Bric-à-brac. Dumas Alexandre
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Название: Bric-à-brac

Автор: Dumas Alexandre

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ ne fut qu'un cri, qu'un gémissement, qu'une lamentation parmi les savants. Comme la voix de Rachel dans Rama, on entendait pendant la nuit des voix venant du Jardin des Plantes, et qui criaient:

      – À quoi nous sert un hippopotame mâle, si nous n'avons pas un hippopotame femelle?

      Ces voix traversèrent la Méditerranée et firent tressaillir

      Halim-Pacha au milieu de son harem.

      – Ne laissons pas se désoler ainsi un peuple chez lequel nous avons fait notre éducation, dit-il à son frère Saïd, et prouvons-lui que nous sommes restés Turcs en nous montrant reconnaissants.

      Et il ordonna qu'à tout prix une femelle d'hippopotame fût prise dans le Nil blanc et envoyée au Caire.

      Il y a un pays où le mot impossible est bien autrement inconnu qu'en

      France, c'est l'Égypte.

      Au bout d'un an, on annonça par un messager, à Halim-Pacha, que ses désirs étaient remplis. Au bout de seize mois, la femelle, âgée de six mois et quelques jours, arriva au Caire; enfin, dans le commencement de son septième mois, elle fut embarquée à bord d'un navire de l'État, avec de l'eau du Nil pour trente jours, et trente-cinq chèvres, dont le lait servait à sa nourriture.

      Au bout de dix-sept jours, le bâtiment aborda à Marseille.

      Pendant ce temps, j'avais fait plus ample connaissance avec le mâle.

      Delaporte, qui était resté quatre mois en France, était allé passer trois de ces quatre mois dans sa famille, et était revenu à Paris.

      Aussitôt son retour, il était venu me chercher pour aller voir son hippopotame au Jardin des Plantes.

      Son hippopotame pouvait avoir de huit à neuf mois.

      Il y avait trois mois qu'il n'avait vu Delaporte.

      Voici ce que je puis constater à l'honneur de l'hippopotame, et c'est à regret que je contredis sur ce point l'opinion de mon honorable et savant ami Geoffroy Saint-Hilaire, qui prétend que l'hippopotame est une créature privée de tout sentiment généreux:

      Dès que nous entrâmes dans l'enceinte réservée, l'hippopotame, qui était au fond de l'eau, reparut à la surface; puis, lorsque Delaporte l'eut appelé de son nom arabe, l'animal accourut avec les démonstrations de joie les plus vives, et avec des grognements de satisfaction pouvant équivaloir à ceux que pousserait un troupeau d'une trentaine de porcs.

      Rappelons un fait que le lecteur n'a pas oublié, c'est que le père et là mère du susdit hippopotame s'étaient fait tuer l'un après l'autre en défendant leur petit.

      Il y a loin de là, à cet axiome si hardiment avancé par notre savant ami Geoffroy Saint-Hilaire, « qu'il est commun que les femelles des mammifères abandonnent leurs petits et même les dévorent, et qu'il n'y a pas d'animaux aussi brutaux et aussi colères que les hippopotames. »

      On verra l'explication que nous donnerons (nous qui ne sommes pas un savant) de cette brutalité de notre hippopotame femelle, à l'endroit de son petit.

      À peine fut-elle arrivée à Paris, au bout de dix-sept jours, ayant encore, par conséquent, pour treize jours d'eau du Nil, que, quoiqu'elle n'eût que sept mois, l'hippopotame mâle, qui en avait dix-sept, se rua sur elle avec une brutalité qui faisait plus d'honneur à sa passion qu'à sa courtoisie.

      Il résulta de cette brutalité une première gestation qui dura quatorze mois.

      Au bout de quatorze mois, c'est-à-dire à vingt-deux mois, la femelle mit bas un petit hippopotame; la parturition eut lieu dans l'eau, soudainement, sans que la femelle eût annoncé par aucun signe que cette parturition fût si proche.

      À peine eut-elle mis bas, à peine le petit fut-il venu à la surface de l'eau pour respirer, que les savants furent prévenus et accoururent. Bien leur en prit de s'être hâtés; car, dix ou douze heures après sa naissance, la femelle se jeta sur son petit et, d'une de ses défenses, le blessa mortellement.

      Disons en passant que, lorsque la gueule de l'hippopotame s'ouvre dans sa plus grande étendue, soit en jouant, soit en bâillant, soit en absorbant une gerbe de carottes, elle mesure un mètre d'étendue d'une mâchoire à l'autre.

      Les savants étaient désolés de cette mort, attendu que les naturalistes avaient généralement affirmé qua l'hippopotame était unipare, c'est-à-dire ne mettait bas qu'une seule fois.

      Il est vrai qu'unipare veut aussi bien dire, à mon avis, que l'hippopotame ne met bas qu'un seul petit à la fois.

      La désolation, au reste, ne fut pas longue. Le gardien des deux animaux annonça bientôt à ces mêmes savants que, si ses prévisions ne le trompaient pas, la femelle hippopotame donnerait dans quatorze mois un nouveau produit. Quatorze mois après, jour pour jour, la femelle manifesta l'intention d'aller au bassin préparé pour faire ses couches, et, après une seule douleur, qui se manifesta par une violente crispation, elle mit au monde son second petit.

      Les savants furent prévenus de nouveau. Ils accoururent, virent le petit animal nageant à la surface du bassin, se couchant délicatement sur le cou et sur le dos de sa mère, qui – l'allaitait en levant la cuisse; seulement, du lundi au mercredi matin, c'est-à-dire pendant l'espace de quarante-huit heures environ, ni le petit ni la mère ne sortirent de l'eau.

      Le mâle paraissait indifférent, mais non pas hostile à sa progéniture.

      Le mercredi matin, le petit commença de sortir du bassin et de se coucher au soleil. On envoya aussitôt chercher les savants, qui vinrent, qui l'examinèrent et le mesurèrent. Il portait près d'un mètre trente-cinq centimètres d'une extrémité à l'autre, et grossissait à vue d'oeil, et comme si on l'eût soufflé. Rapport d'un témoin oculaire.

      Au nombre des savants, est un fort bon et fort aimable homme, M. Prévost, que la femelle hippopotame, malgré toutes les avances qu'il lui a faites et lui fait journellement, a pris en grippe. Elle ne peut pas le voir, et, sitôt qu'elle le voit, sort de son bassin et essaye de le charger.

      M. Geoffroy-Saint Hilaire lui-même, malgré la haute position qu'il occupe, non-seulement au Jardin des plantes, mais encore dans la science, n'a jamais pu familiariser avec le pachyderme; ce qui pourrait bien avoir eu une influence sur le jugement un peu sévère qu'il en porte, contradictoirement à l'opinion de son confrère le savant allemand Funke, qui dit, dans son Histoire naturelle, édition de Leipzig, 1811, que «la nature de l'hippopotame est douce et inoffensive.»

      Ajoutons que, pendant la soirée qui précéda le meurtre commis par l'hippopotame sur son petit, MM. les savants se livrèrent à une grande chasse aux rats. Les moyens de destruction étant le pistolet, et les savants, chose reconnue, ne maniant pas cette arme avec une supériorité remarquable, il y eut peu de rats tués, mais beaucoup de coups de pistolet tirés et beaucoup de bruit fait.

      Ce bruit parut vivement inquiéter la femelle de l'hippopotame.

      Vers une heure du matin, le gardien de veille vit sortir de l'eau le petit hippopotame se traînant à peine, et paraissant visiblement souffrir. Au bout de quelques pas, il se coucha, avec un gémissement, au bord de son bassin; le gardien courut à lui, et reconnut six blessures, dont une mortelle traversant le poumon.

      Il courut à M. Prévost, le réveilla, et lui annonça que, s'il voulait voir le petit hippopotame vivant, il lui fallait СКАЧАТЬ