Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie. Berthier Louis-Alexandre
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie - Berthier Louis-Alexandre страница 2

Название: Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie

Автор: Berthier Louis-Alexandre

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

Серия:

isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/39325

isbn:

СКАЧАТЬ le prince Charles tirait tout de la Bohême; Desaix replia ses troupes, et la retraite de l'armée commença. Elle fut calme, sans désordre, telle qu'on pouvait l'attendre d'un homme froid, méthodique, comme celui qui en arrêtait les dispositions. En vain l'archiduc abandonnant les traces de l'armée de Sambre-et-Meuse, qui précipitait sa marche sur Neuwied, essaya-t-il d'intercepter nos derrières; en vain le général Saint-Julien chercha-t-il à nous déborder sur la droite; l'armée regagna les bords du Rhin, sans perte, sans échec. Ni les troupes descendues du Tyrol, ni celles qui la pressaient de front ne purent l'entamer. Reynier, que la confiance de son chef avait en quelque sorte investi du commandement, régla, disposa les marches, les mouvemens, avec une sagacité, un ensemble, qui lui méritèrent des éloges universels. Mais cette confiance si pleine, si entière, ne tarda pas à lui devenir fatale. La conduite de Moreau excita des soupçons. On le blâma d'avoir long-temps tenu secrets des projets coupables, et de ne les avoir divulgués que lorsque la connaissance ne pouvait plus en être utile. Du général les accusations descendirent au chef d'état-major. On refusa de croire qu'il n'y eût pas complicité; on ne put se persuader que dans l'intimité où ils étaient ensemble l'un ne fût pas au courant des projets de l'autre. Reynier fut victime de cette fausse conviction, et mis à la réforme. Desaix, qui s'intéressait vivement à lui, ne put, malgré ses instances, faire révoquer une mesure aussi rigoureuse1. Bonaparte fut plus heureux; il le plaça au nombre des généraux qui devaient former son état-major, et lui fit expédier des lettres de service pour l'armée qu'il allait conduire en Orient.

      MÉMOIRES DU GÉNÉRAL REYNIER SUR LES OPÉRATIONS DE L'ARMÉE D'ORIENT, OU DE L'ÉGYPTE APRÈS LA BATAILLE D'HÉLIOPOLIS

      CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

      SUR L'ORGANISATION PHYSIQUE, MILITAIRE, POLITIQUE ET MORALE DE L'ÉGYPTE

      Plusieurs voyageurs ont déjà fait connaître l'Égypte, et Volney, mieux que personne, a donné des idées générales sur l'état physique et politique de ce pays; mais aucun d'eux n'était appelé, par les circonstances et par ses fonctions, à l'étudier sous des rapports militaires et administratifs. Ces connaissances sont néanmoins indispensables pour juger les événemens militaires et politiques dont elle a été le théâtre, et pour apprécier les grandes espérances que cette brillante expédition pouvait donner pour les progrès de la civilisation, les développemens qu'elle procurait au commerce de la France dans l'Inde et la Méditerranée, et pour sentir enfin les causes de la perte de cette conquête.

      Je vais esquisser quelques considérations générales sur cette organisation: distrait continuellement par des occupations militaires, je n'ai pu observer beaucoup de détails politiques; mais les savans qui ont partagé les fatigues de l'armée d'Orient, et qui ont dû à ses travaux de pouvoir s'occuper entièrement de recherches intéressantes, les feront connaître. Mon but, en ce moment, est de donner aux lecteurs qui ne connaissent pas l'Égypte, un aperçu de son organisation, considérée sous les rapports de sa défense et de l'état politique des habitans.

      ORGANISATION PHYSIQUE

      L'Égypte est comme isolée du reste de la terre par des obstacles naturels: séparée de l'Asie par des déserts, un petit nombre de lieux bas, où l'on trouve de l'eau saumâtre, déterminent la route qu'une armée peut prendre pour venir l'attaquer. La côte plane de l'Égypte sur la Méditerranée, et les bouches du Nil, embarrassées par des bancs de sable, permettent seulement de débarquer sur quelques points connus. Bornée à l'ouest par des déserts immenses, elle est seulement exposée, de ce côté, aux émigrations des tribus arabes de la Barbarie. Séparée de la mer Rouge par un désert, elle craint peu d'être attaquée de ce côté: ses deux ports sur cette mer, n'offrent aucune ressource; à peine peut-on s'y procurer de l'eau; les vivres et les chameaux nécessaires pour passer le désert y doivent être envoyés d'Égypte.

      Deux chaînes de montagnes arides bordent le Nil dans la Haute-Égypte; elles laissent entre elles une vallée de quatre à cinq lieues de largeur, dans laquelle le fleuve coule, et qu'il couvre lors de ses débordemens périodiques. C'est la seule partie cultivée et habitée. La chaîne orientale, qui sépare le Nil de la mer Rouge, est la plus élevée; elle se termine au bord de la vallée par un escarpement, qui, dans beaucoup d'endroits, a l'apparence d'une muraille fort élevée, interrompu de distance en distance par des ravins, ou quelques vallons étroits formés par les torrens éphémères de l'hiver, et qui servent de route pour gravir ces montagnes. La chaîne occidentale, qui sépare la vallée du Nil de celle des Oasis, se termine généralement en pente douce; elle devient cependant plus escarpée vers Siout; et depuis le coude que forme le Nil vers Kenëh, elle est taillée à pic, ainsi que la chaîne orientale jusqu'à Sienne, où les montagnes s'élèvent davantage et ne laissent qu'un passage étroit aux eaux du fleuve.

      Près du Caire, ces deux chaînes s'écartent: l'orientale se termine vers l'extrémité de la mer Rouge, sans présenter aucune apparence de liaison avec les montagnes de l'Arabie, qui se terminent de même.2

      L'occidentale s'abaisse aussi vers le Fayoum, prend, près du Caire, sa direction vers le nord-ouest, ensuite à l'ouest, où elle forme la côte de la Méditerranée. Les rochers qu'on trouve vers Alexandrie et Aboukir, paraissent une île qui a été détachée de cette chaîne.

      Dans l'espace compris entre ces deux chaînes et la mer, est la plaine de la Basse-Égypte, formée en grande partie par les alluvions du Nil: elle est coupée par les branches de ce fleuve et par de nombreux canaux d'irrigation.

      Les sept branches par lesquelles le Nil se dispersait autrefois dans le Delta, pour aller se jeter dans la mer par sept embouchures, sont actuellement réduites à deux principales, celle de Rosette et celle de Damiette. Quelques canaux navigables une partie de l'année sont les restes encore existans des autres branches. Le canal de Moez est l'ancienne branche Tanitique; celui d'Achmoun, la Mendésienne: leurs embouchures se retrouvent encore à Omfaredje et à Dibëh, au-delà du lac Menzalëh. Les canaux de Karinen et de Tabanieh, qui tombent dans la mer à Bourlos, sont l'ancienne branche Sébennitique.

      On trouve moins de traces des branches Pélusiaque et Canopique, qui, rapprochées du désert, donnaient plus de développement au Delta; cependant celles de la Pélusiaque sont bien prononcées dans la province de Charkiëh, et on retrouve son embouchure à Tineh, vers les ruines de Péluse.

      Il est probable que lorsqu'elles existaient toutes ensemble, ces branches recevaient un volume d'eau à peu près égal. La répartition inégale des eaux, des canaux dérivés mal à propos ou mal entretenus, et diverses autres causes, ont pu diminuer leur volume dans l'une de ces branches; alors l'équilibre a été rompu à l'embouchure; les eaux de la mer ont remonté dans le lit du fleuve, ont refoulé les eaux douces, et se sont mêlées avec elles. Leur salure a dû nuire à la culture des terres arrosées par les branches du fleuve où elles ont pénétré: l'abandon de ces terres en a été l'effet; l'inculture a augmenté tant que l'ignorance de la cause ou l'intérêt des cantons plus favorisés, ont empêché de rétablir l'équilibre, et réciproquement l'entretien des canaux a été abandonné à mesure que la population qui en cultivait les rives est allée s'établir dans des contrées plus fertiles.

      On observe quelquefois cet effet sur les branches de Rosette et de Damiette; lorsque la rupture de quelques digues ou d'autres circonstances augmentent le volume d'eau d'une des branches aux dépens de l'autre, la mer pénètre dans celle-ci, imprègne les terres de sel, et force d'abandonner la culture, jusqu'à ce que l'équilibre étant rétabli, les eaux douces aient pu les laver suffisamment pour les rendre fertiles.

      D'autres causes ont encore contribué à détruire la branche Pélusiaque; les Croisés, en ruinant et brûlant la ville de Péluse, ainsi que les principales villes de ce canton, déterminèrent les habitans à СКАЧАТЬ



<p>1</p> Paris, le 5 nivôse an VI.

Le général Desaix au général de division Reynier.

Vous avez, mon cher général, de cruels ennemis; ils vous poursuivent partout, et sont parvenus à vous faire réformer. Vous sentez bien que j'ai eu l'attention de m'en faire instruire de bonne heure, et que j'ai remué ciel et terre pour empêcher cette injustice. J'ai vu le directeur Barras; je lui ai parlé d'une manière très vive et très serrée. Cela n'a rien produit; mais le général Bonaparte m'a dit que je pouvais être tranquille. Il vous a mis sur la liste des généraux, qui doit être présentée demain au Directoire, destinés à l'état-major avec moi; et j'espère que cet orage qui gronde sur votre tête se dissipera comme tant d'autres. Je suis désolé de ces persécutions que vos ennemis vous font éprouver; mais de la patience; ils se dissiperont, j'espère, comme les autres. Je vous préviens de tout cela parce qu'il est indispensable que vous ne vous éloigniez pas si vous recevez vos lettres de réforme. Dans peu de jours nous saurons s'il y a du remède ou s'il n'y a plus rien à espérer. Croyez, mon cher général, à tout mon zèle à faire tout ce qui pourra vous être utile, et à mon envie de servir avec vous; ainsi, attendez un peu. La Hollande va être organisée comme vous l'attendiez. Joubert, jeune, actif, y va commander comme général en chef; Lacroix y va comme ambassadeur. Le gouvernement jette ses regards de ce côté-là, et il espère y donner un gouvernement, et cela rapidement. Aussitôt que vous serez accepté, vous irez où vous voudrez, et Dunkerque sera de votre ressort, comme toutes nos côtes. Ainsi vous pourrez les voir, les parcourir, et réunir toutes les connaissances nécessaires.

Salut, mon cher général, bonne et vraie amitié.

Desaix.

Avez-vous eu des nouvelles de Kléber?

<p>2</p>

La manière dont se terminent les deux chaînes qui bordent la mer Rouge, et les terrains bas qui forment une espèce de vallon dans l'isthme de Suez, vallon bordé par des dunes jusqu'au pied des montagnes, particulièrement du côté de l'Asie, porteraient à penser que, dans les temps anciens, le détroit réunissait les deux mers, qu'il a comblées par des sables que les courans opposés y devaient accumuler, et par les attérissemens formés aux embouchures du Nil. Une révolution qui doit avoir changé le niveau de la Méditerranée, puisqu'elle est de vingt-cinq pieds plus basse que la mer Rouge, peut avoir contribué à la première formation de l'isthme, qui ensuite a été beaucoup augmentée par les alluvions du Nil.

Les dunes de sables mouvans s'étendent, comme on le verra sur la carte, depuis Abourouk et Bir-Deodar jusqu'au-delà d'El-Arich; elles occupent tout l'espace compris entre la Méditerranée et les montagnes de l'Arabie Pétrée, dont elles couvrent la base. Les vents, assez réguliers dans ce pays, ont fait prendre à toutes les dunes la même direction; elles vont généralement du nord-ouest au sud-est, et sont séparées par de petits vallons; ce n'est que dans les plus bas, situés ordinairement au pied des dunes les plus élevées, qu'on trouve de l'eau en creusant le sable à quelques pieds de profondeur; les palmiers qui y croissent en sont toujours l'indice. Ces sables mouvans et l'inégalité des dunes, rendent les marches très pénibles, et sont le plus grand obstacle au passage du désert par une armée.