L’utopie Pragmatique. Domenico Villano
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СКАЧАТЬ il faut envisager une multitude de paramètres. En effet, on constate des variations significatives en termes de longévité, de peuplement, de position géographique, de système de production et, surtout d’orientation idéologique. D’après la classification de Diana Leafe Christian, rédactrice de la revue américaine Communities, en Occident, on peut distinguer sept types de communautés en fonction de l’empreinte idéologique :

      â€¢ Communautés chrétiennes

      â€¢ Communautés spirituelles

      â€¢ Cohabitat

      â€¢ Communautés urbaines

      â€¢ Communautés égalitaires

      â€¢ Communautés rurales d’autoproduction

      â€¢ Villages écologiques

      Dans la catégorie des communautés chrétiennes, outre les expériences monastiques pluriséculaires, on trouve également des établissements ruraux, regroupant des familles et des individus, qui sont fondés sur une stricte discipline religieuse. Songeons aux communautés anabaptistes : Amish, Hussites et Mennonites, présents en Amérique du Nord, ou encore au «Peuple de Nomadelfia», une expérience communautaire catholique, dont nous parlerons en détail dans le chapitre suivant. Par ailleurs, le cadre des réalités monastiques sera illustré et approfondi par le cas de Taizé, une communauté chrétienne œcuménique de frères consacrés, fondée en Bourgogne durant la Seconde Guerre mondiale. Toujours selon la classification de Leafe Christian, par communautés spirituelles, on entend par contre toutes les réalités de vie communautaire, basées sur un credo non-chrétien; par exemple, les ashram hindouistes, les communautés ésotériques et les diverses expériences d’une spiritualité retrouvée au contact de la nature. Le cohabitat est une des formes de vie communautaire la moins immersive ; il repose sur le partage des espaces et des services, comme la cuisine et la machine à laver, voulu par les colocataires d’un bâtiment d’habitation. Il s’agit d’un phénomène qui est né dans les années 60 au Danemark, qui s’est ensuite diffusé en Europe centrale et en Amérique du Nord et qui connaît un certain engouement en Italie, depuis ces dix dernières années. Comparables aux cohabitats, on peut encore citer les communautés urbaines où, au partage des espaces, s’ajoutent une certaine intimité dans les rapports interpersonnels et des moments de vie en commun, tels que les réunions communautaires périodiques, les fêtes et les activités basées sur la réciprocité. Les communautés égalitaires ou communes ont connu une grande popularité à l’époque des manifestations estudiantines des années 60 et 70 et ont une orientation politique progressiste ou libertaire. Dans ces contextes, la démocraticité des processus décisionnels et le partage de la propriété sont des éléments fondamentaux; les habitants de ces communautés sont souvent employés dans une ou plusieurs sociétés coopératives de production, où il n’y a pas de structure hiérarchique de la gestion d’entreprise. Nous aurons l’occasion d’approfondir cette dimension productive dans l’étude d’Urupia, une communauté libertaire du Salento. Les communautés rurales sont issues du désir d’abandonner la vie urbaine pour retourner habiter les campagnes et travailler dans le secteur agro-alimentaire. En outre, elles se distinguent des villages écologiques par l'absence d’un projet bien précis, visant à réduire l’impact écologique de leur établissement. Ces derniers, nés à partir de la deuxième moitié des années 80 en Europe et ensuite aux États-Unis, sont aujourd’hui répandus sur tous les continents et consistent dans des habitats ruraux, qui sont apparus pour lutter contre le réchauffement climatique par la pratique quotidienne d’un choix de vie radical. Selon la définition de Gilman, un village écologique ou écovillage est :

      Â«un établissement humain intentionnel, urbain ou rural réalisé à échelle humaine disposant de toutes les fonctions nécessaires à la vie, dans lequel les activités s'intègrent sans dommage à l'environnement naturel tout en soutenant le développement harmonieux des habitants. C'est un lieu où les initiatives se prennent de façon décentralisée - selon les principes de la démocratie participative - et de manière à pouvoir se prolonger avec succès dans un futur indéfini.»

      Dans cet ouvrage, nous aurons la possibilité d’analyser en profondeur les structures productives et l'élaboration idéologique de la communauté écossaise de Findhorn, le premier écovillage d'Europe et siège du réseau mondial des villages écologiques (Global Ecovillage Network). Ce réseau, fondé en 1995, unit des centaines d’écovillages et favorise l’échange de bonnes pratiques et l’aide mutuelle entre les différentes réalités communautaires. Par ailleurs, celui-ci collabore avec les Nations Unies dans le domaine de la résolution des conflits et du développement durable et entreprend des actions de défense des droits de l’homme, comme le projet de secours aux migrants de l’île de Lesbos, «RefuGen», mis en place depuis décembre 2015. En Italie, il existe un réseau de 34 écovillages, appelé R.I.V.E. (Rete Italiana dei Villaggi Ecologici) [Réseau Italien des Villages Écologiques]. Ces réalités sont principalement rurales et de petites dimensions, regroupées au centre de l’Italie et dans les trois Vénéties. La communauté de Nomadelfia et la commune d’Urupia, qui seront envisagées dans les chapitres suivants, ne font pas partie du R.I.V.E., car elles ne se reconnaissent pas dans le projet proposé par le réseau. Enfin, en ce qui concerne les communautés intentionnelles dans leur ensemble, il existe une association mondiale appelée «Fellowship for Intentional Communities», dont le siège se trouve aux États-Unis. Celle-ci s’occupe de la promotion du modèle de vie communautaire et rédige régulièrement un guide des communautés intentionnelles, dans lequel sont listées 1 520 réalités communautaires à travers le monde, dont la plupart sont concentrées dans les pays occidentaux.

      L'éthique de Foucault et les communautés intentionnelles

      Dans sa thèse de doctorat à l’Université Southern Cross de Lismore en Australie, la philosophe Ruth Rewa Bohill a mené une étude sur les communautés intentionnelles de la Nouvelle-Galles du Sud, en reprenant les outils d’analyse de l’éthique du philosophe français, Michael Foucault. Cette étude a jeté les bases du présent ouvrage, ayant pour objet l’analyse, selon les mêmes catégories interprétatives, de quatre réalités communautaires contemporaines dans le contexte européen. Dans le dernier tome de la trilogie de l’Histoire de la Sexualité, intitulé Le Souci de soi, Foucault s’appuie sur certaines expériences communautaires de la Grèce hellénistique, qu’on définirait aujourd’hui comme des communautés intentionnelles, pour élaborer une théorie de l'éthique comme pratique de la liberté. En effet, dans les communautés pythagoriciennes, stoïciennes et épicuriennes, le philosophe français redécouvre une vision de l'éthique en tant que choix personnel, ayant des conséquences immédiates dans la pratique quotidienne. Foucault refuse le concept cartésien de liberté, cette vision du Siècle des Lumières, selon laquelle l’essence de l’homme peut être révélée par la raison. Pour Foucault, il n’existe pas de vérité à découvrir sur l’essence humaine; l'identité se construit historiquement, par la succession des cultures et de leurs discours, qui donnent un sens au monde et à nous-mêmes. La liberté de l’homme réside dans la possibilité de résister СКАЧАТЬ