Le roman d'un jeune homme pauvre (Play). Feuillet Octave
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СКАЧАТЬ puis, c'est pas vrai, il n'en est pas là, il ne manque pas de pain… ce n'est pas possible.

       MADAME VAUBERGER.

      Puisque j'en suis sûre! puisqu'il n'a plus un sou, puisque Edouard l'a espionné… Je te dis qu'il n'a pas déjeuné ce matin, à preuve que ses pauvres jambes ne peuvent plus le soutenir… et je parie qu'il ne va pas encore dîner ce soir… car il est trop fier pour mendier un dîner!

       VAUBERGER.

      Eh bien, tant pis pour lui! Quand on est pauvre, faut pas être fier!

      MADAME VAUBERGER, indignée.

      Vauberger! tu es un concierge, tu veux qu'on t'appelle concierge… eh bien, tu as les sentiments d'un portier!

       VAUBERGER.

      Madame Vauberger! (Maxime paraît au fond.)

       SCENE IX.

       LES MEMES, MAXIME.

      VAUBERGER, servilement.

      Monsieur le marquis, je rangeais ces papiers… Monsieur le marquis n'a pas d'autre ordre à nous donner?

      MAXIME, froidement.

      Allez-vous-en.

       VAUBERGER.

      Oui, monsieur le marquis. (Se retournant près de sortir.)

      Ruiné, va!

       SCENE X.

      MAXIME, seul.

      Je n'ai pas osé… je n'ai pas osé lui demander l'aumône… et pourtant ce n'eût pas été une aumône, puisqu'il a de l'argent à moi… mais je n'ai pas osé… Je le verrai demain matin, et j'espère qu'il m'offrira de lui-même… on ne meurt pas pour un jour de jeûne… Ah! si je pèche par orgueil, je suis puni… car réellement je souffre… Si j'allais dîner tout bonnement n'importe où… on me connaît… je pourrais dire que j'ai oublié ma bourse… j'ai fait cela cent fois, sans scrupule, dans d'autres temps… Non! tous ces expédients, qui sentent la misère et la tricherie, me répugnent trop… Pour les pauvres, cette pente est glissante; je n'y mettrai pas le pied! Si je pouvais dormir. (Il s'asseoit dans le fauteuil.) La faim! ce n'est donc pas un vain mot… la faim! Il y a donc vraiment une maladie de ce nom-là… il y a vraiment des créatures humaines qui souffrent presque chaque jour ce que je souffre en ce moment?.. et encore, moi, je souffre seul; le seul être qui m'intéresse au monde, ma soeur, je vois son cher visage, heureux, souriant… Mais ceux qui entendent le cri déchirant de leurs entrailles répété par des voix aimées, suppliantes… ceux qu'attendent dans leur froid logis des femmes aux joues pâles et des petits enfants sans sourire… pauvres gens… O sainte charité! (Il sommeille. – Musique jusqu'au réveil de Maxime.)

       SCENE XI.

       MAXIME, MADAME VAUBERGER.

      Elle entre doucement, portant quelques plats sur un plateau. Elle pose le plateau sur la cheminée, approche une petite table et la couvre d'une nappe.

      MAXIME, s'éveillant à demi.

      Triste sommeil! Je fais de vrais rêves de naufragé… je ne vois que des mirages de festins, de banquets! (Apercevant le plateau.) Tiens! (Il voit madame Vauberger.) Qu'est-ce que c'est? qu'est-ce que vous faites?

      MADAME VAUBERGER, affectant la surprise.

      Est-ce que Monsieur n'a pas demandé à dîner?

       MAXIME.

      Pas du tout.

       MADAME VAUBERGER.

      Edouard m'a pourtant dit que Monsieur…

       MAXIME.

      Edouard s'est trompé: c'est quelque locataire à côté; voyez.

       MADAME VAUBERGER.

      Il n'y a pas de locataire sur le palier de Monsieur… Je ne comprends pas…

       MAXIME.

      Enfin, ce n'est pas moi! Qu'est-ce que cela veut donc dire?..

      Vous me fatiguez! Emportez cela!..

      MADAME VAUBERGER. Elle replie tristement la nappe, et reprend timidement après une pause.

      Monsieur a probablement dîné?

       MAXIME.

      Probablement.

       MADAME VAUBERGER.

      C'est dommage, car le dîner est prêt… il va être perdu, et le petit va être grondé par son père… Si Monsieur n'avait pas dîné, par hasard, il m'aurait vraiment bien obligée…

      MAXIME, violemment.

      Allez-vous-en, vous dis-je! sortez!.. (Il se lève et s'approche d'elle avec douceur.) Louison… je vous comprends… je vous remercie: mais je suis un peu souffrant ce soir: je n'ai pas faim.

      MADAME VAUBERGER, avec émotion. Elle se rapproche, portant le plateau qu'elle dépose doucement sur la table devant Maxime.

      Ah! monsieur Maxime! si vous saviez comme vous me mortifiez! Eh bien, vous me paierez mon dîner, là; vous me mettrez de l'argent dans la main quand il vous en reviendra; mais vous pouvez être bien sûr que quand vous me donneriez cent mille francs, ça ne me ferait pas autant de plaisir que de vous voir manger mon pauvre dîner! Ce serait une fière charité que vous me feriez, allez! vous devez pourtant bien comprendre ça, monsieur Maxime, vous qui avez de l'esprit.

       MAXIME.

      Eh bien, ma chère Louison, que voulez-vous? je ne peux pas vous donner cent mille francs… mais je vais manger votre dîner. (Il s'asseoit brusquement devant la table.)

       MADAME VAUBERGER.

      Oh! merci, monsieur Maxime, merci… vous avez bon coeur.

       MAXIME.

      Et bon appétit aussi, Louison, je vous jure… mais laissez-moi, n'est-ce pas?..

       MADAME VAUBERGER

      Oui, monsieur Maxime… merci, Monsieur.

      MAXIME, la rappelant.

      Louison… donnez-moi votre main… soyez tranquille, ce n'est pas pour y mettre de l'argent… (Lui prenant la main.) Là… à revoir. (Madame Vauberger sort en pleurant.)

       SCENE XII.

      MAXIME, puis LAUBEPIN.

      MAXIME, portant son mouchoir à ses yeux.

      Allons! pas d'enfantillage! et dînons puisque dîner il y a!.. Ce que c'est que le fruit défendu! j'ai moins faim que tout à l'heure! Cette pauvre femme, que j'accusais, cette portière… СКАЧАТЬ