Bel-Ami / Милый друг. Ги де Мопассан
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СКАЧАТЬ et qui voudrait bien savoir votre affaire.

      Alors elle les fit entrer, en racontant:

      – Il en est encore r'venu deux d'puis vous pour un journal, je n'sais point l'quel.

      Puis, se tournant vers Duroy:

      – Donc, c'est monsieur qui désire savoir?

      – Oui. Est-ce que vous avez été arrêtée par un agent des mœurs?

      Elle leva les bras:

      – Jamais d' la vie, mon bon monsieur, jamais d' la vie. Voilà la chose. J'ai un boucher qui sert bien, mais qui pèse mal. Je m'en ai aperçu souvent sans rien dire, mais l'autre jour, comme je lui demandais deux livres de côtelettes, vu que j'aurais ma fille et mon gendre, je m'aperçois qu'il me pèse des os de déchet, des os de côtelettes, c'est vrai, mais pas des miennes. J'aurais pu en faire du ragoût, c'est encore vrai, mais quand je demande des côtelettes, c'est pas pour avoir le déchet des autres. Je refuse donc, alors y me traite de vieux rat, je lui réplique vieux fripon; bref, de fil en aiguille, nous nous sommes tant chamaillés qu'il y avait plus de cent personnes devant la boutique et qui riaient, qui riaient! Tant qu'enfin un agent fut attiré et nous invita à nous expliquer chez le commissaire. Nous y fûmes, et on nous renvoya dos à dos. Moi, depuis, je m'sers ailleurs, et je n' passe même pu devant la porte, pour éviter des esclandres.

      Elle se tut. Duroy demanda:

      – C'est tout?

      – C'est toute la vérité, mon cher monsieur.

      Et, lui ayant offert un verre de cassis, qu'il refusa de boire, la vieille insista pour qu'on parlât dans le rapport des fausses pesées du boucher.

      De retour au journal, Duroy rédigea sa réponse:

      «Un écrivaillon anonyme de la Plume, s'en étant arraché une, me cherche noise au sujet d'une vieille femme qu'il prétend avoir été arrêtée par un agent des mœurs, ce que je nie. J'ai vu moi-même la dame Aubert, âgée de soixante ans au moins, et elle m'a raconté par le menu sa querelle avec un boucher, au sujet d'une pesée de côtelettes, ce qui nécessita une explication devant le commissaire de police.

      «Voilà toute la vérité.

      «Quant aux autres insinuations du rédacteur de la Plume, je les méprise. On ne répond pas, d'ailleurs, à de pareilles choses, quand elles sont écrites sous le masque.

      «Georges Duroy.»

      M. Walter et Jacques Rival, qui venait d'arriver, trouvèrent cette note suffisante, et il fut décidé qu'elle passerait le jour même, à la suite des échos.

      Duroy rentra tôt chez lui, un peu agité, un peu inquiet. Qu'allait répondre l'autre? Qui était-il? Pourquoi cette attaque brutale? Avec les mœurs brusques des journalistes, cette bêtise pouvait aller loin, très loin. Il dormit mal.

      Quand il relut sa note dans le journal, le lendemain, il la trouva plus agressive imprimée que manuscrite. Il aurait pu, lui semblait-il, atténuer certains termes.

      Il fut fiévreux tout le jour et il dormit mal encore la nuit suivante. Il se leva dès l'aurore pour chercher le numéro de la Plume qui devait répondre à sa réplique.

      Le temps s'était remis au froid; il gelait dur. Les ruisseaux, saisis comme ils coulaient encore, déroulaient le long des trottoirs deux rubans de glace.

      Les journaux n'étaient point arrivés chez les marchands, et Duroy se rappela le jour de son premier article: Les Souvenirs d'un chasseur d'Afrique. Ses mains et ses pieds s'engourdissaient, devenaient douloureux, au bout des doigts surtout; et il se mit à courir en rond autour du kiosque vitré, où la vendeuse, accroupie sur sa chaufferette, ne laissait voir, par la petite fenêtre, qu'un nez et des joues rouges dans un capuchon de laine.

      Enfin le distributeur de feuilles publiques passa le paquet attendu par l'ouverture du carreau, et la bonne femme tendit à Duroy la Plume grande ouverte.

      Il chercha son nom d'un coup d'œil et ne vit rien d'abord. Il respirait déjà, quand il aperçut la chose enfermée entre deux tirets.

      «Le sieur Duroy, de la Vie Française, nous donne un démenti; et, en nous démentant, il ment. Il avoue cependant qu'il existe une femme Aubert, et qu'un agent l'a conduite à la police. Il ne reste donc qu'à ajouter deux mots: «des mœurs» après le mot «agent» et c'est dit.

      «Mais la conscience de certains journalistes est au niveau de leur talent.

      «Et je signe: Louis Langremont.»

      Alors le cœur de Georges se mit à battre violemment, et il rentra chez lui pour s'habiller, sans trop savoir ce qu'il faisait. Donc, on l'avait insulté, et d'une telle façon qu'aucune hésitation n'était possible. Pourquoi? Pour rien. À propos d'une vieille femme qui s'était querellée avec son boucher.

      Il s'habilla bien vite et se rendit chez M. Walter, quoiqu'il fût à peine huit heures du matin.

      M. Walter, déjà levé, lisait la Plume.

      – Eh bien, dit-il avec un visage grave, en apercevant Duroy, vous ne pouvez pas reculer?

      Le jeune homme ne répondit rien. Le directeur reprit:

      – Allez tout de suite trouver Rival, qui se chargera de vos intérêts.

      Duroy balbutia quelques mots vagues et sortit pour se rendre chez le chroniqueur, qui dormait encore. Il sauta du lit, au coup de sonnette, puis ayant lu l'écho:

      – Bigre, il faut y aller. Qui voyez-vous comme autre témoin?

      – Mais, je ne sais pas, moi.

      – Boisrenard? Qu'en pensez-vous?

      – Oui, Boisrenard.

      – Êtes-vous fort aux armes?

      – Pas du tout.

      – Ah! diable! et au pistolet?

      – Je tire un peu.

      – Bon. Vous allez vous exercer pendant que je m'occuperai de tout. Attendez-moi une minute.

      Il passa dans son cabinet de toilette et reparut bientôt, lavé, rasé, correct.

      – Venez avec moi, dit-il.

      Il habitait au rez-de-chaussée d'un petit hôtel, et il fit descendre Duroy dans la cave, une cave énorme, convertie en salle d'armes et en tir, toutes les ouvertures sur la rue étant bouchées.

      Après avoir allumé une ligne de becs de gaz conduisant jusqu'au fond d'un second caveau, où se dressait un homme de fer peint en rouge et en bleu, il posa sur une table deux paires de pistolets d'un système nouveau se chargeant par la culasse, et il commença les commandements d'une voix brève comme si on eût été sur le terrain.

      – Prêt?

      – Feu! – un, deux, trois.

      Duroy, anéanti, obéissait, levait les bras, visait, tirait, et comme il atteignait souvent le mannequin en plein ventre, car il s'était beaucoup servi dans sa première jeunesse d'un vieux pistolet d'arçon de son père pour tuer des oiseaux dans la cour, СКАЧАТЬ