Les rues de Paris, Tome Premier. Bouniol Bathild
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Название: Les rues de Paris, Tome Premier

Автор: Bouniol Bathild

Издательство: Public Domain

Жанр: Биографии и Мемуары

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СКАЧАТЬ «Laissez-le faire, ajouta le prince; que voulez-vous, il est comme cela!»

      Vivant plus qu'aucun autre, par suite de son infirmité, dans le monde idéal, l'artiste était, pour cela même, très facilement dupe de son imagination et manquait du sens pratique, fruit de l'expérience et de la raison, qui doit nous conseiller incessamment dans la conduite de la vie. Profondément religieux de cœur, il restait trop, par respect humain peut-être, dans la théorie; aussi la vérité n'avait-elle point sur son caractère l'influence qu'on eût dû en attendre. D'ailleurs, ses mœurs étaient pures et Schindeler va jusqu'à dire que «Beethoven, malgré les tentations nombreuses auxquelles il fut exposé, sut, tel qu'un demi-Dieu, conserver sa vertu intacte… Il traversa la vie avec une pudeur virginale sans avoir jamais eu une faiblesse à se reprocher18

      M. Oublichieff, le savant biographe russe, s'il se trompe le plus souvent dans son appréciation du génie de l'artiste, me paraît avoir mieux jugé l'homme: «Fabuleux ou impossible, dit-il, partout ailleurs, c'est en Allemagne seulement que Beethoven, nature allemande par excellence, pouvait devenir ce qu'il fut: un homme de bien, d'intelligence et de savoir, un homme vertueux, allais-je dire, si le mot n'était tombé en désuétude – un philosophe de l'école de Zénon, mais constamment dominé par la fantaisie et n'écoutant presque jamais le sens pratique. Il avait le sentiment le plus élevé de tous les devoirs moraux, mais il en faisait une application que la vie réelle ne comporte point. Ses mœurs furent toujours d'une pureté irréprochable; elles étaient même austères et claustrales, et cette austérité il eût voulu l'étendre aux pièces de théâtre et aux opéras. Des discours licencieux lui inspiraient la même horreur que la licence en action; et entrer, avec la vérité stricte et littérale, dans une de ces compositions sans lesquelles les hommes ne sauraient vivre ensemble, équivalait pour lui au mensonge et à la trahison. Il se dévoua au bonheur de ceux qu'il aimait, mais il prétendit qu'on fût heureux comme il l'entendait, sans examiner si cette manière d'être heureux ne trouvait pas des obstacles dans les circonstances ou même dans les élans les plus irrésistibles du cœur humain. Il désirait ardemment aussi le bonheur de l'humanité; mais ce vœu auquel rien de ce qui existait ou avait existé ne lui paraissait répondre, il en demanda l'accomplissement aux rêves politiques les plus absurdes. Le vrai et le beau étaient les dieux de Beethoven, mais s'il demeura toujours fidèle d'intention à leur culte, il ne lui arriva pas moins de tomber dans le péché involontaire parce qu'un orgueil, supérieur à son intelligence et à son génie même, lui fit voir qu'il avait sur le beau et le bien des notions plus justes que tous les hommes pris ensemble19

      Encore que, dans ce remarquable passage, on puisse et doive trouver qu'il y a parfois exagération, il ne nous en paraît pas moins certain que, pour faire contre-poids aux fougues de l'artiste et maintenir toujours l'équilibre dans cette merveilleuse organisation, il eût suffi d'une plus grande dose d'humilité. Le musicien ne pouvait y perdre assurément et combien l'homme, au milieu de ses épreuves, n'y aurait-il pas gagné pour le repos et la tranquillité de sa vie!

      Comædia finita est! N'est-ce pas plutôt tragædia qu'il eût fallu dire et une tragédie noyée dans les larmes à défaut de sang. Quand on la suit, jusqu'au dernier acte, jusqu'au dévouement suprême, à travers ses péripéties navrantes, n'est-on pas tenté de s'écrier avec le poète des Méditations et des Harmonies:

      Heureuse au fond des bois la source vive et pure!

      Heureux le sort caché dans une vie obscure!

      Quoi qu'il en soit, il est bien que, dans Paris, une inscription rappelle le souvenir de ce nom glorieux, puisque nous devons au grand artiste une reconnaissance particulière. «C'est au génie de Beethoven, dont nous venons de caractériser l'œuvre grandiose et patriotique, que la France doit sans contredit de comprendre mieux chaque jour la poésie intime de la musique instrumentale. Il fallait le peintre dramatique de la Symphonie héroïque, de celle en ut mineur et de la symphonie en fa, pour initier l'élite de la société française aux beautés d'un art mystérieux qui semble se refuser comme la lumière à toute analyse immédiate et n'avoir d'autre loi que le caprice des sons20

      BELSUNCE ET ROZE

      I

      BELSUNCE

      Quel nom méritait mieux d'être rappelé à la postérité que celui du grand Évêque dont le souvenir est resté si glorieusement populaire! Il n'en fut point ainsi du chevalier Roze, non moins admirable, non moins héroïque dans les mêmes circonstances et pourtant à peu près inconnu du plus grand nombre des lecteurs, et à plus forte raison de ceux qui ne lisent pas. Aussi c'est un devoir comme un plaisir pour nous de ne point séparer ces deux noms unis dans une même pensée de dévouement, et qui vivront à jamais dans le cœur des Marseillais reconnaissants.

      «À Belsunce, dit très-bien un historien, la gloire d'avoir représenté en face du danger le prêtre chrétien et le clergé français; au chevalier Roze la gloire d'avoir déployé ce genre de courage qui ne manque pas plus à l'armée française quand, au lieu de soldats ennemis, ce sont les fléaux de la nature qu'on lui donne à combattre pour le bien de l'humanité21

      Parlons de Belsunce d'abord.

      Henri-François-Xavier de Belsunce de Castelmoron, naquit au château de la Force dans le Périgord, le 4 décembre 1671, d'Armand de Belsunce, marquis de Castelmoron, baron de Gavaudan, etc. Après avoir fait ses études à Paris au collége de Louis-le-Grand, il en sortit pour entrer dans la Compagnie de Jésus où, pendant plusieurs années, il enseigna avec distinction la grammaire et les humanités. «Appelé par la Providence à une plus haute destination, dit M. l'abbé Jauffret, de Metz22, il sortit de cette compagnie en conservant toujours pour elle l'estime la mieux méritée, la plus vive reconnaissance et la plus tendre affection.»

      Nommé par le roi à l'abbaye de La Réole puis à celle de Notre-Dame-des-Chambons, et grand vicaire de l'évêque d'Agen, il fut appelé, le 19 janvier 1709, à remplacer à Marseille le pieux prélat dont la mort récente laissait le siége vacant. On n'en pouvait choisir un plus digne, d'après le témoignage que lui rendait un orateur, écho fidèle des jugements contemporains: «Je vois, dit M. Maire, chanoine de l'église cathédrale de Marseille, dans son Oraison funèbre de Belsunce, je vois un épiscopat de plus de quarante-cinq ans, dont tous les moments ont été occupés et sanctifiés par le zèle le plus ardent, le plus vif et le plus infatigable… Je le vois… à la tête des fidèles ministres qu'il a choisis pour ses coopérateurs, il se charge du travail le plus pénible. Il prêche tous les jours et souvent jusqu'à quatre fois par jour; il prépare le peuple à recevoir les sacrements de la réconciliation et de la communion; il porte le pain eucharistique dans les maisons et dans les hôpitaux, et il lui arrive souvent de le distribuer, lui seul dans une matinée, à plus de 4,000 personnes.»

      Ses revenus passaient pour la plus grande partie en aumônes, et lui-même dans le secret, autant qu'il lui était possible, il se plaisait à visiter les familles pauvres pour leur prodiguer les secours en tous genres avec les sages conseils et les paternelles exhortations. Mais ce fut surtout lorsque Marseille se vit désolée par le plus terrible des fléaux,

      La peste, puisqu'il faut l'appeler par son nom23,

      que la charité, que le dévouement de Belsunce éclata d'une façon non moins touchante qu'admirable, et rendit son nom illustre à jamais.

      Dans les premiers jours du mois de mai de l'année 1720, un navire venu de l'Orient (Syrie) apportait le germe fatal. Plusieurs de ses passagers СКАЧАТЬ



<p>18</p>

Schindeler. —Vie de Beethoven, Munster 1845. «La meilleure source de renseignements certains que l'on puisse consulter,» d'après Scudo.

<p>19</p>

Beethoven, ses critiques et ses glossateurs, par M. Oublichieff; in-8º, 1857, Leipsik et Paris.

<p>20</p>

Scudo: Critique et littérature musicales. T. 1er.

<p>21</p>

Portraits et Histoire des hommes utiles. – 1835-1836.

<p>22</p>

Œuvres choisies de Belsunce. – Tome 1er. – 1822.

<p>23</p>

La Fontaine.