Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
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СКАЧАТЬ nervures des voûtes, mais il y a absence de bleu, le gris remplaçant parfois cette couleur. Le vert et le gris ardoise entrent sans difficultés dans cette harmonie simple, et il semble que les artistes du XIIe siècle et du commencement du XIIIe aient reculé devant l'emploi du bleu, qui, comme nous le disions tout à l'heure, exige immédiatement l'application de tons variés entre le bleu et le rouge, ou le bleu et le jaune. Il existe, dans l'édifice connu à Poitiers sous le nom de temple de Saint-Jean, des peintures du XIIe siècle qui présentent les combinaisons les plus riches de l'harmonie simple. L'une des faces de la salle principale présente avec des figures colorées en jaune, en brun rouge clair, en vert, en gris vert et gris ardoise, des litres dont nous donnons (fig. 8) deux échantillons.

      Celle A forme la frise supérieure sous la charpente, celle B tient lieu d'appui relevé sous les fenêtres. La litre A est composée d'un méandre obliqué, coloré en brun rouge, en ocre jaune et en vert sur fond blanc laiteux. Un filet blanc forme la rive antérieure du méandre. Chaque ton du méandre est modelé au moyen de hachures parallèles d'un ton plus sombre, et d'autant plus larges qu'elles s'approchent du bord postérieur de chaque face oblique. Les tons sont marqués ainsi: le brun rouge par la lettre R, le jaune J, le vert V, le gris ardoise BG. Les oiseaux sont brun rouge et jaune. Les points blancs sont piqués régulièrement sur les bandes horizontales supérieure et inférieure. À cette époque, au XIIe siècle, les points blancs (perlés) sont très-fréquemment employés sur les tons brun rouge et jaune, souvent à cheval entre les deux: c'était un moyen de donner une apparence précieuse à la peinture et d'enlever aux tons absolus leur crudité. Il est bon d'observer que les bruns rouges de ces peintures sont d'un éclat remarquable, transparents et vifs, sans avoir la dureté du rouge (vermillon). La seconde litre que nous donnons en B est sur fond gris ardoise clair; les palmes sont jaunes, les fleurons brun rouge clair avec milieu brun rouge foncé; ces ornements jaune et rouge sont bordés d'un filet blanc. L'harmonie des tons de cette litre est d'une extrême finesse et en même temps très-solide. On peignait à cette époque, c'est-à-dire pendant le XIIe siècle et le commencement du XIIIe, la plupart des édifices non-seulement à l'intérieur, mais à l'extérieur, et le système harmonique de ces peintures repose toujours, sauf de bien rares exceptions, sur cette donnée simple. Cependant on fabriquait alors une quantité de vitraux qui acquéraient d'autant plus de richesse comme couleur que les fenêtres devenaient plus grandes (voy. VITRAIL). Si avec des fenêtres d'une petite dimension, garnies de vitraux blancs ou très-clairs, sous une lumière diffuse et peu étendue, il était naturel et nécessaire même de donner à la peinture décorative un aspect brillant et doux à la fois, lorsque l'on prit l'habitude de placer des verrières très-colorées devant les baies destinées à éclairer les intérieurs, cette peinture claire, d'un ton transparent, était complétement éteinte par l'intensité des tons des nouveaux vitraux. Le bleu, le rouge, entrant pour une forte part dans la coloration translucide des vitraux, donnaient aux tons ocreux un aspect louche, les verts devenaient gris et ternes, les blancs disparaissaient ou s'irisaient. Avec les vitraux colorés il fallait nécessairement des tons brillants sur les murs et encore, ces tons, pour prendre leur valeur, devaient être accompagnés et cernés de noirs comme les verres colorés eux-mêmes. Aussi voyons-nous que pendant le XIIIe siècle, l'harmonie de la peinture décorative des intérieurs se modifie. Si par des raisons d'économie on conserve encore de grandes surfaces claires, occupées seulement par des filets; les litres, les nervures des voûtes, leurs tympans, se colorent vivement, et cette coloration est d'autant plus brillante qu'elle s'éloigne de l'oeil. Nous avons un exemple remarquable de cette transition du système harmonique de la peinture décorative dans l'ancienne église des Jacobins d'Agen, bâtie vers le milieu du XIIIe siècle. Cette église, conformément à l'usage établi par l'ordre de Saint-Dominique, se compose de deux nefs séparées par une épine de piliers. Peinte avec simplicité, on voit cependant que l'artiste a voulu soutenir l'effet éclatant des verrières qui autrefois garnissaient les fenêtres.

      Chacune des travées de cette salle (fig. 9) se compose d'une tapisserie bornée par les piliers engagés et par le formeret de la voûte. Une fenêtre, relativement étroite, s'ouvre au milieu de la tapisserie. En A est couché un ton uni sombre, avec filets; au-dessus est tracé un appareil brun rouge sur fond blanc, de B en C.

      Une litre est peinte en D; le tympan au-dessus de cette litre est occupé par un fond blanc avec deux écussons armoyés. Cette peinture est donc d'une extrême simplicité; les voûtes sont plus riches: non-seulement les nervures sont colorées ainsi que les clefs, mais sous les intrados des triangles de remplissages, de la clef centrale à celle des formerets, de larges bandes A (fig. 10) sont couvertes d'ornements peints d'un beau dessin. Quant aux triangles B, ils ne sont occupés que par un appareil tracé en brun rouge sur fond blanc. Or il est nécessaire d'observer que la couleur bleue n'apparaît que dans les ornements des voûtes et sur les écus armoyés. Toutes les tapisseries ne reçoivent d'autres tons que le jaune ocre, le brun rouge, le noir et le blanc laiteux.

      Ainsi, figure 11, les litres indiquées en D dans la travée, figure 9, sont colorées au moyen de deux tons, ocre jaune et brun rouge avec parties blanches et fonds noirs. Les tiges de l'enroulement sont alternativement jaunes et rouges, ainsi que les feuilles et les grappes. Les feuilles jaunes sont cernées de rouge et de noir sur fond blanc, les feuilles rouges sont couchées à plat. Deux larges filets, jaunes en dedans, rouges en dehors, arrêtent le fond noir. Ces litres varient comme dessin à chaque travée, tout en conservant la même harmonie. Les nervures des voûtes, dont la section est donnée en S (fig. 12), sont couvertes chacune d'ornements variés dont nous donnons en G et en H deux échantillons. Ces ornements ne tiennent compte qu'à demi du profil, c'est-à-dire que, pour le dessin G, le milieu a de la nervure étant en a', l'arête b tombe en b', et l'arête c en c'.

      Pour la nervure C les rosettes sont pourpres, bordées d'un filet blanc intérieur et d'un filet noir extérieur; l'oeil est jaune, bordé de noir; le fond est bleu intense (indigo). Pour la nervure H, les amandes sont jaunes bordées d'un filet blanc à l'intérieur, noir à l'extérieur; les rosettes sont blanches, avec oeil jaune bordé d'un filet noir; les fonds sont alternativement bleu intense et rouge; le vert apparaît dans d'autres nervures. Quant aux bandes des clefs de triangles, nous en donnons un échantillon dans la figure 13.

      Toutes ces bandes sont variées, mais toutes détachent le dessin sur fond noir; les méandres sont brun rouge, bleu clair et blanc avec filet blanc sur la rive antérieure. Les palmettes sont blanches avec quelques parties bleu très-clair, modelées au moyen de hachures brun rouge. Le système harmonique de coloration de cette salle,--car cette église n'est à proprement parler qu'une salle à deux nefs,--est celui-ci: pour les parties verticales, les murs, les tapisseries, harmonie la plus simple, celle qui est donnée par les tons jaune et rouge sur fond blanc avec rehauts noirs; mais pour les voûtes, plus éloignées de l'oeil et que l'on ne voit qu'à travers l'atmosphère colorée par la lumière passant à travers des verrières brillantes de ton, harmonie dans laquelle le bleu clair et le bleu intense interviennent, et par suite le pourpre et le vert, le tout rehaussé par des fonds et filets noirs: fonds noirs pour les bandes des triangles des voûtes, filets noirs seulement pour redessiner les ornements des nervures. En effet, le redessiné noir devient nécessaire dès que l'on passe à une harmonie composée des trois couleurs, jaune, rouge et bleu avec leurs dérivés; car s'il y a une si grande différence de valeur entre le jaune et le rouge brun, qu'il n'est pas nécessaire de séparer le hrun rouge du jaune ocre par un trait noir, il n'en est pas ainsi quand on juxtapose deux couleurs dont les valeurs sont peu différentes, comme le pourpre et le bleu, le bleu et le rouge, le bleu clair et le СКАЧАТЬ