Les vrais mystères de Paris. Eugène François Vidocq
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Название: Les vrais mystères de Paris

Автор: Eugène François Vidocq

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066080952

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СКАЧАТЬ jour; il fit la cour à une vieille duchesse à laquelle il eut le bonheur de plaire, et cette noble dame voulant récompenser un dévouement véritablement digne des plus grands éloges, voulut bien se charger d'introduire dans la bonne compagnie, la jolie marquise de Roselly, que sa beauté, son esprit et ses grâces firent du reste accueillir avec le plus vif empressement.

      Ce fut à cette époque que Salvador fut nommé auditeur au conseil d'Etat.

      Roman, après quelques semaines de séjour à Paris, et lorsque Salvador qu'il avait secondé dans les démarches qu'avait nécessité l'organisation de sa maison, n'eut plus besoin de lui, se laissa conduire un jour qu'il ne savait que faire, dans un de ces établissements connus sous la dénomination de tables d'hôtes, et qui sont cent fois plus dangereux que les tripots de la défunte administration de M. Bénazet.

      La police fait une rude guerre à ces sortes d'établissements, mais tous ses efforts, à ce qu'il paraît, demeurent sans résultats, car à peine a-t-elle fait fermer un de ces tripots au nº 4 de la rue Richelieu, par exemple, qu'il s'en ouvre un autre à l'instant même au nº 6.

      Un excellent dîner est servi tous les jours à heure fixe, aux personnes qui fréquentent ces maisons, c'est le prétexte honnête de la réunion; mais lorsque les convives passent dans le salon pour y prendre le café, les tables d'écarté, de trente et quarante et même de roulette sont déjà dressées.

      Ces maisons sont ordinairement tenues par des vétérantes de l'île de Cythère qui ne manquent pas d'esprit, et qui par leur ton et leurs manières, paraissent appartenir à la bonne compagnie; toutes ces femmes, s'il faut les croire, sont veuves d'un officier général, ou tout au moins d'un officier supérieur, mais ce serait en vain que l'on chercherait les titres et les états de services des défunts époux qu'elles se donnent, dans les cartons du ministère de la guerre.

      Nous venons de dire que ces sortes de maisons étaient plus dangereuses que les tripots jadis autorisés; en effet, ces derniers n'étaient tolérés qu'à la condition qu'il serait permis à l'autorité d'y exercer un contrôle de tous les instants; les gens qui les fréquentaient pouvaient donc facilement être tenus à l'index, et si toutes les chances du jeu étaient calculées de manière à assurer au banquier des avantages considérables, lorsque la fortune paraissait vouloir favoriser un ponte, on lui laissait le champ libre. Dans les maisons dont nous parlons, au contraire, ce n'est pas seulement contre les chances fatales du jeu que l'on est forcé de combattre, on doit encore se tenir constamment en garde contre les ruses d'une infinité de fripons de toutes les espèces et de tous les sexes auxquels elles servent de lieux de réunion.

      Beaucoup de gens qui jamais n'auraient mis les pieds dans un des antres de l'administration Bénazet, fréquentent cependant ces maisons auxquelles les fripons connus sous le nom de grecs[228], ont donné le nom d'étouffes ou d'étouffoirs[229]. C'est que pour les y attirer, la veuve du général ou du colonel a ouvert les portes de son salon à une foule de femmes charmantes: ce n'est point il est vrai, par la vertu que ces dames brillent; mais elles sont pour la plupart jeunes, jolies et bien parées, la maîtresse du lieu ne leur demande pas autre chose.

      Des chevaliers d'industrie, des grecs, des faiseurs, forment avec ces dames, le noyau de la société de ces établissements, que dans le langage ordinaire, on nomme des tables d'hôtes, société polie, mais assurément très-peu honnête.

      Il y a peut-être à Paris des réunions de ce genre, composées principalement de personnes recommandables, mais ce sont justement celles-là que recherchent les flibustiers en tous genres, car là où il y a des honnêtes gens, il y a nécessairement des dupes à exploiter.

      Les tables d'hôtes dans lesquelles on joue, ne sont pas seulement fréquentées par des escrocs, des grecs et des chevaliers d'industrie, on y rencontre aussi des donneurs d'affaires[230]; ces derniers chercheront à connaître la position, les habitudes de l'individu qu'ils veulent prendre pour dupe, les heures durant lesquelles il est absent de chez lui, et lorsqu'ils auront appris tout ce qu'il leur importe de savoir, ils donneront à celui qu'ils nomment un ouvrier[231] et qui n'est autre qu'un adroit cambrioleur[232], le résultat de leurs observations, cela fait, l'ouvrier prend l'empreinte de la serrure, une fausse clé est fabriquée, et au moment favorable, l'affaire[233] se trouve faite. Il n'est pas nécessaire d'ajouter, que le donneur d'affaires sait toujours se ménager un alibi incontestable, ce qui le met à l'abri des résultats que pourraient amener ses questions hardies et ses visites indiscrètes.

      Viennent ensuite les emporteurs[234], qui sont chargés de lever[235], ce sont ces derniers qui amènent dans les tables d'hôtes où l'on joue, cette foule de jeunes gens sans expérience, qui trouvant là tout ce qui peut les corrompre: le jeu, des vins exquis, une chaire délicate, des amis empressés, des femmes agréables et d'une complaisance extrême, lorsque leur bourse paraît bien garnie, viennent y dépenser leurs plus belles années en folles orgies et en débordements de toute nature.

      La plus suivie et la plus luxueuse de toutes les maisons de ce genre, fut patronnée par un vieux général (un général pour de vrai), mort depuis peu d'années, et dont le nom est souvent cité dans le recueil des Victoires et conquêtes, elle est tenue par une femme que les liens du sang attachent à une comédienne, qui fut, sous l'empire, la plus sémillante, la plus jolie et la moins cruelle de toutes les prêtresses de Thalie. Ce fut dans cette maison que Roman fut conduit. Deux individus que nous avons vu figurer au dîner donné chez Lemardelay, par Alexis de Pourrières, le comte palatin du saint-empire romain, et son digne ami qu'il avait rencontrés par hasard, furent ses introducteurs.

      Roman était assez expérimenté pour apprécier au premier coup d'œil, la valeur morale des individus qui composaient la masse des habitués de cette maison; mais ses introducteurs qui croyaient avoir mis la main sur un oiseau qu'il serait facile de plumer, lui firent tant de politesses, qu'il ne put se dispenser d'accepter un souper fin à la Maison dorée.

      Le bon vin, le café et les liqueurs ayant mis les convives en belle humeur, le comte palatin du saint-empire romain lui demanda ce qu'il pensait de la maison dans laquelle il avait été conduit.

      —Voulez-vous que je vous parle avec franchise? répondit-il.

      —Vous nous ferez plaisir.

      —Défunt mon pauvre père m'a dit souvent qu'il y avait dans Paris, une foule d'individus qui conduisaient les riches étrangers dans des maisons de jeux tenues par des femmes galantes, afin de pouvoir les dépouiller à leur aise. Je suis bien loin de croire que vous êtes des individus de ce genre; mais je crois que la maison dans laquelle vous m'avez mené, n'est pas très-catholique.

      —Cependant le général...

      —Le général me fait l'effet d'un vieux voltigeur du camp de la Lune.

      —Mais les dames de la compagnie ne vous ont-elles pas paru aimables, jolies et spirituelles?

      —Oh! vous leur accordez beaucoup trop de qualités, elles ne sont aimables que lorsqu'elles gagnent; jolies, elles l'ont été peut-être; quant à leur esprit, il ne m'a pas été permis d'en juger.

      —Ainsi, mon cher monsieur, cette maison ne vous convient pas.

      —Non, cher comte, et si vous ne pouvez m'indiquer quelque chose de beaucoup mieux, je serai forcé de garder dans mon portefeuille les quelques billets de mille francs que j'étais déterminé à perdre.

      —Le gouvernement en faisant fermer les anciennes maisons de jeu, a commis un abus de pouvoir intolérable, dit le comte palatin qui avait renoncé à l'espoir de tirer СКАЧАТЬ