Correspondance, 1812-1876. Tome 4. Жорж Санд
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Название: Correspondance, 1812-1876. Tome 4

Автор: Жорж Санд

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ tant que j'ai pu: rentrer ceux que l'exil eût tués, sortir ceux qui en restant eussent été immolés. J'ai pu bien peu; je ne sais pas si on me le reproche, si quelques rigoristes le trouvent mauvais; ah! cela m'est bien égal! Je ne méprise pas les hommes qui ne sont pas des héros et des saints. Il me faudrait mépriser trop de gens, et moi-même, dont les entrailles ne peuvent pas s'endurcir au spectacle de la souffrance.

      Et puis, je ne suis pas bien sûre que ceux qui ont sacrifié leur activité, leur carrière, leur avenir politique, leur réputation même, n'aient pas été, en certaines circonstances, les vrais saints et les vrais martyrs. L'intolérance et le soupçon, l'orgueil et le mépris, voilà de tristes chemins pour marcher vers le temple de la Fraternité!

      Et puis encore, je vous disais, je crois, que toute bonne pensée vient de Dieu. S'il en envoie à nos adversaires, devons-nous y répondre par le dédain? si nous le faisons, quand reviendront-elles, ces pensées de justice et de réparation? Nous ne voulons pas que ce joug devienne moins lourd. Nous sommes fiers, de la force de nos fronts, nous ne songeons pas aux faibles qui succombent!

      Vous allez me trouver trop femme, je le sens bien. Mais je suis femme, et je ne peux pas en rougir, devant vous surtout, qui avez tant de tendresse et de piété dans le coeur.

      Maintenant, vais-je trop loin dans l'amour de l'abnégation, et, vous, avez-vous été trop loin dans l'amour de votre propre dignité? Que Dieu, qui sait nos intentions pures, pardonne à celui de nous qui se trompe. Dans un monde plus brillant et plus libre, comme ceux que nous promet Jean Reynaud, nous verrons plus clair et nous agirons avec plus de certitude. Le but pour nous dans ce purgatoire qu'il nous attribue, c'est d'agir selon nos forces et nos croyances, de manière à pouvoir monter toujours.

      J'ai à cet égard une sérénité d'espérance qui m'a toujours soutenue ou consolée, et je vous donne rendez-vous avec confiance dans un astre mieux éclairé, où nous reparlerons-de ces petits événements d'aujourd'hui qui nous paraissent si grands.

      Nous reverrons-nous dans celui-ci? Je l'ignore. Mille choses disent oui, mille autres choses disent non. Si nous avions pu causer à Nohant, je vous aurais dit le livre que vous avez à faire et que vous ferez quand même, lorsqu'un peu de calme et de repos vous aura fait apparaître dans son ensemble et dans sa signification le résumé de votre propre mission.

      Ce livre, j'y pensais le jour où j'ai appris votre délivrance. Je vous entendais me dire: «Je ne suis pas un écrivain de métier, je ne suis pas un assembleur de paroles.» Et je vous répondais, dans mon rêve: «Vous le ferez à Nohant; je l'écrirai sous votre dictée, et il remplira le monde d'une grande pensée et d'une utile leçon.» Il y a un point de vue plus vaste et plus humain que l'étroite piété de Silvio Pellico. Et le nôtre, nous eussions pu le dire sans être condamnés ni poursuivis par aucun gouvernement, tant nous eussions été dans des vérités supérieures à toute société et à nous-mêmes.

      Vous ferez ce livre, je le répète. Vous le ferez autrement; je regrette seulement de ne vous pas apporter la part d'inspiration qui nous fût venue en commun.

      Adieu, mon ami; je n'ai pas le temps de vous en dire davantage aujourd'hui. Je vis dans le mouvement du théâtre en ce moment-ci. Il me tarde de retourner à mon silence de Nohant. J'y serai dans peu de jours; c'est là que vous pourrez toujours m'écrire. Ne me laissez pas ignorer ce que vous devenez.

      A vous.

      G. SAND.

      CCCLXXXII

      AU MÊME

      Nohant, 27 novembre 1854.

      Mon ami,

      Vous êtes bon; oui, bon! ce qui est être grand plus que ceux qui ne sont que grands. Je vous ai presque grondé, et vous me répondez, avec la douceur d'un enfant, que j'ai eu raison. Il n'y a qu'une seule chose, qu'un seul point, où je puisse avoir la raison absolue pour moi. C'est quand je m'afflige et me désole de ne pas vous voir. Je ne vous écris pas aujourd'hui: mon Maurice vient d'être non dangereusement, mais assez cruellement malade. Il va bien; mais, moi, je suis lasse, lasse, et je me trouve dans un arriéré de travail effrayant.

      Où que vous soyez, écrivez-moi quelquefois. À présent que vous êtes un peu plus à vous-même qu'en prison, causons de loin; mais, au moins, causons de temps en temps.

      Où que vous soyez, après avoir repris à la vie physique, dont vous devez avoir besoin sans vous en rendre compte, lisez et écrivez. Vous avez de bonnes choses à nous dire, même en dehors de ce vain monde des faits. Votre âme a monté plus haut que les nôtres, et ces romans que vous avez faits, entre ciel et terre dans les rêveries de la prison, vous nous les devez.

      Adieu, pour cette nuit de fatigue. Je suis à vous de coeur et d'esprit.

      G. SAND.

      30 novembre. Emile, occupé pour Maurice d'une copie assez longue, ne m'a remis que ce soir la lettre que j'attendais pour vous envoyer la mienne. Je me vois donc quelques instants de calme pour vous redire que je pense à vous souvent; oui, bien souvent! Dans toutes les émotions, chagrin ou contentement, réflexion ou lecture, chaque fois que mon âme travaille, languit ou s'élève, je me compose un ciel, c'est-à-dire, selon Jean Reynaud, une terre, un monde, où j'espère aller, et tout de suite j'y appelle ceux de ce monde-ci que je veux et compte y retrouver. Et puis, dans les épreuves véritables, je pense aussi aux devoirs de cette vie où nous sommes, et votre patience, votre vertu (pardonnez-moi un mot vieilli, mais toujours bon), se présentent devant moi pour me donner de la volonté. Vous avez été bien malheureux, mon ami, et, pourtant, il me semble qu'au fond du coeur vous êtes le plus heureux des hommes, parce que vous avez la conscience la plus pure et l'équilibre le plus divin. Vous avez la certitude d'une récompense là-haut, tandis que, nous autres, nous n'avons que l'espoir d'un dédommagement.

      Je vous demande pardon pour la lettre prolixe d'Émile. Il est prolixe, c'est sa nature, en écrivant. Il ne vous entretient que de nos malades, comme si c'était bien intéressant. Il ne se dit pas assez que vous recevez trop de lettres et que vous y répondez trop fidèlement.—La seule chose bonne de sa lettre, c'est la conversion qu'il vous doit, et dont il n'est pas encore bien rempli; car il ne me l'a fait savoir qu'en me permettant de lire l'aveu qu'il en fait. Nous avions des querelles sur ce sujet, et il en avait surtout avec Maurice, qui brûlait d'aller là-bas, et qui y aurait été, sans la crainte de mon désespoir en dedans. Je ne l'aurais pourtant pas empêché de suivre son idée, qui était à la fois artistique et patriotique. Mais j'aurais bien souffert!—Voilà que je fais comme Émile, et que je vous entretiens de nous. Rien de tout cela ne vaut la peine d'être dit.

      Quand c'est à vous que je parle, je voudrais n'avoir à vous entretenir que de choses divines. J'en ai pourtant l'esprit tout plein, et je veux, un jour ou l'autre, faire un livre là-dessus que je vous dédierai. Je travaille comme un nègre pour de l'argent; il en faut pour les autres. Mais ce devoir-là est bien lourd! Quand donc, mon Dieu, aurai-je un an à moi, pour faire un livre qui ne me rapportera rien?

      Encore adieu. Maurice, bien portant, vous embrasse, et vous déclare qu'il n'a pas eu la gale, mais tout bonnement une urticaire.

      CCCLXXXIII

      A M. CHARLES JACQUE, A BARBIZON

      Nohant, 7 janvier 1855.

      Ils et elles sont arrivés ce soir bien vivants, et je ne peux pas vous dépeindre la scène d'étonnement et d'admiration de toute la famille, bêtes et autres, à la vue de ces superbes animaux.

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