commandant. Il prend alors du service dans l'armée belge, mais pour peu de temps, car bientôt encore il donne sa démission.

      J'en étais là de mon étude quand je m'entendis appeler par mon nom.

      C'était Vimard, le capitaine d'état-major que tu as dû connaître quand il était à Oran; il s'était assis en face de moi sans que je le visse entrer.

      —On me dit que vous avez le volume de l'Histoire de dix ans où se trouve le procès de Strasbourg; si vous ne vous en servez pas, voulez-vous me le prêter?

      Je le lui tendis et me remis à ma lecture. Décidément le bibliothécaire ne m'avait pas trompé, ce procès était à la mode.

      Jusqu'au moment de la fermeture de la bibliothèque, nous restâmes en face l'un de l'autre, lisant tous deux et ne nous parlant pas.

      Mais en sortant Vimard me prit par le bras et cela me surprit jusqu'à un certain point, car si nous sommes bien ensemble, nous ne sommes pas cependant sur le pied de l'intimité.

      —Êtes-vous pressé de rentrer? me dit-il.

      —Nullement.

      —Alors, voulez-vous que nous allions jusqu'au Prado?

      —Et quoi faire au Prado?

      —Causer.

      —Il s'agit donc d'un complot?

      —Pouvez-vous me dire cela, à moi surtout!

      —Vous cherchez le silence et le mystère.

      —C'est qu'il s'agit d'une chose sérieuse que je veux examiner avec vous, sans qu'on nous écoute et nous dérange.

      —Allons, donc au Prado.

       Table des matières

      De la bibliothèque au Prado la distance est assez longue; pendant le temps que nous mîmes à la franchir par le cours Julien et le cours Lieutaud, Vimard garda un silence obstiné, qui me laissa toute liberté pour réfléchir à sa demande d'entretien.

      Pourquoi cet entretien?

      Pourquoi ce mystère?

      Pourquoi nous étions-nous rencontrés à la bibliothèque consultant l'un et l'autre l'histoire des conspirations du prince Louis?

      Enfin, en arrivant au Prado, qui se trouvait à peu près désert, Vimard se décida à parler.

      —Mon silence vous surprend, n'est-ce pas?

      —Beaucoup.

      —C'est que je ne désire pas que ce que j'ai à vous dire soit entendu, et quand je suis sous l'impression d'une forte préoccupation, je ne peux pas parler СКАЧАТЬ