Les Rues de Paris, tome troisième. Bouniol Bathild
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Название: Les Rues de Paris, tome troisième

Автор: Bouniol Bathild

Издательство: Public Domain

Жанр: Биографии и Мемуары

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isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/35054

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СКАЧАТЬ serait ici le lieu, dit excellemment Du Cange dans son Éloge de Ville-Hardouin21, d'étaler les belles qualités qui le firent admirer et le rendirent recommandable même parmi les étrangers: sa piété envers Dieu, sa prudence et sa dextérité dans les affaires qui le firent réputer, en plusieurs occasions où il porta la parole, comme le mieux disant, le plus éloquent et le plus judicieux de son temps, son courage et son adresse dans la conduite des armées, sa fidélité inviolable envers ses princes, et tant d'autres vertus qui éclatent dans toute la suite de l'Histoire qu'il a dressée non tant de cette fameuse conquête, comme de ses belles actions, lesquelles toutefois il a décrites avec tant de retenue et de candeur qu'il est aisé de juger qu'il en a plus passé sous silence qu'il n'en a mis au jour. Mais il suffit que lui-même ait dressé matière à ses louanges et qu'à l'exemple de ces grands capitaines des siècles passés qui ont mieux aimé rédiger eux-mêmes les principales actions de leur vie que d'en laisser la charge à des écrivains ignorants, il ait laissé à la postérité de quoi relever sa mémoire par ce monument qui durera plus que le marbre et le bronze.»

      Citons, comme un spécimen du langage de Ville-Hardouin, ce passage relatif à la prise de Constantinople. Il suffira de modifier non le style, mais l'orthographe, pour qu'il soit intelligible à la plupart des lecteurs. «… Et les autres gens, qui furent espandus parmi la ville, gagnèrent. Et fut si grand le gain fait que nul ne vous en saurait dire la fin, et d'or et d'argent, et vaisselemente, et de pierres précieuses, et de corps saints (reliques), et de draps de soie, et de robes vaires (multicolores), grises et hermines, et tous les chers avoirs qui oncques furent trouvés en terre. Et bien témoigne Geoffroy de Ville-Hardouin, le maréchal de Champagne, à son escient et pour vérité, que, puis que le monde fut estoré (créé), ne fut tant gagné en une ville. Chacun prit hôtel tant comme lui plut, car il y en avait assez.

      «Ainsi se hébergèrent les pèlerins (croisés) et les Vénitiens. Et fut grande la joie de l'honneur et de la victoire que Dieu leur avait donnée. Et bien en durent Notre-Seigneur louer, car ils n'avaient pas plus de vingt mille hommes d'armes, et par l'aide de Dieu, en avaient pris plus de trois cent mille, et en la plus forte ville du monde qui grande ville fut et la mieux fermée.

      «Lors fut crié par tout l'ost, de par le marquis de Montferrat, qui sire (chef) était de l'armée et des autres barons: que tous les avoirs qu'ils avaient gagnés fussent apportés ensemble, si comme ils l'avaient assuré et juré et fait sous peine d'escommuniement. Et furent nommés le lieu en trois églises; et le mit-on en la garde des Français et des Vénitiens et des plus loyaux qu'on put trouver. Lors commencèrent à apporter le gain et mettre ensemble. Les uns apportèrent bien, les autres mauvaisement; car convoitise, qui est racine de tous maux, ne leur laissa (permit). Ainsi commencèrent d'ici en avant les convoiteux à retenir des choses et Notre Sire les commença moins à aimer qu'il n'avait devant fait. Ha! comme ils s'étaient loyalement maintenus jusqu'à ce point! Et Notre Sire leur avait bien montré, car de toutes leurs affaires les avait Dieu exaucés et honorés sur toutes les autres gens. Et maintes fois ont mal les bons pour les mauvais.»

      Au fond, ce qui ressort le plus clairement de ce récit, c'est que la grande cité prise par les croisés fut entièrement pillée. C'était le droit de la guerre à cette époque. Il faut se féliciter que le progrès des mœurs condamne de plus en plus aujourd'hui ces façons d'agir, et que les nations civilisées soient unanimes à considérer le pillage d'une ville, d'une capitale en particulier, comme un procédé sauvage, un abus odieux de la victoire qui ferait honte à Attila lui-même. Revenons au Chroniqueur.

      Voici, pour terminer, le dramatique récit de la mort du marquis du Montferrat, tué malheureusement dans une rencontre: «Et quand le marquis fut à Messinople (Mosynopolis) ne tarda plus que six jours qu'il fit une chevauchée par le conseil des Grecs de la terre, en la montagne de Messinople, plus d'une grande journée loin. Et comme il eut été en la terre et vint au partir, les Bougres (Bulgares) se furent assemblés de la terre; et virent que le marquis était avec peu de gens; et vinrent de toutes parts et l'assaillirent à l'arrière-garde. Et quand le marquis ouït le cri, si sali (sauta) en un cheval tout désarmé une glave22 en sa main. Et quand il vint là où ils étaient assemblés, à l'arrière-garde, si leur courut sus et les cacha (rejeta) une grande pièce arrière. Là fut féru d'une sagette (flèche) parmi le gros du bras et sous l'épaule mortellement, si qu'il commença moult à répandre de sang. Et quand sa gent virent ce si se commencèrent fort à esmayer (effrayer) et à déconfire et mauvaisement maintenir. Et cil (ceux) qui furent entour le marquis le soutinrent. Et il perdit moult de sang. Si commença à pâmer. Et quand ses gens virent qu'ils n'avaient nulle aide de lui si se commencèrent à déconfire (débander) et à lui laisser. Ainsi furent déconfits par cette mésaventure et cils qui restèrent avec lui furent morts. Et le marquis eut la tête coupée; et la gent du pays envoyèrent à Johannis (roi des Bulgares) la tête et ce fut une des plus grandes joies qu'il eut oncques. Hélas! quel dommage en eut l'Empereur et tous les latins de la terre de Roumanie, de tel homme perdre par telle mésaventure, un des meilleurs chevaliers et des plus vaillants et des plus larges (généreux) qui fut au remanant (reste) du monde. Et cette mésaventure si advint en l'an de l'Incarnation mil deux cent sept.»

      Ce récit termine l'Histoire de la Conquête de Constantinople, par Ville-Hardouin. La première édition imprimée parut à Venise en 1573; la seconde, faite d'après celle-ci sans doute, fut publiée à Paris en 1585.

      SAINT VINCENT DE PAUL

      I

      Cet homme de Dieu qu'on pourrait appeler, si l'expression ne semblait hasardée, un saint surtout moderne, naquit, le 24 avril 1576, à Ranquine, petit hameau du canton de Pouy, près de Dax (Landes). Son père se nommait Guillaume de Paul et sa mère Bertrande de Moras. «Ses premières années, dit Godescard, se passèrent à garder le troupeau de son père qui, apercevant en cet enfant de bénédiction les dispositions les plus rares, se détermina à le faire étudier et le mit en pension chez les cordeliers d'Acqs.» Abelly, le bon évêque, de Rodez, contemporain et ami de Vincent de Paul, et auteur d'une vie du Saint qui passe pour un des chefs-d'œuvre du genre, Abelly dit mieux encore: «Quoique les perles naissent dans une nacre mal polie et souvent toute fangeuse, elles ne laissent pas que de faire éclater leur vive blancheur au milieu de cette bourbe qui ne sert qu'à en relever le lustre et faire mieux connaître leur valeur. La vivacité d'esprit dont Dieu avait doué notre jeune Vincent, commençant à paraître parmi ces bas emplois où il était occupé, elle en fut d'autant plus remarquée; et son père reconnut bien que cet enfant pouvait faire quelque chose de meilleur que de mener paître les bestiaux!»

      Ses progrès furent tels qu'au bout de quatre années, il entrait comme précepteur chez M. de Commet, avocat de la ville. Son séjour dans cette maison fut assez court malgré la grande estime qu'on lui témoignait; il en sortit à l'âge de vingt ans pour se rendre à Toulouse où il fit son cours de théologie. Sous-diacre et diacre en 1598, il fut ordonné prêtre deux ans après.

      En 1605, il dut faire un voyage à Marseille pour y recevoir une somme de 1500 livres qu'un ami lui avait léguée. Or, voici ce qui au retour lui arriva et ce qu'il nous a raconté lui-même avec une singulière vivacité de style et un rare bonheur d'expressions:

      «Je m'embarquai, dit-il, pour Narbonne, pour y être plutôt et pour épargner, ou pour mieux dire, pour n'y jamais être et pour tout perdre. Le vent nous fut autant favorable qu'il fallait pour nous rendre ce jour-là à Narbonne, qui était faire cinquante lieues, si Dieu n'eût permis que trois brigantins turcs, qui côtoyaient le golfe de Lyon pour attraper les barques qui venaient de Beaucaire, ne nous eussent donné la chasse et attaqués si vivement que, deux ou trois des nôtres étant tués et le reste blessé, et même moi qui eus un coup de flèche qui me servira d'horloge tout le reste de ma vie, n'eussions été contraints de nous rendre à ces félons. Les premiers éclats de leur rage furent de СКАЧАТЬ



<p>21</p>

En tête de son édition de la Chronique de Ville-Hardouin.

<p>22</p>

Espèce d'épieu à bout ferré.