Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3 - (C suite). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
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СКАЧАТЬ chevrons qui viennent s'appuyer sur le poinçon d'un seul côté; elle devait nécessairement sortir de son plan vertical. Voici comment les charpentiers évitèrent ce danger.

      La fig. 10 donne la coupe du comble suivant l'axe longitudinal du chevet. Q est la ferme-maîtresse dont la fig. 9 donne l'élévation; en R sont tous les chevrons de croupe qui viennent buter contre son sommet. Afin de la maintenir dans le plan vertical Q S, les charpentiers posèrent les grandes pièces inclinées T U, V X. La première vient s'asseoir sur les sablières en T, se réunit à la seconde par une coupe en V. La seconde s'assemble à l'extrémité du poinçon de la cinquième ferme-maîtresse, et de ce point deux pièces verticales, posées en forme de V, vont reporter la poussée à une assez grande distance sur les bouts d'un entrait, afin d'éviter l'écartement des branches de ce V, ainsi que l'indique la fig. 11.

      La pièce inclinée T U est, de plus, suspendue au poinçon Q et aux deux faux poinçons Y Z par de fortes moises et des clefs. C'est sur cette pièce inclinée T U, qui est par le fait un arbalétrier très-résistant, que viennent s'assembler les trois contre-fiches C' destinées à contrebuter la poussée des chevrons de croupe et à maintenir la ferme-maîtresse dans son plan vertical Q S. Les autres parties de cette charpente n'ont pas besoin de longues explications pour être comprises. Les sablières circulaires de la croupe sont maintenues par un entrait D' suspendu par une paire de moises F' au chevron d'axe qui est doublé et remplit les fonctions d'un arbalétrier, car il s'assemble sur l'extrémité de la pièce inclinée T U. Cet entrait porte un châssis a b c (fig. 8) destiné à soulager la première enrayure. Le roulement de toute la charpente est évité par les liens H (fig. 10) qui s'assemblent dans les entre-toises d'axes horizontales posées sous la seconde enrayure et dans les poinçons des fermes. Le voligeage en chêne maintient les chevrons dans leur plan vertical, cette charpente étant, comme toutes les charpentes de cette époque, dépourvue de faîtage et de pannes. Le fléchissement des chevrons est évité au moyen des entraits retroussés K' qui sont soulagés par les entre-toises d'axe R', et les doubles entre-toises P' s'assemblent dans les moises pendantes N de la fig. 9.

      Pour peu que l'on soit familier avec l'art de la charpenterie, il n'est pas difficile de reconnaître les défauts de cette charpente; il n'y a pas de solidarité entre les fermes; les liens destinés à empêcher le roulement sont trop petits et trop faibles pour remplir cet office d'une manière efficace, et la preuve en est que, quand on enlève la volige, on fait remuer à la main les fermes-maîtresses et surtout les chevrons portant ferme. Le moyen adopté pour arrêter la poussée des chevrons de croupe sur le poinçon n'est qu'un expédient. Déjà, cependant, la charpente de la nef de la cathédrale de Paris, dressée peut-être quelques années après celle du choeur, présente sur celle-ci de notables améliorations. Mais c'est surtout en étudiant la souche de la flèche de la même église, qui s'élevait au centre de la croisée, qu'on est frappé de l'adresse et surtout de la science pratique des charpentiers du XIIIe siècle, et cette souche de flèche a dû être mise au levage vers 1230 au plus tard. Nous aurons l'occasion d'y revenir ailleurs. Nous devons suivre notre discours et faire voir les perfectionnements introduits successivement dans le système des fermes.

      La charpente de l'église cathédrale de Chartres, brûlée en 1836, et qui paraissait appartenir à la seconde moitié du XIIIe siècle, présentait déjà de grandes améliorations sur le système adopté dans la construction de celle de la cathédrale de Paris; nous n'en possédons malheureusement que des croquis trop vagues pour pouvoir la donner à nos lecteurs. Cela est d'autant plus regrettable que cette charpente était immense, qu'elle n'avait subi aucune altération, que les bois étaient tous équarris à vive arête et parfaitement assemblés.

      La charpente de l'église de Saint-Ouen de Rouen, qui date du XIVe siècle, dans des dimensions médiocres, nous donne un bel exemple de l'art de la charpenterie à cette époque. Nous en donnons (12) en A la coupe transversale, et en B la coupe longitudinale. Déjà cette charpente possède un sous-faîte C sur lequel viennent se reposer les têtes des chevrons assemblés à mi-bois et maintenus par des chevilles. Ce sous-faîte est lui-même maintenu horizontal par les grandes croix de Saint-André D et par les liens E.

      Les croix de Saint-André et les liens assemblés à mi-bois ont encore pour fonction d'empêcher le déversement des fermes et de tout le système. Les grandes moises pendantes F, attachées en G à l'arbalétrier par des chevillettes de fer, en H à l'entrait retroussé par des clefs de bois, suspendent l'entrait en I déjà suspendu en M au poinçon. Le poids de ces moises pendantes, en chargeant les esseliers K, exerce une poussée en L qui arrête la flexion de l'arbalétrier sur ce point. Une particularité de cette charpente, c'est que le pied des chevrons et leurs jambettes ne s'assemblent pas dans des blochets conformément à l'usage ordinaire, mais dans des doubles sablières posées sur les semelles qui reçoivent les bouts des entraits et chevillées avec celles-ci. La fig. 13 donne en N le détail de l'assemblage des chevrons et jambettes dans les doubles sablières, en P le détail des moises pendantes F, et en O le moyen de suspension de l'entrait au poinçon. On remarquera que le fer est déjà employé dans cette charpente en R et en S pour attacher les moises pendantes. Ce sont des chevillettes à tête carrée.

      La charpente de l'église de Saint-Ouen de Rouen est exécutée avec grand soin; les bois sont parfaitement équarris, chanfreinés sur les arêtes; les grandes moises pendantes, dont le détail est figuré en P (fig. 13), sont élégies, car ces bois n'agissant que comme suspension, il n'était pas nécessaire de leur laisser toute leur force entre les clefs. Nous trouvons à Saint-Germer une charpente posée au-dessus des voûtes de la chapelle, à la fin du XIIIe siècle, qui a la plus grande analogie avec celle-ci et qui est de même exécutée avec une rare perfection. Mais les difficultés étaient autres et plus sérieuses lorsqu'il s'agissait de dresser une charpente sur une de ces nefs, telle, par exemple, que celle de la cathédrale de Reims. Sous le règne de Louis XI, un incendie détruisit toutes les couvertures de cet édifice; on les reconstruisit à neuf vers la fin du XVe siècle et le commencement du XVIe. Alors l'art de la charpenterie était arrivé à son apogée; l'esprit des constructeurs s'était particulièrement appliqué à perfectionner cette branche de l'architecture, et ils étaient arrivés à produire des oeuvres remarquables au double point de vue de la combinaison et de l'exécution. Le bois se prêtait mieux que toute autre matière aux conceptions architectoniques du XVe siècle, et on l'employait à profusion dans les constructions civiles et religieuses; il ne faut donc pas s'étonner si, à cette époque, les charpentiers étaient arrivés à un degré d'habileté supérieur.

      Nous donnons (14) une coupe transversale et une coupe longitudinale de la charpente de la cathédrale de Reims. Les fermes sont taillées sur un triangle qui n'a pas moins de 14m,40 de base sur 15m,50 de hauteur du sommet à la base; les arbalétriers et les chevrons ont 17m,00. La coupe longitudinale C est faite dans l'axe sur le poinçon; celle D est faite suivant la ligne ponctuée A B; la coupe transversale est faite entre deux fermes. La partie inférieure des chevrons de E en F est appuyée sur deux cours de pannes portées par une contre-fiche G posée sous l'arbalétrier et venant s'assembler dans l'entrait et à la tête d'un poteau H. Ce poteau est suspendu par les sous-arbalétriers moises I, et suspend lui-même l'entrait en K au moyen de deux moises pendantes et des clefs de bois, ainsi que l'indique la coupe longitudinale D. Il reçoit à son sommet deux entre-toises L M qui arrêtent le déversement de la partie intermédiaire de la charpente au moyen de liens et de croix de Saint-André. Dans la partie supérieure, le fléchissement des chevrons est seulement arrêté par des jambettes N et des entraits retroussés O. Quant aux arbalétriers des fermes, ils sont rendus rigides par deux entraits retroussés P R, СКАЧАТЬ