Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 8 - (Q suite - R - S). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 8 - (Q suite - R - S) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc страница 3

СКАЧАТЬ barlongue placée le long des murs du cloître ou dans le réfectoire même. Un enfoncement ménagé dans la maçonnerie la reçoit. On voit encore des niches de lavabo à l'abbaye de la Luzerne, près Avranches, et à l'abbaye de Beaufort (Normandie). Un des plus beaux réfectoires d'abbayes est celui qui fut construit au commencement du XIIIe siècle, dans le prieuré clunisien de Saint-Martin des Champs, à Paris. Cette salle, dont la composition est attribuée à tort à Pierre de Montereau, puisque, lorsqu'elle fut élevée, ce maître des oeuvres devait être encore enfant, se compose de deux rangs de voûtes posant sur des colonnes très-délicates de pierre de liais. De belles fenêtres à rosaces l'éclairent latéralement et par les bouts. Celles-ci sont percées dans des pignons. La porte de ce réfectoire, d'un style admirable, donnait sur le cloître, en face du lavabo, placé dans un des angles de ce cloître. Une chaire de lecteur s'ouvre sur l'un des côtés (voy. CHAIRE, fig. 3) 9. L'abbaye de Sainte-Geneviève (aujourd'hui lycée Napoléon) conserve encore son ancien réfectoire du XIIIe siècle: c'est une grande salle voûtée en arcs ogives sans épine de colonnes.

      Le réfectoire de l'abbaye Saint-Germain des Prés, à Paris, était une des oeuvres remarquables de Pierre de Montereau. Bâti vers 1240, par l'abbé Simon, ce réfectoire avait cent quinze pieds de long sur trente-deux de largeur (40 mètres sur 10). Il n'avait pas d'épine de colonnes au milieu, et la clef des voûtes s'élevait à près de 16 mètres au-dessus du sol. Seize fenêtres décorées de vitraux l'éclairaient, huit de chaque côté. Sa construction, au dire de D. Bouillart, était d'une apparence très-déliée. La chaire du lecteur, très-ouvragée et soutenue sur un cul-de-lampe de pierre dure, se composait de deux assises décorées d'un cep de vigne ajouré 10. Le réfectoire de l'abbaye royale de Poissy, bâti par Philippe le Bel, était plus vaste encore; il avait dans oeuvre 47 mètres de longueur sur 12 de largeur, et les clefs de voûtes étaient posées à 20 mètres au-dessus du sol. C'était une admirable construction du XIVe siècle, qui subsista jusque sous le premier empire. Ce réfectoire n'avait pas d'épines de colonnes.

      Contrairement à l'usage, le réfectoire de l'abbaye royale de Poissy était planté perpendiculairement à l'église, à l'extrémité sud du transsept, donnant d'ailleurs sur un des côtés du cloître.

      Sauf quelques détails, tels que les lavabo et les chaires de lecteurs, les réfectoires rentrent dans les programmes ordinaires des salles. Nous ne croyons pas devoir en donner ici des figures, qui trouvent leur place dans l'article spécialement destiné aux salles. C'est donc à cet article que nous renvoyons nos lecteurs.

      Les réfectoires des communautés du moyen âge n'ont plus d'analogues dans nos édifices, tels que lycées, séminaires. Il faut passer la Manche, et aller en Angleterre pour trouver encore dans les vieilles universités de Cambridge et d'Oxford les dispositions vastes, saines, bien entendues, qui rappellent celles de nos anciens réfectoires d'établissements français. Encore les réfectoires des communautés d'Angleterre sont-ils couverts par des charpentes lambrissées et bien rarement voûtés en maçonnerie. Les réfectoires de nos grands établissements français sont aujourd'hui des salles mal aérées, basses sous plafond, surmontées d'étages, tristes, s'imprégnant d'une odeur nauséabonde, et font regretter les dispositions si larges et bien étendues du moyen âge. En cela, nous aurions quelque chose à leur prendre.

      Les châteaux n'avaient pas, à proprement parler, de réfectoires. Si l'on réunissait un grand nombre de convives, la grand'salle était transformée en réfectoire, mais cela n'avait lieu qu'à l'occasion de certaines solennités. Les garnisons, divisées par postes, prenaient leurs repas séparément dans chacun de ces postes, et le seigneur se faisait servir avec sa famille dans le donjon ou dans ses appartements. (Voy. SALLE.)

       REMPART, s. m.--Voy. ARCHITECTURE MILITAIRE, CHÂTEAU, COURTINE, CRÉNEAU, HOURD, MÂCHICOULIS, SIÉGE.

       REPOSOIR, s. m. Il ne s'agit point ici de ces ouvrages provisoires en tentures, que l'on élève pour permettre aux processions de la Fête-Dieu de stationner pendant quelques instants, mais de petits édifices que l'on élevait sur le bord des grandes routes pour offrir un abri aux voyageurs, un asile et un lieu de prière. On rencontre encore beaucoup de ces édicules le long des voies publiques en Italie, mais ils sont devenus très-rares en France. On a pensé qu'ils étaient avantageusement remplacés par les brigadiers de gendarmerie, ce qui est certain. Mais il n'était pas nécessaire pour cela de les détruire.

      Quelques-uns de ces monuments ont été convertis en chapelles, et les contrées du centre de la France en conservent encore sous ce titre. Ce ne sont plus toutefois des refuges ouverts pendant la tempête, mais des sacraires où, à certaines occasions, le prêtre le plus voisin vient dire une messe. Nous ne connaissons qu'un seul de ces édicules ayant la double destination de refuge et de lieu de prière, conservé dans le nord de la France. Il est situé près de Fismes, sur le bord de l'ancienne voie romaine allant de Reims à Soissons. Encore le couronnement de ce petit monument a-t-il été refait à la fin du XVIe siècle. Il fut bâti par Enguerrand de Courcelles, en 1265. Nous en donnons le plan (fig. 1).

      Un autel remplit le fond de la cellule. Une piscine est ménagée dans le mur de droite. Une voûte en arc d'ogives ferme cette cellule, et le mur du devant est percé d'une porte et de deux claires-voies. Nous traçons en A le détail du jambage de la porte avec une des claires-voies. La porte n'était fermée qu'au loquet, afin d'empêcher les bestiaux d'entrer dans la cellule. Les claires-voies n'étaient pas vitrées, mais munies de barres de fer verticales, comme l'indique le détail A.

      La figure 2 donne la coupe de ce reposoir, et la figure 3, son élévation perspective, avec le couronnement restauré 11. Six grands arbres séculaires et probablement replantés à la même place, forment un ombrage sur le monument, lequel était couvert, semblerait-il, par des dalles, afin d'offrir un abri plus sûr et d'éviter des réparations.

      Les deux niches latérales, refaites au XVIe siècle, sont veuves de leurs statues, et le crucifix que nous avons replacé sous le pignon n'existe plus. Mais au-dessus du linteau de cette porte on voit encore la petite niche carrée qui était destinée à contenir un falot. Un mur de soutènement, avec deux degrés, borde la voie publique, et laisse une terrasse en avant de l'édicule.

       RESTAURATION, s. f. Le mot et la chose sont modernes. Restaurer un édifice, ce n'est pas l'entretenir, le réparer ou le refaire, c'est le rétablir dans un état complet qui peut n'avoir jamais existé à un moment donné. Ce n'est qu'à dater du second quart de notre siècle qu'on a prétendu restaurer des édifices d'un autre âge, et nous ne sachions pas qu'on ait défini nettement la restauration architectonique. Peut-être est-il opportun de se rendre un compte exact de ce qu'on entend ou de ce qu'on doit entendre par une restauration, car il semble que des équivoques nombreuses se sont glissées sur le sens que l'on attache ou que l'on doit attacher à cette opération.

      Nous avons dit que le mot et la chose sont modernes, et en effet aucune civilisation, aucun peuple, dans les temps écoulés, n'a entendu faire des restaurations comme nous les comprenons aujourd'hui.

      En Asie, autrefois comme aujourd'hui, lorsqu'un temple ou un palais subissait les dégradations du temps, on en élevait ou l'on en élève un autre à côté. On ne détruit pas pour cela l'ancien édifice; on l'abandonne à l'action des siècles, qui s'en emparent comme d'une chose qui leur appartient, pour la ronger peu à peu. Les Romains restituaient, mais ne restauraient pas, et la preuve, c'est que le latin n'a pas de mot qui corresponde à notre СКАЧАТЬ



<p>9</p>

La monographie complète du réfectoire de Saint-Martin des Champs est gravée dans la Statistique monumentale de Paris, sur les dessins de feu Lassus. Ce réfectoire sert aujourd'hui de bibliothèque au Conservatoire des arts et métiers.

<p>10</p>

Voyez l'Hist. de Saint-Germain des Prés, par D. Bouillart, p. 123.

<p>11</p>

M. Leblan, architecte, a bien voulu relever pour nous ce curieux reposoir.