Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie. Berthier Louis-Alexandre
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie - Berthier Louis-Alexandre страница 18

Название: Mémoires du comte Reynier … Campagne d'Égypte, deuxième partie

Автор: Berthier Louis-Alexandre

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

Серия:

isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/39325

isbn:

СКАЧАТЬ instruire de bonne heure, et que j'ai remué ciel et terre pour empêcher cette injustice. J'ai vu le directeur Barras; je lui ai parlé d'une manière très vive et très serrée. Cela n'a rien produit; mais le général Bonaparte m'a dit que je pouvais être tranquille. Il vous a mis sur la liste des généraux, qui doit être présentée demain au Directoire, destinés à l'état-major avec moi; et j'espère que cet orage qui gronde sur votre tête se dissipera comme tant d'autres. Je suis désolé de ces persécutions que vos ennemis vous font éprouver; mais de la patience; ils se dissiperont, j'espère, comme les autres. Je vous préviens de tout cela parce qu'il est indispensable que vous ne vous éloigniez pas si vous recevez vos lettres de réforme. Dans peu de jours nous saurons s'il y a du remède ou s'il n'y a plus rien à espérer. Croyez, mon cher général, à tout mon zèle à faire tout ce qui pourra vous être utile, et à mon envie de servir avec vous; ainsi, attendez un peu. La Hollande va être organisée comme vous l'attendiez. Joubert, jeune, actif, y va commander comme général en chef; Lacroix y va comme ambassadeur. Le gouvernement jette ses regards de ce côté-là, et il espère y donner un gouvernement, et cela rapidement. Aussitôt que vous serez accepté, vous irez où vous voudrez, et Dunkerque sera de votre ressort, comme toutes nos côtes. Ainsi vous pourrez les voir, les parcourir, et réunir toutes les connaissances nécessaires.

Salut, mon cher général, bonne et vraie amitié.

Desaix.

Avez-vous eu des nouvelles de Kléber?

2

La manière dont se terminent les deux chaînes qui bordent la mer Rouge, et les terrains bas qui forment une espèce de vallon dans l'isthme de Suez, vallon bordé par des dunes jusqu'au pied des montagnes, particulièrement du côté de l'Asie, porteraient à penser que, dans les temps anciens, le détroit réunissait les deux mers, qu'il a comblées par des sables que les courans opposés y devaient accumuler, et par les attérissemens formés aux embouchures du Nil. Une révolution qui doit avoir changé le niveau de la Méditerranée, puisqu'elle est de vingt-cinq pieds plus basse que la mer Rouge, peut avoir contribué à la première formation de l'isthme, qui ensuite a été beaucoup augmentée par les alluvions du Nil.

Les dunes de sables mouvans s'étendent, comme on le verra sur la carte, depuis Abourouk et Bir-Deodar jusqu'au-delà d'El-Arich; elles occupent tout l'espace compris entre la Méditerranée et les montagnes de l'Arabie Pétrée, dont elles couvrent la base. Les vents, assez réguliers dans ce pays, ont fait prendre à toutes les dunes la même direction; elles vont généralement du nord-ouest au sud-est, et sont séparées par de petits vallons; ce n'est que dans les plus bas, situés ordinairement au pied des dunes les plus élevées, qu'on trouve de l'eau en creusant le sable à quelques pieds de profondeur; les palmiers qui y croissent en sont toujours l'indice. Ces sables mouvans et l'inégalité des dunes, rendent les marches très pénibles, et sont le plus grand obstacle au passage du désert par une armée.

3

Cette opération des Anglais sépare presque entièrement Alexandrie du reste de l'Égypte; la coupure du canal la prive d'eau du Nil, et causera la ruine de cette ville si on ne le répare promptement: mais les Turcs sont-ils en état de faire un travail si considérable sans le secours des Européens? leur gouvernement destructeur s'en occupera-t-il vivement? et voudra-t-il faire des sacrifices pécuniaires suffisans.

4

Les lacs de l'Ouadi-Tomlat, qui ont été remplis pendant l'inondation extraordinaire de l'an IX, contenaient trop d'eau pour que l'évaporation pût les mettre à sec pendant l'été; et si l'armée n'avait pas été attirée sur les côtes par le débarquement des Anglais, l'existence de l'eau dans ces lacs aurait changé les opérations militaires sur la frontière de Syrie.

5

Lorsque ce bey était poursuivi très vivement, il entrait dans un de ces vallons, et paraissait s'enfoncer dans le désert; mais dès qu'il y avait attiré les Français, il dispersait sa troupe, afin qu'on ne pût pas en reconnaître les traces; elle se rendait au travers des montagnes dans un autre vallon, où elle se réorganisait pour descendre dans la vallée du Nil. Mourâd-Bey reparaissait ainsi dans les lieux où les Français ne l'attendaient pas; il prenait des vivres dans les villages, et recommençait la même manœuvre chaque fois que les Français, ayant découvert sa retraite, marchaient contre lui: quoique attaqué souvent à l'improviste, et même surpris dans ses camps, il réussit toujours à les éviter.

6

J'ai souvent été surpris d'entendre des Arabes, élevés dans le désert, d'un aspect sauvage et couvert de haillons, sachant à peine lire quelques passages du Koran, employer, dans certaines discussions, une adresse de raisonnement et des détours dignes des négociateurs les plus subtils, des flatteries qu'avouerait le courtisan le plus exercé, et parsemer leurs discours de grandes et belles images. En général, l'imagination vive et les sentimens élevés des Arabes contrastent avec le sol brûlant et stérile qu'ils habitent, avec la simplicité et même la misère de leur vie. Dans leurs poésies, ils chantent l'amour, tandis que leurs institutions, la polygamie et l'état d'abjection où leurs femmes sont réduites, devraient détruire presque entièrement cette passion.

7

La tribu de Békir en Syrie, qui est fort puissante, depuis la mort d'Akmet-Békir, cheik très considéré, obéit à sa mère. Il en est aussi dans la Haute-Égypte, mais ces exemples sont très rares.

Dans une visite à la tribu de Néfahat, j'interrogeais un vieillard qu'on me présenta comme l'historien de sa tribu: Il me dit, en parlant de leur établissement en Égypte, que la femme de Néfoa, lorsqu'il y vint, avait les yeux aussi vifs et aussi perçans que la balle qui sort du fusil; elle avait un grand caractère et beaucoup d'esprit; aussi ses enfans ont prospéré, et les Néfahat ont actuellement cinq cents cavaliers, tandis que les Lomelat n'en ont pas cent; ils descendent cependant d'un frère de Néfoa, qui vint en même temps que lui; mais dont la femme avait des yeux de gazelle, était douce et timide.

8

Quelques tribus puissantes de la Haute-Égypte paraissent devoir faire exception; encore les esclaves faits n'appartiennent-ils pas à des Arabes, mais à des Barabas. Pendant notre séjour, le cheik de la tribu de Tarfé, Mahmoud-Ebn-Ouafi, envoya un parti de quelques cents cavaliers à cent vingt journées dans le désert, contre une tribu dont il prétendait avoir à se plaindre. Ces cavaliers ayant eu le dessous, passèrent, en revenant, sur les terres de Dongola, où ils firent des prisonniers, et notamment prirent la famille du chef. L'héritier présomptif vint à Siout porter plainte aux Français, et le général Donzelot lui fit rendre ses frères et sœurs, ainsi que ses sujets, qui étaient déjà disséminés dans les divers camps de la tribu.

9

J'emploie le mot juridiction, parce qu'on trouve encore des traces des institutions des Arabes successeurs de Mahomet, qui avaient établi des espèces de juges de paix nommés sanager. Ces arbitres terminaient les querelles qui avaient lieu dans leur juridiction. Ces places étaient héréditaires pour les chefs de certaines familles: les Arabes les consultent encore quelquefois; mais cette institution a été presque annulée depuis que les mameloucks ont envahi tous les pouvoirs.

10

On voit encore des tours semblables dans quelques parties de l'Europe, où le régime féodal a existé le plus long-temps.

11

Je recevais fréquemment des plaintes relatives à des assassinats: un jour, un fellâh vint chez moi et déroula des plis de ses vêtemens la tête de son frère encore toute sanglante. Les parens des morts, qui m'apportaient des lambeaux de leurs habits teints de sang, demandaient vengeance contre telle famille ou tel village; rarement ils désignaient l'individu coupable. Leurs guerres recommençaient aussitôt que la force militaire était trop éloignée pour leur imposer. Lors de la victoire que Bonaparte remporta sur les Turcs, à Aboukir, la province de Charkiëh avait été laissée sans troupes; quand j'y retournai, les villages de Ihiëh et de Maadiëh avaient renouvelé une ancienne querelle; leurs alliés s'étaient rassemblés, tous les Arabes avaient pris parti; cinq ou six mille hommes formaient l'armée de chaque village, et depuis huit jours qu'elles étaient en présence, sept ou huit hommes de part et d'autre avaient été tués: j'arrivai avec un bataillon, aussitôt ces attroupemens se dissipèrent. Je fis venir les cheiks de chaque village, et je leur prouvai, par le calcul des hommes morts depuis plusieurs années, que cette guerre n'avait plus de motifs, puisqu'il y avait égalité de СКАЧАТЬ