Les compagnons de Jéhu. Dumas Alexandre
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Название: Les compagnons de Jéhu

Автор: Dumas Alexandre

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ pour les reprendre.

      – Et pourquoi avaient-ils déposé les armes?

      – Ils en avaient reçu l'ordre de S. M. Louis XVIII.

      – On a parlé d'une proclamation écrite de la main même du roi.

      – En voici la copie.

      Le paysan présenta le papier au personnage qui linterrogeait.

      Celui-ci louvrit et lut:

      «La guerre n'est absolument propre qu'à rendre la royauté odieuse et menaçante. Les monarques qui rentrent par son secours sanglant ne peuvent jamais être aimés: il faut donc abandonner les moyens sanglants et se confier à l'empire de l'opinion, qui revient d'elle-même aux principes sauveurs. Dieu et le roi seront bientôt le cri de ralliement des Français; il faut réunir en un formidable faisceau les éléments épars du royalisme, abandonner la Vendée militante à son malheureux sort, et marcher dans une voie plus pacifique et moins incohérente. Les royalistes de l'Ouest ont fait leur temps, et l'on doit s'appuyer enfin sur ceux de Paris, qui ont tout préparé pour une restauration prochaine…»

      Le président releva la tête, et, cherchant Morgan d'un oeil dont son capuchon ne pouvait voiler entièrement léclair:

      – Eh bien, frère, lui dit-il, j'espère que voilà ton souhait de tout à l'heure accompli, et les royalistes de la Vendée et du Midi auront tout le mérite du dévouement.

      Puis, abaissant son regard sur la proclamation, dont restaient quelques lignes à lire, il continua:

      «Les Juifs avaient crucifié leur roi, depuis ce temps ils errent par tout le monde: les Français ont guillotiné le leur, ils seront dispersés par toute la terre.

      «Datée de Blankenbourg, le 25 août 1799, jour de notre fête, de notre règne le sixième.

      «Signé: Louis_._»

      Les jeunes gens se regardèrent.

      – Q_uos vultperdere Jupiter dementat_! dit Morgan.

      – Oui, dit le président; mais, quand ceux que Jupiter veut perdre représentent un principe, il faut les soutenir, non seulement contre Jupiter, mais contre eux-mêmes. Ajax, au milieu de la foudre et des éclairs, se cramponnait à un rocher, et, dressant au ciel son poing fermé, disait: «jéchapperai malgré les dieux…»

      Puis, se retournant du côté de l'envoyé de Cadoudal:

      – Et à cette proclamation qu'a répondu celui qui t'envoie?

      – À peu près ce que vous venez de répondre vous-même. Il m'a dit de venir voir et de m'informer de vous si vous étiez décidés à tenir malgré tout, malgré le roi lui-même.

      – Pardieu! dit Morgan.

      – Nous sommes décidés, dit le président.

      – En ce cas, dit le paysan, tout va bien. Voici les noms réels des nouveaux chefs et leurs noms de guerre; le général vous recommande de ne vous servir le plus possible dans vos correspondances que des noms de guerre: c'est le soin qu'il prend lorsque, de son côté, il parle de vous.

      – Vous avez la liste? demanda le président.

      – Non; je pouvais être arrêté, et la liste eût été prise.

      Écrivez, je vais vous dicter.

      Le président s'assit à sa table, prit une plume et écrivit sous la dictée du paysan vendéen les noms suivants:

      «Georges Cadoudal, Jéhu ou la Tête-ronde; Joseph Cadoudal, Judas Macchabée; Lahaye Saint-Hilaire, David; Burban Malabry, Brave-la-Mort; Poulpiquez, Royal-Carnage; Bonfils, Brise- Barrière; Dampherné, Piquevers; Duchayla, la Couronne; Duparc, le Terrible; la Roche, Mithridate; Puisage, Jean le Blond

      – Voilà les successeurs des Charrette, des Stofflet, des Cathelineau, des Bonchamp, des d'Elbée, des la Rochejacquelein et des Lescure! dit une voix.

      Le Breton se retourna vers celui qui venait de parler:

      – S'ils se font tuer comme leurs prédécesseurs, dit-il, que leur demanderez-vous?

      – Allons, bien répondu, dit Morgan; de sorte…?

      – De sorte que, dès que notre général aura votre réponse, reprit le paysan, il reprendra les armes.

      – Et si notre réponse eût été négative…? demanda une voix.

      – Tant pis pour vous! répondit le paysan; dans tous les cas, linsurrection était fixée au 20 octobre.

      – Eh bien, dit le président, le général aura, grâce à nous, de quoi payer son premier mois de solde. Où est votre reçu?

      – Le voici, dit le paysan tirant de sa poche un papier sur lequel étaient écrits ces mots:

      «Reçu de nos frères du Midi et de l'Est, pour être employée au bien de la cause, la somme de: «GEORGES CADOUDAL,

      «Général en chef de l'armée royaliste de Bretagne.»

      La somme, comme on voit, était restée en blanc.

      – Savez-vous écrire? demanda le président.

      – Assez pour remplir les trois ou quatre mots qui manquent.

      – Eh bien, écrivez: «Cent mille francs.»

      Le Breton écrivit; puis, tendant le papier au président:

      – Voici le reçu, dit-il; où est l'argent?

      – Baissez-vous, et ramassez le sac qui est à vos pieds; il contient soixante mille francs.

      Puis, s'adressant à un des moines:

      – Montbar, où sont les quarante autres mille? demanda-t-il.

      Le moine interpellé alla ouvrir une armoire et en tira un sac un peu moins volumineux que celui qu'avait rapporté Morgan, mais qui, cependant, contenait la somme assez ronde de quarante mille francs.

      – Voici la somme complète, dit le moine.

      – Maintenant, mon ami, dit le président, mangez et reposez-vous;

      demain, vous partirez.

      – On m'attend là-bas, dit le Vendéen; je mangerai et je dormirai sur mon cheval. Adieu, messieurs, le ciel vous garde!

      Et il s'avança, pour sortir, vers la porte par laquelle il était entré.

      – Attendez! dit Morgan.

      Le messager de Georges s'arrêta.

      – Nouvelle pour nouvelle, fit Morgan; dites au général Cadoudal que le général Bonaparte a quitté l'armée d'Égypte, est débarqué avant-hier à Fréjus et sera dans trois jours à Paris. Ma nouvelle vaut bien les vôtres; qu'en dites-vous?

      – Impossible! s'écrièrent СКАЧАТЬ