Les Mystères du Louvre. Féré Octave
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Название: Les Mystères du Louvre

Автор: Féré Octave

Издательство: Public Domain

Жанр: Историческая литература

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СКАЧАТЬ quelques mots étaient indispensables pour aller au-devant d'une objection que nous voyons poindre aux lèvres de nos lecteurs et surtout de nos lectrices, sur les aveux singuliers échangés entre Louise de Savoie et la duchesse d'Alençon. La mère n'avait pas dissimulé à sa fille ses anciennes complaisances pour le chancelier, et la fille n'avait pas hésité un instant à s'ouvrir à sa mère de sa passion pour le chevalier de Pavanes.

      Dans cette cour où la galanterie était à l'ordre du jour, un amant n'était pas un péché, mais un honneur.

      Mais si la régente n'attachait aucune conséquence à la révélation d'un fait, sans doute déjà connu de sa fille, il est vraisemblable que, son exaltation assoupie, elle eût voulu ressaisir l'aveu autrement compromettant arraché à son trouble.

      Cependant, en cette minute, Marguerite paraissait céder moins à l'impression de ce cri terrible, qu'à l'excès de la fatalité appesantie sur le plus tendre, le plus sincère amour qu'elle eût encore éprouvé.

      Un long silence avait succédé à cette scène tumultueuse, à ces emportements de langage.

      La duchesse d'Alençon, anéantie, restait enfoncée entre les coussins du grand fauteuil sculpté où elle s'était jetée, en sentant ses forces défaillir. Ses paupières closes, sa tête pâle, ses lèvres décolorées, entr'ouvertes comme pour exhaler un dernier souffle, ses mains blanches immobiles, se détachaient sur l'étoffe noire de son deuil, comme ces profils d'ivoire incrustés dans du marbre brun par les sculpteurs mosaïstes.

      La régente restait assise non loin d'elle, devant la table où se trouvait encore la liste des prisonniers, avec le nom de Jacobus de Pavanes, sillonné par la plume de Duprat d'une large raie noire pleine de menaces.

      Elle se tenait silencieuse et immobile aussi, mais son œil perçant allait par alternatives de ce papier à sa fille, évitant toutefois de s'arrêter sur elle, par crainte d'être surpris dans ses investigations, et épiant le réveil de son affaissement.

      Elle attendit longtemps, puis enfin la princesse secoua sa torpeur par un léger mouvement de tête.

      Elle voulut essayer ses jambes qui l'avaient trahie tout à l'heure, mais elle se trouva brisée; alors, ses longs cils s'étant soulevés avec une morbidesse touchante, son premier regard vint rencontrer, suspendu au-dessus d'un dressoir d'ébène resplendissant de raretés artistiques, le portrait du roi.

      Tout le monde connaît cette toile, aujourd'hui placée dans la grande galerie du Louvre, et l'un des chefs-d'œuvre du Titien, le peintre des rois, le roi des peintres. C'est celle qui représente à mi-corps François Ier presque de profil, à l'époque où, jeune encore, il avait laissé croître sa barbe et rasé ses cheveux. Le successeur de Louis XII ne s'y rencontre pas sous les traits plus mignards et gracieux que nous offrent la plupart de ses autres portraits; mais on sent instinctivement, avant même de savoir le nom du peintre, qui est une garantie d'exactitude, que cette figure est vraie.

      Ce portrait est digne de l'artiste par lequel Charles-Quint se fit peindre trois fois, et auquel il disait en relevant son pinceau tombé à terre:

      – Vous m'avez rendu trois fois immortel.

      En revoyant ces traits, en retrouvant fixé sur elle ce regard toujours bienveillant pour ses moindres désirs, elle sentit plus amèrement la perte de cet appui généreux, le seul sur qui elle eût pu compter sans crainte de déception.

      – O mon frère, mon frère bien-aimé, s'écria-t-elle avec des sanglots dans la voix, en tendant ses mains jointes vers lui, où êtes-vous?.. On opprime votre sœur, le sang de votre sang, le cœur de votre cœur, et ses plaintes n'arrivent pas jusqu'à vos oreilles!.. Il ne me restait que vous pour famille, pour défenseur, et vous n'êtes plus ici pour me soutenir de votre main, pour me protéger de votre parole, pour me ranimer au souffle de votre tendresse.

      La duchesse d'Angoulême prêtait à ces invocations saccadées et douloureuses une attention singulière; elle semblait, à voir la fixité de sa prunelle sombre, entretenir un muet dialogue avec l'image de son fils.

      Cependant, Marguerite, oubliant quelles oreilles l'écoutaient, poursuivait avec une énergique et plaintive éloquence:

      – Si vous saviez, noble frère, de quelles tortures on accable cette sœur qui vous chérit à l'égal de Dieu, dont vous avez pour elle la clémence et la mansuétude; si vous saviez ce qu'on fait de votre beau royaume et de votre bon peuple pendant votre absence!.. Ne tardez plus, sinon vous ne retrouverez pas votre sœur, et la ruine de vos sujets sera complète…

      Cette perspective fut un coup de fouet qui excita sa fougue; elle se dressa devant sa mère avec l'autorité d'une reine qui ordonne et commande:

      – Si le roi était ici, madame, je n'eusse pas réclamé deux fois le salut du chevalier de Pavanes… Je ne veux pas savoir quels liens odieux enchaînent votre volonté à celle du premier ministre; je suis votre fille et non votre juge. Que vous ayez ajouté un mystère sanglant à ceux qui peuplent déjà les murs de ce Louvre maudit, c'est une affaire entre votre conscience et Dieu…

      Mais je ne veux pas qu'un meurtre soit ajouté à ces meurtres, un deuil à ces exécutions!.. Et puisque vous ne pouvez rien pour moi, madame, à tout prix… à tout prix, entendez-vous, il faut que le roi revienne!..

      Puissance merveilleuse d'un cœur loyal sur une nature corrompue, l'altière duchesse d'Angoulême ne se révolta pas contre cette sortie pleine de tempêtes et d'imprécations.

      Son amour pour ses enfants, sa seule vertu, suffit-il pour la retenir, ou plutôt, la conscience, le remords de ce pacte exécré qui la rendait la vassale de Duprat, lui causa-t-elle en cet instant une humiliation si grande, qu'elle n'osa relever sa tête assombrie?

      Toujours est-il qu'elle ne quitta de vue le portrait de son fils que pour s'absorber dans une méditation dont les calculs faisaient passer sur ses joues des lueurs empourprées, ou venaient contracter les plis de son front.

      La princesse, étonnée à son tour, la contemplait avec une vague terreur. Une voix secrète lui disait qu'il devait sortir de là quelqu'une de ces machinations violentes par lesquelles sa mère conjurait ou provoquait, suivant ses intérêts, les coups d'éclat. Cette voix, qui s'appelle intuition ou pressentiment, lui disait encore qu'il s'agissait d'elle surtout dans les plans qui bouillonnaient sous ce volcan.

      Lorsque la duchesse se décida à la regarder, la tempête avait disparu de ses traits; elle était calme, maîtresse d'elle-même; sa voix n'indiquait pas la moindre altération.

      – Ainsi, dit-elle en accentuant chaque mot de manière que la princesse n'en perdît pas un, vous souhaitez par-dessus toutes choses le retour du roi?

      – Auriez-vous trouvé le moyen de le racheter?.. s'écria Marguerite emportée déjà par son espoir, par sa confiance dans les grandes capacités de sa mère.

      Celle-ci poursuivit froidement:

      – Je suis convaincue comme vous que la grâce que je ne puis accorder, il la signerait, lui, sur votre prière…

      – N'est-ce pas, ma mère, vous en êtes sûre aussi!

      – Donc, j'ai conçu un projet…

      – Dites!..

      – Le roi ne pouvait, sans perdre cet honneur qu'il a retiré sauf de la défaite de Pavie, souscrire aux conditions de l'empereur… Celui-ci, après m'avoir jadis appelée sa mère, n'a pas eu assez СКАЧАТЬ