Victor, ou L'enfant de la forêt. Ducray-Duminil François Guillaume
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СКАЧАТЬ il fait recommencer; pour le coup, une voix très-forte lui crie à travers un des créneaux de la première tour: On n'a rien de commun à démêler ici avec un brigand tel que toi; fuis, si tu crains la mort. – Moi, fuir! s'écrie Roger en se retournant vers sa troupe. Amis, secondez ma fureur, chargez…

      À l'instant deux pièces de canon sont dirigées sur le pont-levis, dont une des chaînes est sur-le-champ rompue; mais un feu roulant part aussi-tôt des créneaux et du sommet des tours du château; la troupe de Roger en est ébranlée: elle se rallie. L'aile droite dirige toujours ses attaques sur le pont-levis, qu'elle voudrait briser; tandis que l'aile gauche roule des terres, des pierres et des pièces de bois, pour remplir le fossé et tenter l'assaut… Le feu des assiégés redouble, et fait mordre la poussière à plusieurs des brigands. Le château ne paraît plus qu'un vaste incendie, tant les batteries, placées avec adresse, sont bien dirigées… Victor est par-tout, par-tout il commande; il ranime sa petite troupe, dont le courage croît à mesure que l'action s'engage. Valentin fait aussi des merveilles; c'est lui qui dirige les canonniers. Tout s'ordonne, tout se fait sans bruit, sans confusion, tandis que le plus grand désordre règne parmi les brigands, qui poussent des cris de rage. Victor ne peut s'empêcher de frémir en voyant ces barbares relever les corps de leurs camarades morts à leurs côtés, et les précipiter dans le fossé pour le combler plus vîte, et arriver jusqu'au château en foulant aux pieds les cadavres de leurs amis…

      La nuit la plus obscure couvre ce combat sanglant, éclairé seulement par les torches que portent une partie des brigands, et par la lueur rapide et pâle de la mousquetterie. Elle s'avance, cette nuit terrible, et la victoire paraît couronner les efforts des assiégés. Roger a déjà perdu un grand nombre des siens; il prend une résolution subite: l'ordre en est donné, et sur-le-champ il est exécuté. Les colonnes commandées par Dragowitz et Sermoneck se jettent à la nage dans le fossé, et soutenues par les poutres qui flottent sur l'eau bourbeuse, elles cherchent à briser le pont-levis à coups de hache, tandis que trois autres colonnes, commandées par Alinditz, Morneck et Roger lui-même, attaquent le côté du château qui donne de plain-pied sur la campagne, et où se trouve la petite porte par laquelle Victor et Valentin ont été secourir madame Wolf, au commencement de cette histoire. Le pont-levis résiste aux efforts de Dragowitz et de sa cohorte; une grêle de pierres tombe du haut du château sur ces misérables; ils sont noyés ou blessés pour la plupart, et, forcés d'abandonner leur entreprise; Sermoneck et les siens vont rejoindre Roger, dont les succès paraissent plus certains. En effet, la petite porte est enfoncée; Roger plein d'espoir et d'audace, se précipite dans l'intérieur du château; il est bientôt suivi d'une partie de ses troupes, et les assiégés, vainqueurs jusques-là, sont perdus, perdus sans ressource, si le courage et la prudence les abandonnent…

      Étourdi par le grand nombre de précautions que Victor avait dû prendre avant l'action, il n'avait pas pensé à cette petite porte, qui était le côté le plus faible du château: il eût fallu la faire murer: Victor l'avait oublié; il ignorait même dans ce moment qu'elle était enfoncée, et ne songeait qu'à foudroyer le reste des malheureux qui s'étaient jetés à la nage pour briser le pont-levis… Pauvre Victor! la foudre est sur sa tête, et tu ne l'entends pas gronder!.. Il était donc encore sur la tour du midi, l'intrépide Victor, occupé à donner des ordres, lorsqu'il entend crier à ses côtés: Les voilà, les voilà! ils nous poursuivent!..

      Victor ne comprend rien à ces cris; mais il voit ses gens courir, se culbuter, se précipiter les uns sur les autres. Qu'y a-t-il donc? parlez? – Ils sont là, là, dans le château; ils montent, sauvons-nous…

      Un trait de lumière vient frapper Victor, il se rappelle sa négligence et frémit; mais il ne se décourage point. Mon père, dit-il au baron qui combat à ses côtés, mon père, ralliez vos gens, et qu'ils me suivent…

      Le baron ranime une partie des fuyards: tous jurent de mourir plutôt que d'abandonner leur jeune commandant; et Victor, suivi de Valentin et d'une vingtaine de gens d'élite, descend précipitamment; il entend bientôt les hurlemens de joie des brigands, qui, bien qu'ils n'occupassent encore qu'une seule tour, se croyaient déjà en possession du château. Cette tour renfermait justement une quantité considérable de matières combustibles, que Victor y avait amoncelées d'avance, dans l'intention de brûler les richesses du baron, plutôt que de les céder lâchement à Roger, en cas que la victoire se décidât en faveur de ce dernier. Victor fait précipiter de la paille, des monceaux de lambris et des bois enduits de résine, dans les escaliers que les brigands montent déjà précipitamment. Le feu est mis par-tout à ces matières inflammables; une quantité considérable de soufre est allumée; et, pendant que les assiégeans étourdis de cet incendie inattendu, délibèrent, glacés d'effroi, sur le parti qu'ils ont à prendre, toutes les portes de fer, qui peuvent communiquer de la tour à l'intérieur du château, sont fermées sur eux. Tranquille sur ce point, et bien persuadé que le feu qu'il vient d'allumer ne peut percer les voûtes de la tour, ni s'étendre dans le château, Victor remonte pour prendre d'autres précautions; mais, ô terreur!.. un grouppe de brigands se présente à lui: c'est Roger à la tête de quelques-uns des siens!..

      Roger, entraîné par son courage et l'espoir du succès, avait couru plus vîte que Morneck, Alinditz et leur troupe; il n'était déjà plus dans la tour au moment où Victor en avait fait fermer les portes. Roger se croyant suivi de ses amis, parcourait les longs corridors du premier corps de bâtiment, et poursuivait les gens du baron qui fuyaient devant lui. Qu'on juge de sa joie en voyant s'offrir à ses yeux justement l'ennemi qu'il cherche, Fritzierne presque seul, accompagné d'un jeune homme et de quelques vieux serviteurs! – Rends-toi, lui crie Roger, ou tu es mort. – Roger! s'écrie à son tour le vieux baron. – Roger! reprend Victor étonné, tu es ce monstre? tu vas périr…

      À l'instant commence le plus terrible combat; les coups les plus violens se portent de part et d'autre; Roger, qui attend toujours le secours des siens, voit tomber à ses côtés le pesant Sermoneck, et la plupart de ses compagnons; c'est Victor qui les abat à ses pieds, Victor est comme l'ouragan furieux qui entraîne dans sa course les arbres les plus élevés. Victor garantit des coups de Roger son protecteur, qui, malgré son âge, fait encore des prodiges de valeur; Victor voudrait faire mordre la poussière au traître Roger; mais les amis du perfide le défendent, et s'exposent seuls aux coups de Victor, qui les immole comme la pierre, qui roule du haut du rocher, écrase des milliers d'insectes qui rampaient dans la plaine… Enfin Roger est resté seul de sa petite troupe; Roger écumant de rage, recule quelques pas en mutilant du pied les cadavres de ses complices… Victor lui crie de se rendre; le scélérat l'ajuste avec un pistolet; il va tirer! le jeune héros se précipite sur le monstre, le désarme, l'étend à ses pieds, et n'écoutant plus que sa juste colère, il le saisit par les cheveux, et se dispose à lui couper la tête…

      Roger va donc périr… il va donc subir la peine due à ses forfaits… Mais, ô surprise! quel est l'imprudent qui vient suspendre les coups de Victor?.. C'est une femme! c'est madame Wolf!.. Malheureux, s'écrie-t-elle en arrêtant le bras de Victor prêt à frapper!.. jeune insensé! qu'allez-vous faire? – Madame!.. Ô crime! arrêtez! Dieu! je meurs!..

      CHAPITRE II.

      COUP DU SORT

      Madame Wolf perd connaissance; elle tombe, mais dans les bras de Clémence, qui la suivait, ignorant la cause de sa fuite précipitée… L'étonnement du vieux baron et de Victor est à son comble; Victor sur-tout est immobile d'effroi et de saisissement. Pendant que nos héros restent comme enchantés, Roger se relève; il fixe madame Wolf en pâlissant… Femme à qui je dois le tourment de ma vie, s'écrie-t-il, tu ne m'échapperas pas… oui, je te retrouverai…

      Il dit; et profitant de l'issue que lui offre un appartement ouvert devant lui, il s'y sauve, ouvre une croisée, et se précipite dans le fossé, sans que Victor, Fritzierne, ni aucun des assistans songent à le retenir.

      Laissons Roger gagner la rive à la СКАЧАТЬ