Plus fort que Sherlock Holmès. Марк Твен
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Название: Plus fort que Sherlock Holmès

Автор: Марк Твен

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ arriva: Fuller se fit ouvrir un compartiment; je montai dans le même wagon à l'autre extrémité, et suivant tranquillement le couloir, je m'installai derrière lui. Lorsqu'il paya sa place au conducteur, il fallut bien indiquer sa gare de destination; je me glissai alors un peu plus près de lui pendant que l'employé lui rendait sa monnaie.

      Quand vint mon tour de payer, je pris un billet pour la même station que Fuller, située à environ cent milles vers l'Ouest. A partir de ce moment-là, et pendant une semaine, j'ai dû mener une existence impossible. Il poussait toujours plus loin dans la région Ouest. Mais, au bout de vingt-quatre heures, il avait cessé d'être une femme. Devenu un bon laboureur comme moi, il portait de grands favoris roux. Son équipement était parfait, et il pouvait jouer son personnage mieux que tout autre, puisqu'il avait été réellement un ouvrier à gages. Son meilleur ami ne l'aurait pas reconnu. A la fin, il s'établit ici, dans un camp perdu sur une petite montagne de Montana; il habite une maison primitive et va prospecter tous les jours; du matin au soir, il évite toute relation avec ses semblables.

      J'ai pris pension à une guinguette de mineurs. Vous ne pouvez vous figurer le peu de confortable que j'y trouve. Rien n'y manque: les punaises, la saleté, la nourriture infecte.

      Voilà quatre semaines que nous sommes ici, et pendant tout ce temps, je ne l'ai aperçu qu'une fois; mais, chaque nuit, je suis à la trace ses allées et venues de la journée et me mets en embuscade pour l'observer. Dès qu'il a eu loué une hutte ici, je me suis rendu à cinquante mille d'ici pour télégraphier à l'hôtel de Denver de garder mes bagages jusqu'à nouvel ordre. Ici je n'ai besoin que de quelques chemises de rechange que j'ai eu soin d'apporter avec moi.

      Silver Gulch, 12 juin.

      Je crois que l'épisode de Denver n'a pas eu son écho jusqu'ici. Je connais presque tous les habitants du Camp et ils n'y ont pas encore fait la moindre allusion, du moins, devant moi. Sans aucun doute, Fuller se trouve très heureux; il a loué à deux milles d'ici, dans un coin retiré de la montagne, une concession qui promet un bon rendement et dont il s'occupe très sérieusement. Mais, malgré cela, il est métamorphosé d'aspect! Jamais plus il ne sourit, il se concentre en lui-même et vit comme un ours, lui qui était si sociable et si gai, il y a à peine deux mois! Je l'ai vu passer plusieurs fois ces derniers jours, abattu, triste, et l'air déprimé. Il fait peine à voir. Il s'appelle maintenant David Wilson.

      Je m'imagine qu'il restera ici, jusqu'à ce que nous le délogions de nouveau. Puisque vous le voulez, je continuerai à le persécuter, mais je ne vois pas en quoi il peut être plus malheureux qu'à présent. Je retournerai à Denver, m'accorder une saison de repos et d'agrément; je m'offrirai une nourriture meilleure, un lit plus confortable et des vêtements plus propres; puis je prendrai mes bagages et ferai déménager le malheureux Wilson.

      Denver, 19 juin.

      Tout le monde le regrette ici. On espère qu'il fait fortune à Mexico; les vœux qu'on forme pour lui sont très sincères, et viennent du cœur. Je m'en rends parfaitement compte: je m'attarde à plaisir ici, je l'avoue; mais si vous étiez à ma place vous auriez pitié de moi. Je sens bien ce que vous allez penser de moi; vous avez cent fois raison au fond. Si j'étais à votre place, et si je portais dans mon cœur une cicatrice aussi profonde !! !.. C'est décidé. Je prendrai demain le train de nuit.

      Denver 20 juin.

      Dieu me pardonne, mère! nous sommes sur une fausse piste; nous pourchassons un innocent! Je n'en ai pas dormi de la nuit; le jour commence à poindre et j'attends impatiemment le train du matin !.. Mais que les minutes me semblent longues, longues…

      Ce Jacob Fuller est un cousin du coupable! Comment n'avons-nous pas supposé plus tôt que le criminel ne porterait plus jamais son vrai nom après son méfait? Le Fuller de Denver a quatre ans de moins que l'autre; il est venu ici à vingt et un ans, en 1879, et était veuf un an avant votre mariage; les preuves à l'appui de ce que j'avance sont innombrables. Hier soir, j'ai longuement parlé de lui à des amis qui le connaissaient depuis le jour de son arrivée. Je n'ai pas bronché, mais mon opinion est bien arrêtée: dans quelques jours, je le rapatrierai en ayant soin de l'indemniser de la perte qu'il a subie en vendant sa mine; en son honneur je donnerai un banquet, une retraite aux flambeaux et une illumination dont les frais retomberont sur moi seul; on me traitera peut-être « d'esbrouffeur », mais cela m'est égal. Je suis très jeune, vous le savez bien, et c'est là mon excuse. Dans quelque temps on ne pourra plus me traiter en enfant.

      Silver Gulch, 2 juillet.

      Mère! Il est parti! Parti sans laisser aucun indice. Sa trace était refroidie à mon arrivée; je n'ai pu la retrouver. Je me lève aujourd'hui pour la première fois depuis cet événement. Mon Dieu! comme je voudrais avoir quelques années de plus pour mieux supporter les émotions. Tout le monde croit qu'il est parti pour l'Ouest; aussi vais-je me mettre en route ce soir; je gagnerai en voiture la gare la plus voisine à deux ou trois heures d'ici; je ne sais pas bien où je vais, mais je ne puis plus tenir en place; l'inaction en ce moment me met à la torture.

      Bien entendu, il se cache sous un faux nom et un nouveau déguisement. Ceci me fait supposer que j'aurai peut-être à parcourir le monde entier pour le trouver! C'est du moins ce que je crois. Voyez-vous, mère! le Juif errant, en ce moment: c'est moi. Quelle ironie! Et dire que nous avions réservé « ce rôle à un autre » !

      Toutes ces difficultés seraient aplanies si je pouvais placarder une nouvelle affiche. Mais je me sens incapable de trouver dans mon cerveau un procédé qui n'effraye pas le pauvre fugitif. Ma tête est prête à éclater. J'avais songé à cette affiche :

      « Si le Monsieur qui a dernièrement acheté une mine à Mexico et en a vendu une à Denver veut bien donner son adresse » (mais à qui la donner ?) « il lui sera expliqué comment il y a eu méprise à son sujet; on lui fera des excuses et on réparera le tort qui lui a été causé en l'indemnisant aussi largement que possible. »

      Mais comprenez-vous la difficulté? Il croira à un piège; c'est tout naturel, d'ailleurs! Je pourrais encore écrire: « Il est maintenant avéré que la personne recherchée n'est pas celle qu'on a trouvée; il existait une similitude de nom; mais il y a eu échange pour des raisons spéciales. » Cela pourrait-il aller? Je crains que les soupçons des gens de Denver ne soient éveillés. Ils ne manqueront pas de dire en se rappelant les particularités de son départ: Pourquoi s'est-il enfui s'il n'était pas coupable? Si je ne réussis pas à le trouver, il sera perdu dans l'estime des gens de Denver qui le portent très haut. Vous qui avez plus d'expérience et d'imagination que moi, venez à mon aide, ma chère mère !

      Je n'ai qu'une clef, une clef unique, je connais son écriture; s'il inscrit son nouveau nom sur un registre d'hôtel sans prendre le soin de la contrefaire très bien, je pourrai la reconnaître, mais il faut pour cela que le hasard me fasse rencontrer le fugitif.

      San-Francisco, 28 juin 1898.

      Vous savez avec quel soin j'ai fouillé tous les États du Colorado au Pacifique, et comment j'ai failli toucher au but. Eh bien! je viens encore d'éprouver un nouvel échec et cela pas plus tard qu'hier. J'avais retrouvé dans la rue sa trace encore chaude qui me conduisit vers un hôtel de second ordre. Je me suis trompé; j'ai dû suivre le contre-pied; les chiens le font bien! Mais je ne possède malheureusement qu'une partie des instincts du chien, et souvent je me laisse induire en erreur par mes facultés d'homme. Il a quitté cet hôtel depuis dix jours, m'a-t-on dit. Je sais maintenant qu'il ne séjourne plus nulle part depuis les six ou huit derniers mois, qu'il est pris d'un grand besoin de mouvement et ne peut plus rester tranquille. Je partage ce sentiment et sais combien il est pénible! Il continue à porter le nom qu'il avait inscrit au moment où j'étais si près de le pincer, il y a neuf mois: « James Walker »; c'est aussi celui qu'il avait adopté en fuyant Silver Gulch. Il ne fait pas d'effort d'imagination et a décidément peu de goût pour les noms de СКАЧАТЬ