Название: Le Ciel De Nadira
Автор: Giovanni Mongiovì
Издательство: Tektime S.r.l.s.
Жанр: Исторические любовные романы
isbn: 9788835411437
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“ Il est accompagné par ses fidèles et il m’a demandé de t’informer qu’il vient avec de bons propos. ”
Umar s’efforça de bien voir et aperçut la caravane qui descendait par les courbes tortueuses du mont de Qasr Yanna.
“ Retourne à tes chèvres ! ” ordonna t-il au jeune garçon avant de rentrer en vitesse chez lui.
Une grande confusion se déchaîna dans la maison, et avec ferveur on essaya de rendre chaque chose digne de la visite du Qā'id. Dans le village également un vacarme se déchaîna : les femmes se ruèrent à l’entrée du Rabaḍ et certains hommes, ayant été prévenus, rentrèrent des potagers les plus proches.
Michele et Apollonia, frère et sœur de Corrado, s’approchèrent pour observer la scène avec curiosité. Ils auraient rendu hommage au Qā'id tout comme les autres ; celui qui les commandait importait peu, il s’agissait dans tous les cas de leur seigneur. D’ailleurs si Michele ne portait pas ces espèces de loques et les cheveux rasés, signes imposés par son statut de chrétien, personne n’aurait pu reconnaître qu’ils étaient des non-croyants de la parole du Prophète. En plus entre Apollonia et les femmes sarrasins14 du village il n’y avait aucune différence, à l’exception des traits plus continentaux de son visage. D’autre part, autrefois, Rabaḍ avait été colonisé exclusivement par des berbères. Toutefois, ailleurs, des islamiques à l’aspect plus européen – car d’origine différente ou parce qu’il s’agissait d’indigènes convertis – étaient très nombreux et la différence somatique d’avec les chrétiens était inexistante. En outre, depuis deux cents ans, la race berbère, arabe et indigène se mélangeait régulièrement et avait la tendance à se conformer en un seul peuple aux caractéristiques plus homo-gènes ; dans tout cela, donc, le Rabaḍ était une exception.
Il y avait un seul terme pour identifier les habitants de cette île… ils n’étaient ni arabes, ni berbères, ni indigènes, ni rien d’autre que des siciliens. Des Siciliens sarrasins et des siciliens grecs, mieux encore chrétiens – tout comme il y avait des siciliens de Judée – mais à la fin ils étaient tous des siciliens. A l’exception des nouveaux arrivés qui étaient exclus du concept de sicilien, ceux qui étaient passés de l’Afrique en Sicile aux temps de l’invasion de la dynastie des Zirides jusqu’à ce que Abd-Allah ne fut retourné de l’autre côté de la Méditerranée.
Ceux-ci, dévoués à l’Islam comme les autres, la plupart d’ethnie berbère, étaient définis africains, juste parce qu’ils provenaient de la région que le monde arabe définissait Ifrīqiya15. Les derniers africains étaient arrivés à peine quelques années auparavant, ils s’étaient enfuis des dévastations qui se déchaînaient sur la terre de leur provenance. Parvenir à créer un seul peuple entre siciliens et africains, bien que tous croyants en Allah, était une entreprise bien plus compliquée – dans le passé la question avait même débouché en un désordre civil – plutôt qu’à réussir à intégrer chrétiens et hébreux dans les tissus de la société islamique. La législation de la sharia16 sur ces derniers, en effet, était claire, rien ou presque rien ne pouvait être interprété ; ils étaient des dhimmi, des vassaux, contraints de payer la jizja, la capitation, tout en ayant le droit d’exister dans leur propre foi. Les africains au contraire étaient de vrais antagonistes, ceux avec lesquels les sarrasins siciliens devaient se partager la primauté de dominateurs.
Au Rabaḍ, toutefois, on n’avait jamais vu d’africains, le vrai problème de la journée semblait être celui de faire bonne impression devant le Qā’id ibn al-Ḥawwās, l’émir de Qasr Yanna, venu inexplicablement rendre vi-site à un de ses collecteurs d’impôts.
“ Si Corrado avait été ici ! ” s’exclama Apollonia dès qu’elle vit la caravane à l’entrée du village.
Apollonia était une femme qui avait un peu plus de vingt ans et avait un bel aspect, des cheveux ondulés châtains et des yeux noisette. La blancheur de sa peau la rendait encore plus attrayante, car parmi les arabes les jeunes filles aux caractéristiques européennes étaient les plus recherchées. S’il n’y avait pas eu l’obstacle de sa religion on lui aurait certainement dé-jà fait la cour et s’il n’y avait pas eu la petite dimension du Rabaḍ et son atmosphère familière, quelqu’un l’aurait sûrement induit à se convertir avec la promesse d’obtenir un mariage avantageux.
Michele était un peu plus jeune que Corrado, il ressemblait beaucoup à son père. Le jeune garçon semblait né pour travailler et bien qu’il était très grand, il était robuste et infatigable. Il lui manquait également quelques dents, il les avait cassées à l’âge de dix ans quand il avait tenté d’enlever un gros clou d’une poutrelle.
“ A cette heure-ci Corrado aura certainement déjà entendu la nouvelle et sera en train de remonter du potager avec notre père. ” répondit Michele
“ Quel homme sera t-il donc Qā’id ? ” demanda Apollonia, plus à elle même qu’à son frère.
Michele la regarda avec perplexité et, pris de jalousie, répondit :
“ Tu devrais peut-être rester à la maison comme font beaucoup de femmes mahométanes. ”
“ Je ne connais personne ici au Rabaḍ qui tient sous clé sa sœur. ”
“ Dehors ça fait un bout de temps que l’on ne voit pas la sœur de Umar, et si on la voit c’est avec le visage couvert. ”
“ Ça signifie qu’il existe un frère plus jaloux que toi. Et puis il suffit des yeux de Nadira pour attirer les hommes. ”
Les dernières paroles d’Apollonia étaient le pivot de nombreuses choses qui dès ce moment seraient arrivées…
Le Qā’id avançait dans les ruelles parmi les émeutes de la foule. Ali ibn Ni’ma, plus communément connu comme ibn al-Hawwās, était très aimé par les gens. Son nom lui même signifiait ” le démagogue ”, celui qui at-tire les faveurs du peuple. Et d’ailleurs son ascension n’aurait pu avoir lieu sans le soutien des gens et sans ses dons charismatiques ; un esclave de race berbère qui s’était libéré et qui était enfin devenu le Qā’id de l’entière Sicile centrale.
Ibn al-Ḥawwās arrivait en chevauchant un très beau cheval bien attelé d’ornements jaunes et verts. Les pensées d’Apollonia furent déçues quand elle se rendit compte que le seigneur de Qasr Yanna n’était pas un jeune homme prestant comme elle l’avait imaginé, mais était d’âge moyen, aux cheveux grisonnants et légèrement en surpoids. Toutefois son aspect n’était pas désagréable ; et pour sûr la plupart des jeunes filles qui l’acclamait à son passage aurait tout fait pour recevoir ses attentions.
En plus de la vingtaine d’hommes armés qui escortaient le Qā’id, une femme en habits noirs attirait l’attention. Celle-ci chevauchait en amazone le destrier immédiatement après celui de son seigneur, elle était accompagnée d’une paire de servantes. En outre il y avait un type vêtu d’un tel luxe qu’il était juste le second après ibn al-Ḥawwās.
Umar alla à l’entrée, il présenta ses hommages et invita son maître à entrer dans son ” indigne demeure ” ; ainsi appela t-il sa maison. Ali, le Qā’id, СКАЧАТЬ
12
Ibn: littéralement ”fils”. Présent dans les patronymes arabes pour indiquer sa propre descendance, souvent ayant la fonction actuelle du nom de famille. Est parfois traduit par ” bin“ ou ” ben“.
13
Gergent : nom de la ville d’Agrigente durant la période arabe.
14
Sarrasins: nom attribués aux musulmans du Moyen Age. Les autres synonymes utilisés dans le roman sont : maures, mahométans, islamiques, arabes et circoncis. Certains de ces termes sont impropres, toutefois ils reflètent la connaissance et la culture de la société de l’époque. Le terme ” musulman ” est absent car par rapport à la langue du récit il fut introduit avant le roman. Pour la même raison les termes ”byzantins ” et ” hébreux ” ont été remplacés par ” pèlerins ” et ” juifs ”.
15
Ifrīqiya : région correspondant à l’actuelle Tunisie et à certaines parties de l’Algérie et de la Libye. Littéralement ”Afrique ”, étant le terme dérivé du fait que les romains et ensuite les byzantins définissaient Afrique (province d’Afrique).
16
Sharia : loi de la religion islamique.