Les compagnons de Jéhu. Alexandre Dumas
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Читать онлайн книгу Les compagnons de Jéhu - Alexandre Dumas страница 25

Название: Les compagnons de Jéhu

Автор: Alexandre Dumas

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

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isbn: 4064066088774

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СКАЧАТЬ sauté dessus, était sorti par la porte d'Oulle, avait longé les murailles au grand galop et avait disparu sur la route de Lyon.

      Seulement, à un quart de lieue d'Avignon, il avait ramené son manteau autour de lui pour dérober aux passants la vue de ses armes, et, ôtant son masque, il l'avait glissé dans une de ses fontes.

      Ceux qu'il avait laissés à Avignon si fort intrigués de ce que pouvait être ce terrible Morgan, la terreur du Midi, eussent pu alors, s'ils se fussent trouvés sur la route d'Avignon à Bédarrides, s'assurer par leurs propres yeux si l'aspect du bandit était aussi terrible que l'était sa renommée.

      Nous n'hésitons point à dire que les traits qui se fussent alors offerts à leurs regards leur auraient paru si peu en harmonie avec l'idée que leur imagination prévenue s'en était faite, que leur étonnement eût été extrême.

      En effet, le masque, enlevé par une main d'une blancheur et d'une délicatesse parfaites, venait de laisser à découvert le visage d'un jeune homme de vingt-quatre à vingt-cinq ans à peine, visage qui, par la régularité des traits et la douceur de la physionomie, eût pu le disputer à un visage de femme.

      Un seul détail donnait à cette physionomie ou plutôt devait lui donner, dans certains moments, un caractère de fermeté étrange: c'étaient, sous de beaux cheveux blonds flottant sur le front et sur les tempes, comme on les portait à cette époque, des sourcils, des yeux et des cils d'un noir d'ébène.

      Le reste du visage, nous lavons dit, était presque féminin.

      Il se composait de deux petites oreilles dont on n'apercevait que l'extrémité sous cette touffe de cheveux temporale à laquelle les incroyables de l'époque avaient donné le nom d'oreilles de chien; d'un nez droit et d'une proportion parfaite; d'une bouche un peu brande, mais rosée et toujours souriante, et qui, en souriant, laissait voir une double rangée de dents admirables; d'un menton fin et délicat, légèrement teinté de bleu et indiquant, par cette nuance, que, si sa barbe n'eût point été si soigneusement et si récemment faite, elle eût, protestant contre la couleur dorée de la chevelure, été du même ton que les sourcils, les cils et les yeux, c'est-à-dire du noir le plus prononcé.

      Quant à la taille de l'inconnu, on avait pu l'apprécier au moment où il était entré dans la salle de la table d'hôte: elle était élevée, bien prise, flexible, et dénotait, sinon une grande force musculaire, du moins une grande souplesse et une grande agilité.

      Quant à la façon dont il était à cheval, elle indiquait l'assurance d'un écuyer consommé.

      Son manteau rejeté sur son épaule, son masque caché dans ses fontes, son chapeau enfoncé sur ses yeux, le cavalier reprit l'allure rapide un instant abandonnée par lui, traversa Bédarrides au galop, et, arrivé aux premières maisons d'Orange, entra sous une porte qui se referma immédiatement derrière lui.

      Un domestique attendait et sauta au mors du cheval.

      Le cavalier mit rapidement pied à terre.

      — Ton maître est-il ici? demanda-t-il au domestique.

      — Non, monsieur le baron, répondit celui-ci; cette nuit, il a été forcé de partir, et il a dit que, si monsieur venait et le demandait, on répondît à monsieur qu'il voyageait pour les affaires de la compagnie.

      — Bien, Baptiste. Je lui ramène son cheval en bon état quoique un peu fatigué. Il faudrait le laver avec du vin, en même temps que tu lui donnerais, pendant deux ou trois jours, de l'orge au lieu d'avoine; il a fait quelque chose comme quarante lieues depuis hier matin.

      — Monsieur le_ _baron en a été content?

      — Très content. La voiture est-elle prête?

      — Oui, monsieur le baron, tout attelée sous la remise; le postillon boit avec Julien: monsieur avait recommandé qu'on loccupât hors de la maison pour qu'il ne le vît pas venir.

      — Il croit que c'est ton maître qu'il conduit?

      — Oui, monsieur le baron; voici le passeport de mon maître, avec lequel on a été prendre les chevaux à la poste, et, comme mon maître est allé du côté de Bordeaux avec le passeport de M. le baron, et que M. le baron va du côté de Genève avec le passeport de mon maître, il est probable que l'écheveau de fil sera assez embrouillé pour que dame police, si subtils que soient ses doigts, ne le dévide pas facilement.

      — Détache la valise qui est à la croupe du cheval, Baptiste, et donne-la-moi.

      Baptiste se mit en devoir d'obéir; seulement, la valise faillit lui échapper des mains.

      — Ah! dit-il en riant, M. le baron ne m'avait pas prévenu!

       Diable! M. le baron n'a pas perdu son temps, à ce qu'il paraît.

      — C'est ce qui te trompe, Baptiste: si je n'ai pas perdu tout mon temps, j'en ai au moins perdu beaucoup; aussi je voudrais bien repartir le plus tôt possible.

      — M. le baron ne déjeunera-t-il pas?

      — Je mangerai un morceau, mais très rapidement.

      — Monsieur ne sera pas retardé; il est deux heures de laprès- midi, et le déjeuner l'attend depuis dix heures du matin; heureusement que c'est un déjeuner froid.

      Et Baptiste se mit en devoir de faire, en l'absence de son maître, les honneurs de la maison à l'étranger en lui montrant la route de la salle à manger. — Inutile, dit celui-ci, je connais le chemin. Occupe-toi de la voiture; qu'elle soit sous l'allée, la portière tout ouverte au moment où je sortirai, afin que le postillon ne puisse me voir. Voilà de quoi lui payer sa première poste.

      Et l'étranger, désigné sous le titre de baron, remit à Baptiste une poignée d'assignats.

      — Ah! monsieur, dit celui-ci, mais il y a là de quoi payer le voyage jusqu'à Lyon!

      — Contente-toi de le payer jusqu'à Valence, sous prétexte que je veux dormir; le reste sera pour la peine que tu vas prendre à faire les comptes.

      — Dois-je mettre la valise dans le coffre?

      — Je l'y mettrai moi-même.

      Et, prenant la valise des mains du domestique, sans laisser voir qu'elle pesât à sa main, il s'achemina vers la salle à manger, tandis que Baptiste s'acheminait vers le cabaret voisin, en mettant de lordre dans ses assignats.

      Comme l'avait dit l'étranger, le chemin lui était familier; car il s'enfonça dans un corridor, ouvrit sans hésiter une première porte, puis une seconde, et, cette seconde porte ouverte, se trouva en face d'une table élégamment servie.

      Une volaille, deux perdreaux, un jambon froid, des fromages de plusieurs espèces, un dessert composé de fruits magnifiques, et deux carafes contenant, l'une du vin couleur de rubis, et l'autre du vin couleur de topaze, constituaient un déjeuner, qui, quoique évidemment servi pour une seule personne puisqu'un seul couvert était mis, pouvait, en cas de besoin, suffire à trois ou quatre convives.

      Le premier soin du jeune homme, en entrant dans la salle à manger, fut d'aller droit à une glace, d'ôter son chapeau, de rajuster ses cheveux avec un petit peigne qu'il tira de sa poche; après quoi, il s'avança vers un СКАЧАТЬ