Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 8 - (Q suite - R - S). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
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Читать онлайн книгу Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 8 - (Q suite - R - S) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc страница 15

СКАЧАТЬ 1240, des maîtres avaient jugé à propos d'ajourer non-seulement les écoinçons intérieurs mais aussi les écoinçons supérieurs des roses. Ce fut à cette époque que l'on construisit la chapelle du château de Saint-Germain en Laye 30. Cet édifice, dont la structure est des plus remarquables, tient autant aux écoles champenoise et bourguignonne qu'à celle de l'Île-de-France. L'architecte ne pouvait manquer d'appliquer ce système de fenestrage à la rose. Cette chapelle, depuis les travaux entrepris dans le château sous Louis XIV, était complétement engagée sous un enduit de plâtre. La restauration de cet édifice ayant été confiée à l'un de nos plus habiles architectes, M. Millet, celui-ci reconnut bien vite l'importance de la sainte Chapelle de Saint-Germain en Laye; il s'empressa de la débarrasser des malencontreux embellissements qu'on lui avait fait subir, il retrouva l'arcature inférieure en rétablissant l'ancien sol, et fit tomber le plâtrage qui masquait la rose. Or, cette rose, une des plus belles que nous connaissions, est inscrite dans un carré complétement ajouré.

      Son ensemble, tracé en A (fig. 9), se compose de douze rayons principaux, les quatre écoinçons étant à jour et vitrés. L'architecte a voulu prendre le plus de lumière possible, car les piles d'angles qui portent les voûtes (voy. le plan partiel B) font saillie sur le diamètre de la rose; le formeret portant sur les colonnettes a laisse entre lui et la rose l'espace b, et le linteau qui réunit la pile à l'angle de la chapelle est biaisé, ainsi que l'indique la ligne ponctuée c, afin de dégager cette rose.

      Pour indiquer plus clairement le tracé de la rose de la sainte Chapelle de Saint-Germain en Laye, nous n'en donnons qu'un des quatre angles, avec un de ses écoinçons ajourés, à l'échelle de 0m,02 pour mètre. On remarquera qu'ici encore, conformément aux dispositions des premières roses, les colonnettes sont dirigées, les chapiteaux vers le centre. Les douze rayons principaux, étrésillonnés par les cercles intermédiaires D, offrent une résistance considérable. À leur tour, ces cercles intermédiaires sont étrésillonnés par les arcatures F et par des colonnettes intermédiaires. Quatre de ces colonnettes secondaires sont parfaitement butées par les grands cercles G des écoinçons, les huit autres butent contre le châssis. Quant aux rayons principaux E, quatre butent suivant les deux axes, et les huit autres sont maintenus par les trèfles H qui, à leur tour, étrésillonnent les grands cercles d'écoinçons G. L'appareil de ce réseau de pierre est excellent, simple et résistant. En L, nous donnons la section du réseau principal; en M, celle des redents. L'extérieur de la rose étant en V, on remarquera que le profil intérieur est plus plat que le profil extérieur, afin de masquer aussi peu que possible les panneaux de vitraux par la saillie des moulures à l'intérieur, et de produire à l'extérieur des effets d'ombres et de lumières plus vifs. Ici, les vitraux et les armatures de fer sont en feuillure et non plus attachés contre le parement intérieur. Nous avons encore dans cette rose un exemple de la solidité de ces délicats treillis de pierre lorsqu'ils sont bien combinés; car, malgré des plâtrages, des trous percés après coup, des mutilations nombreuses, la rose Saint-Germain en Laye tient; et lorsqu'il s'agira de la démasquer, beaucoup de ces morceaux pourront être utilisés.

      L'école de l'Île-de-France ne fit que rendre plus légères les sections des compartiments des roses, sans modifier d'une manière notable le système de leur composition. Mais il faut signaler les roses appartenant à une autre école, et qui diffèrent sensiblement de celles appartenant à l'école de l'Île-de-France. Les exemples que nous venons de présenter font voir que, dans la construction de ces claires-voies, les architectes employaient autant que possible de grands morceaux de pierre, d'épaisses dalles découpées et des rayons étrésillonnants. Ces ensembles formaient ainsi une armature rigide, n'offrant aucune élasticité. Ce système s'accordait parfaitement avec la nature des matériaux donnés à cette province. Mais en Champagne, on ne possédait pas ce beau cliquart du bassin de Paris; les matériaux calcaires dont on disposait, étaient d'une résistance relativement moindre, et ne pouvaient s'extraire en larges et longs morceaux. Il fallait bâtir par assises ou par claveaux. Ces pierres ne pouvaient s'employer en délit comme le liais ou le cliquart. Aussi les architectes de la cathédrale de Reims adoptèrent-ils d'autres méthodes. Ils construisirent les réseaux des roses comme les meneaux des fenêtres, par superposition de claveaux et embrèvement des compartiments dans des cercles épais, clavés comme des arcs de voûtes. Telles sont faites les deux roses nord et sud du transsept de cette cathédrale, qui datent de 1230 environ. La rose n'est plus fermée par un formeret plein cintre, comme à Paris, mais s'inscrit dans un arc brisé, projection des arcs-doubleaux de la grande voûte; si bien qu'au-dessus du cercle propre de la rose, il reste un écoinçon vide (voy. fig. 2, le tracé B). La rose de la façade occidentale de cette cathédrale, élevée plus tard, c'est-à-dire vers 1250, est construite d'après la même donnée. Le cercle principal est un épais cintre composé de claveaux, dans lequel s'embrèvent les compartiments. Ces roses étant parfaitement gravées, avec tous leurs détails, dans l'ouvrage publié par M. Gailhabaud 31, il nous paraît inutile de les reproduire ici. Les cercles principaux des roses du transsept n'ont pas moins de 1m,60 d'épaisseur, et constituent de véritables arcs construits par claveaux. Quant aux compartiments intérieurs, formant les châssis vitrés, ils n'ont que 0m,24 d'épaisseur, non compris la saillie des bases et chapiteaux des colonnettes. Les panneaux des vitraux sont attachés au parement intérieur du réseau, comme à la rose de la façade occidentale de Notre-Dame de Paris.

      La rose occidentale de la cathédrale de Reims se rapproche davantage du système de l'Île-de-France, mais le grand cercle clavé n'en existe pas moins, et a 2m,18 d'épaisseur, ce qui en fait un membre d'architecture d'une grande force. Pour le réseau, son épaisseur est de 0m,82. Ses panneaux de vitraux sont pris en feuillure. Mais nous avons fait ressortir ailleurs (voy. CATHÉDRALE) la puissance extraordinaire des moyens employés par les architectes de Notre-Dame de Reims. Aussi bien ces grandes claires-voies, déjà si légères à Paris, au commencement du XIIIe siècle, sont à Notre-Dame de Reims des constructions inébranlables, épaisses et reposant non plus sur des sections de 0m,06 à 0m,10 superficiels, mais de 0m,20 à 0m,25. Cependant, dès les dernières années du XIIIe siècle, ces architectes champenois avaient atteint et même dépassé la limite de la légèreté donnée aux réseaux des claires-voies dans l'Île-de-France. C'est qu'alors ces architectes avaient su trouver des matériaux très-fins et résistants, tels, par exemple, que le liais de Tonnerre, et que, profitant des qualités particulières à ces pierres calcaires, ils donnaient aux compartiments de leurs fenêtres, aux meneaux et aux réseaux des sections, une ténuité qui ne fut jamais dépassée. Dans l'article CONSTRUCTION, on peut se rendre compte de la légèreté extraordinaire des membres des claires-voies champenoises, en examinant les figures relatives à l'église Saint-Urbain de Troyes, bâtie à la fin du XIIIe siècle. Mais à Reims même, il existait une église dont nous parlons fréquemment, Saint-Nicaise, bâtie par l'architecte Libergier, et dont l'ordonnance, la structure et les détails étaient d'une valeur tout à fait exceptionnelle. De cette église, démolie au commencement de ce siècle, il ne nous reste que la dalle tumulaire de son architecte, aujourd'hui déposée dans la cathédrale; quelques fragments de pavages et d'ornements, des plans, un petit nombre de dessins et une admirable gravure. Au-dessus d'un porche très-remarquablement dessiné 32, au centre de la façade occidentale, s'ouvrait une rose d'une composition toute champenoise, en ce qu'elle formait plutôt un immense fenestrage qu'une rose proprement dite, inscrit sous le formeret de la voûte de la nef.

      Nous présentons (fig. 10) cette composition. L'arc A est le formeret ou plutôt un premier arc-doubleau de la grande voûte. Le cercle qui inscrit le réseau est indépendant de cet arc et ne s'y rattache que par les cinq sommiers B. Le réseau est, conformément à la donnée rémoise, indépendant du cercle, ainsi que le fait voir la coupe en C. Pour maintenir ce cercle, ont été posés les cercles-étrésillons D, E, F. On observera que dans le tracé du réseau, l'arcature externe СКАЧАТЬ



<p>30</p>

Voyez CHAPELLE, fig. 4, 5 et 6.

<p>31</p>

L'architecture du Ve au XVIe siècle, et les arts qui en dépendent. Gide édit., t. I.

<p>32</p>

Voyez PORCHE.